Banques centrales : un taux pour les gouverner tous

La première hausse de taux de la BCE en 11 ans est effective depuis ce mercredi et la Fed doit de nouveau augmenter les siens dans la soirée. L’occasion de revenir sur ces taux directeurs au cœur des politiques économiques.
La Réserve fédérale (Fed), la banque centrale américaine, à Washington. (président Jerome Powell)
La Fed organise huit réunions régulières de son FOMC par an. (Siège de la Réserve Fédérale américaine)  -  Crédit Fed.

Comme leur nom l’indique, les taux directeurs ont vocation à diriger. Fixés par les banques centrales ils servent à orienter la politique monétaire d’un Etat ou d’une zone économique. Ils visent toujours un objectif de maîtrise de l’inflation et, parfois, d’autres indicateurs économiques, comme le plein emploi pour la Réserve fédérale américaine.

Pour parvenir à ses fins, une banque centrale peut agir sur plusieurs taux mais le principal, celui traditionnellement appelé «taux directeur», détermine le coût auquel les banques commerciales se financent auprès d’elle. En modifiant ce taux d’intérêt, la banque centrale va influer sur le loyer de l’argent à tous les niveaux : du prix auquel l’Etat emprunte via ses bons du trésor au taux des prêts immobiliers en passant par les coupons des obligations émises par les entreprises. Une hausse du taux directeur va durcir l’accès au crédit pour l’ensemble des acteurs économiques et ainsi ralentir l’activité tout en pesant sur la masse monétaire en circulation pour, potentiellement, juguler une inflation jugée trop élevée. Et inversement avec une baisse du taux.

De la dette souveraine aux prêts immobiliers

Dans les faits, ces hausses (ou baisses) de taux en cascade ont même lieu avant que la banque centrale ne modifie effectivement sa politique. Il suffit généralement qu’elle l’annonce ou que les marchés l’anticipent pour que le coût des emprunts affichant une maturité relativement longue (de quelques mois à plusieurs années) commence à l’intégrer. C’est ainsi que les taux d’emprunts souverains européens mais aussi ceux des prêts immobiliers ou de la dette des entreprises ont commencé à augmenter dès début 2022 alors qu’une augmentation du taux directeur de la Banque centrale européenne (BCE), la première depuis 11 ans, n’était pas attendue avant le mois de juillet suivant (et effective depuis le 27 juillet). Parfois, des frémissements débutent même avant que les gouverneurs de la banque centrale n’aient évoqué le moindre changement si les investisseurs prévoient que la situation économique les forcera tôt ou tard à agir.

Ces grands principes de politiques monétaires et de taux directeur s’appliquent à toutes les grandes banques centrales mais des variations dans les outils utilisés peuvent exister selon les institutions. C’est notamment les cas entre les deux banques centrales les plus scrutées par les investisseurs : la Réserve fédérale américaine (la Fed) et la BCE.

Les trois taux de la BCE

La Banque centrale européenne compte en fait trois taux directeurs. Le principal correspond au taux de refinancement des banques commerciales à une semaine (dit MRO). Lorsqu’elle agit sur ses taux, la BCE modifie ce taux de «refi» mais aussi deux autres : le taux de facilité de prêt marginal qui est un prêt à 24h proposé aux banques commerciales ayant un besoin urgent de liquidité, et le taux de facilité de dépôt qui correspond à la rémunération offerte par la banque centrale pour les dépôts qu’effectuent les banques commerciales auprès d’elle. En théorie, ces deux taux représentent le plafond (taux de prêt marginal) et le plancher (taux de facilité de dépôt) du marché interbancaire. En pratique, ce n’est plus le cas en Europe depuis la crise de 2008. L’afflux de liquidités dû aux mesures exceptionnelles de politiques monétaires prises depuis (programmes d’achats d’actifs dits QE, programmes de refinancement à plus long terme dits LTRO et TLTRO) a fait chuter le taux de référence €STR sous celui de facilité de dépôt. Mi-2022, l’€STR ressortait ainsi à -0,58% contre -0,5% pour la facilité de dépôt.

Une cible de taux pour la Fed

Le taux directeur de la Fed correspond de son coté à une fourchette de taux dits «cibles», les «Fed funds». Il s’agit des bornes auxquelles les banques sont censées se refinancer sur le marché interbancaire. Pour s’assurer du respect de cette fourchette, la Fed intervient directement sur le marché. Chaque jour, la Réserve fédérale publie le taux effectif des Fed funds (EFFR) qui correspond au taux médian auquel les transactions ont effectivement été réalisées le jour précédent. Il se situe généralement dans la fourchette cible décidée par la Fed. Comme la BCE avec son taux de prêt marginal, la Banque centrale américaine agit aussi sur un taux d’emprunt d’urgence appelé le taux d’escompte (discount window en anglais).

Huit réunions annuelles

La Fed organise huit réunions régulières (FOMC pour Federal Open Market Committee) par an. Trois semaines après chaque FOMC, elle publie les «minutes», ou compte rendu détaillé de la réunion.

Le conseil des gouverneurs de la BCE se réunit pour sa part toutes les six semaines (soit de l’ordre de huit fois par an également) pour aborder des sujets de politique monétaire. Une conférence de presse est organisée dans la foulée et un compte rendu est publié avant la tenue de la réunion suivante.

Ce sont généralement lors de ces conseils ou FOMC que sont annoncées les décisions en matière de politique monétaire même si des réunions exceptionnelles peuvent aussi être organisées.

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