
Combien TotalEnergies va-t-il payer d’impôt sur ses superprofits ?

La taxe généralisée sur les «superprofits» voulue par certains politiques français n’aura pas lieu. Le projet n’est pas inclus dans le projet de loi de Finances 2023 (PLF) et l’espoir des parlementaires de la Nupes de le voir passer par référendum a été douché par le conseil constitutionnel. Si de nombreuses entreprises, comme CMA CGM, vont ainsi passer entre les mailles du filet, ce n’est pas le cas de TotalEnergies. Le secteur énergétique en général et les pétroliers en particulier vont bien être mis à contribution. A l’échelle française, l’impact devrait toutefois être mesuré, voire symbolique, pour le groupe dirigé par Patrick Pouyanné.
Dans une récente étude, Maxime Combes, économiste de l’Observatoire des multinationales, estime que la contribution prévue par le PLF serait comprise entre 40 et 65 millions d’euros en France au titre de 2022 pour TotalEnergies. Des chiffres très faibles qu’il convient toutefois de nuancer. Pour les obtenir, Maxime Combes a répliqué la structure bénéficiaire du pétrolier en 2019 sur 2022. Une technique qui pourrait sous-estimer la forte hausse des profits liés au raffinage cette année alors que ce sont justement eux qui sont visés par la taxe exceptionnelle. L’économiste le reconnait d’ailleurs volontiers : «l’objectif n’est pas de faire une prédiction sur ce que pourrait payer TotalEnergies mais plutôt d’obtenir un ordre de grandeur». Contacté, TotalEnergies ne fournit, de son coté, aucune estimation pour le moment.
200 millions maximum
Lors de son audition par des députés, Patrick Pouyanné avait néanmoins indiqué que les raffineries françaises de l’entreprise devraient générer de l’ordre de 600 millions d’euros de bénéfice cette année. Sachant que cette activité a cumulé 2 milliards d’euros de pertes entre 2018 et 2020, la totalité des profits 2022 pourrait être taxée au taux prévu par le PLF, soit 33%. Sous ces hypothèses, la facture atteindrait près de 200 millions d’euros. Ce niveau constitue sans doute un plafond et le montant final sera inférieur si on en croit les prévisions de Bercy. Le ministère des Finances anticipe en effet que les recettes de cette taxe atteindront au global 200 millions d’euros. Or TotalEnergies détient seulement de l’ordre de 40-50% des capacités françaises de raffinage, ce qui pourrait ramener sa part à environ 100 millions d’euros. Voire moins si le coût de la ristourne à la pompe accordée par le groupe, soit environ 500 millions d’euros, vient amputer les profits de son activité raffinage.
En réalité, l’essentiel des taxes sur les superprofits payées par TotalEnergies le sera dans d’autres pays que la France. La contribution mise en œuvre par Bruxelles – et transcrit dans l’Hexagone par le PLF – devrait lui coûter environ 1 milliard d’euros, a estimé le groupe. Outre la France, cinq autres payés sont concernés, dont l’Allemagne et la Belgique où le groupe compte des capacités de raffinage mais aussi les Pays-Bas et le Danemark où il produit quelques milliers de barils équivalent pétrole par jour.
Taux d’imposition en hausse
Un milliard de dollars, c’est aussi le coût estimé par l’entreprise pour l’«Energy Profits Levy», la taxe exceptionnelle sur les profits des producteurs d’hydrocarbures appliquée au Royaume-Uni. En 2021, la production de TotalEnergies dans le pays s’était élevée à 58.000 barils par jour équivalent pétrole, contre 24.000 pour la totalité de l’Union européenne. Au troisième trimestre, le taux d’imposition du groupe a d’ailleurs progressé de 4,5 points, à 44,1%, du fait notamment de la mise en place de cette contribution. Et la taxe européenne pourrait encore l’augmenter. Pas de quoi, toutefois, mettre en péril les bénéfices du pétrolier. Sur les neuf premiers mois de l’année, son résultat net ajusté s’est envolé de 154%, à 28,6 milliards de dollars. Une manne qui permet au groupe d’accorder des hausses de rémunération à ses salariés, de verser un dividende exceptionnel à ses actionnaires et d’augmenter ses investissements. Le tout en réduisant drastiquement son endettement.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse