Nicolas Dureux : Un montagnard qui se serait bien vu girondin

Aujourd’hui directeur de la gestion sous mandat au sein de la banque privée Credit Suisse en France, Nicolas Dureux est un social démocrate convaincu et un grand amoureux de la montagne. Ascension d’un banquier privé pas comme les autres.
Jérémie Gatignol
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Né à Nancy en 1963 dans une famille d’intellectuels profondément ancrée en Lorraine, Nicolas Dureux a passé toute sa jeunesse dans la capitale de Meurthe-et-Moselle. Sa mère, une femme médecin très religieuse, et son père, médecin également, lui inculquent rapidement les valeurs de la démocratie chrétienne. « Ils m’ont appris le respect des idées », raconte Nicolas. Petit dernier d’une fratrie de trois enfants, il réalise l’ensemble de sa scolarité à Notre-Dame Saint-Sigisbert, où il obtient son Bac B (ndlr : économique et social) en 1981. « Après mon bac, je me suis dirigé vers le droit, avec l’envie de devenir homme politique », confie-t-il. Ses quatre années passées à l’Université de Nancy 2 en droit public confirment son intérêt pour la chose publique, ce qui le conduira tout naturellement à faire Sciences-Po à Paris. Grand admirateur de Willy Brandt et de la social-démocratie allemande (il en a fait une étude en allemand lors de sa scolarité), il regrette de ne pas avoir assez de temps pour s’investir dans la vie politique. « Je pense que nous vivons une période historique charnière, où le ciment de la construction européenne est en train de se fissurer, souligne-t-il. La montée du racisme et des nationalismes m’inquiète énormément ». Sa jeunesse passée en Lorraine et la proximité avec la frontière allemande ont fait de lui un germanophile convaincu. Sa fille aînée de 21 ans est actuellement à Freibourg in Brisgau et sa seconde fille fait une double licence droit-allemand. Cependant, il s’attriste de la mauvaise image actuelle des héritiers d’Emmanuel Kant en Europe. C’est à Science-Po Paris qu’il a aiguisé son analyse des évolutions sociales, politiques et économiques de la société. En 1985, il rejoint l’IEP de la capitale avec dans l’idée de devenir journaliste économique. Deux ans plus tard, il doit suspendre sa scolarité pour effectuer son service militaire. Mais, ne voulant pas perdre de temps, il décide de s’inscrire parallèlement en maitrise de droit des affaires à l’Université Paris II Assas. Il est alors détaché à l’aéroport d’Orly auprès des contrôleurs aériens militaires. « Je faisais la navette du courrier d’Orly à St Cyr la matinée et j’étais ensuite tranquille pour potasser l’après-midi », se souvient-t-il. À l’époque, Nicolas habite dans une chambre étudiante au niveau de la porte d’Italie et suit les cours du soir à Assas. Sa maîtrise en poche et son service militaire terminé, il retourne sur les bancs de la rue Saint-Guillaume pour achever sa formation. Il y rencontre celle qui deviendra sa femme et décide, après une discussion avec son beau-père, qu’une carrière dans le journalisme n’est finalement pas une option judicieuse. « Il m’a expliqué que journaliste économique, cela ne payait pas et qu’il allait falloir trouver autre chose… », se rappelle-t-il en souriant. Il choisit donc de se tourner vers la banque et intègre l’équipe de gestion financière de Paribas en 1989. Pendant six ans, il occupe le poste de banquier privé, avant d’être nommé responsable de la gestion de fortune en 1995, à seulement 32 ans. « Le management de l’époque de Paribas faisait confiance aux jeunes générations. Cela serait surement beaucoup plus compliqué aujourd’hui », convient Nicolas. Vingt ans plus tard, cette jeune génération arrivée chez Paribas dans les années 90, et qui occupe désormais des postes stratégiques dans la sphère financière, se réunit toujours régulièrement. « Nous avons une sorte de petit club informel d’une centaine de personnes qui se retrouvent tous les deux ans », explique-t-il. Il reste cinq ans au siège de la banque parisienne, au sein d’une équipe positionnée sur les clients « ultra high net worth ». En 2000, BNP et Paribas fusionnent et Nicolas se retrouve en charge de toute l’offre financière de gestion de fortune, mais du côté produits et services. Il ne gère plus aucun portefeuille et s’occupe avant tout de l’ingénierie de nouveaux produits et de leur marketing. « Après 10 ans en tant que gestionnaire de patrimoine je souhaitais évoluer, et j’ai trouvé intéressant de me positionner du côté de la création de produits », se remémore-t-il. Une expérience qui durera huit ans et durant laquelle il mettra en place les premières listes de multigestion de BNP Paribas en collaboration avec la section asset management de l’établissement (renommée FundQuest en 2005). De cette époque, il garde un très bon souvenir. « C’est là que j’ai forgé mes relations avec l’ensemble des sociétés de gestion de la place de Paris », indique-t-il. En 2008, son envie de repasser du côté client le pousse à quitter le navire et il rejoint le Credit Suisse en tant que responsable du pôle « investment consulting ». La fonction n’étant pas encore très structurée, il part avec une « feuille blanche » et met en place le contrat de conseil, pendant du contrat sous-mandat, pour la clientèle privée. C’est aussi à cette époque qu’il crée les « matinées consulting », qui regroupent clients, gérants et intervenants externes. Des événements avec une valeur pédagogique forte. « Il est très important de bien expliquer les fondamentaux du marché à nos clients, de faire partager notre savoir », insiste-t-il. Un aspect qui lui tient d’autant plus à cœur qu’il donne depuis 2010 des conférences à Science-Po Paris dans le cadre du master stratégie et finances. « C’est une activité que j’apprécie beaucoup et que je me verrai bien pratiquer de manière plus importante à ma retraite », remarque-t-il. En dehors de ses activités professionnelles, Nicolas est un grand amoureux de la montagne. Son père, qui passait leurs randonnées familiales à photographier les fleurs, lui a transmis son virus très jeune. « À cinq ans, j’étais déjà à 3 000 mètres d’altitude », s’enthousiasme-t-il. Aujourd’hui, Nicolas est incollable sur toutes les fleurs de montagne et partage à son tour sa fascination pour les lignes de crête avec ses enfants. « Cet été j’ai emmené mon fils de 13 ans dans un col du Massif des Écrins (ndlr : en Hautes-Alpes) et je lui ai montré mon coin secret à edelweiss », évoque-t-il avec fierté. Un moment inoubliable pour ce passionné qui est très attaché aux traditions et aux plaisirs simples. Et quand il ne descend pas les vallées à pieds, c’est à ski et en famille qu’il les dévale. Un moment incontournable de l’année pour la famille Dureux. Cet attrait pour la nature se traduit également dans la vie quotidienne de Nicolas. Tous les week-ends il prend soin de son potager et cuisine des produits de saison pour ses amis. Fin septembre, il a d’ailleurs organisé un dîner autour de l’automne. Au menu, velouté de potiron et ses miettes de châtaigne suivie d’une volaille aux champignons. Côté lecture, ce grand nostalgique des épopées familiales a dévoré tous les romans de Troyat et relit régulièrement l’histoire de la Russie et des tsars. Nicolas se définit comme un romantique et aurait aimé vivre les révolutions françaises, même s’il est convaincu qu’il aurait eu une fin tragique. Admirateur de Camille Desmoulins, il se serait bien vu du côté des girondins plutôt que des montagnards. Un refus des extrémismes qui qualifie assez bien sa pensé actuelle. « Il faut lutter contre le populisme et le conservatisme très fort qui caractérisent notre société, insiste-t-il. Quand je vois l’ampleur de la polémique actuelle sur les migrants ou les proportions prises lors du débat sur le mariage pour tous il y a quelques mois, je suis abasourdi ». Des convictions très fortes qui ne l’empêchent pas de savoir prendre du recul et de s’amuser de tout. « Je pense que l’humour est une de mes grandes forces », constate Nicolas qui aime à rappeler qu’il est important de rire au moins une fois par jour et de toujours dédramatiser les situations compliquées. Il a tout de même quelques regrets, et notamment celui de n’avoir jamais appris à jouer d’un instrument de musique. Il aurait voulu faire du piano, et comble ce vide par un appétit insatiable pour les concertos pour piano de Rachmanninoff, Saint Saens, Mozart, Chopin ou encore Tchaïkovski.

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