
Les effets du «quantitative easing» sont là pour longtemps
C’est l’un des arguments des gouverneurs les plus faucons de la Banque centrale européenne (BCE) pour lancer la fin du programme d’achats d’urgence pandémique (PEPP) et la réduction du programme d’achats régulier (APP) : le stock de près de 5.000 milliards d’euros d’obligations (souveraines et corporates) détenues par la Banque centrale européenne (BCE) assurerait des taux réduits pour dix ans, même si on mettait fin à de nouveaux achats aujourd’hui - l’institution a annoncé le 16 décembre qu’elle devrait injecter encore 480 milliards l’an prochain (environ 150 via le PEPP et précisément 330 via l’APP).
La membre du board Isabel Schnabel, de plus en plus restrictive, considère que «le rapport entre les avantages et les inconvénients d’achats supplémentaires (notamment provenant des effets ‘flux’ et liés à l’extraction de duration, ndlr) se détériore avec la reprise économique», et a fait plusieurs présentations sur ce thème ces derniers mois. Elle a souvent insisté sur le fait que les taux réels restent très bas (un taux nominal à 10 ans à 0% avec des swaps d’inflation IRS 10 ans à 0,24% équivaut à -0,24%), et donc que «le stock d’actifs acquis exercera une pression baissière persistante sur les rendements obligataires».
Substituts et compléments
Les programmes actuels réduisent les primes de terme des dettes souveraines des quatre principaux Etats de la zone (Allemagne, France, Italie, Espagne) d’environ 130 points de base (pb) à 5 ans et 180 pb à 10 ans, et devraient maintenir ces réductions, même sans ajout, au-dessus de respectivement 100 et 120 pb jusqu’à 2027 par exemple.
L’économiste allemande ajoute que l’incertitude sur l’évolution des taux augmente lorsque l’inflation projetée se rapproche progressivement de la cible de 2%, et que la nouvelle orientation prospective (forward guidance) définie en juillet a amélioré la clarté sur sa fonction de réaction, et ancré les taux longs en réduisant cette incertitude. «Les indications prospectives et les achats d’actifs doivent être considérés à la fois comme des substituts et des compléments», avec donc une utilité différente des achats selon la phase du cycle monétaire : rééquilibrage du portefeuille au début, signalisation ensuite. Reste à savoir quelle flexibilité conserveront les achats post-PEPP pour limiter la fragmentation entre pays, et si des facteurs de liquidité pas forcément linéaires ne risquent pas de perturber cette nouvelle phase.
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