
Liquidation d’une communauté entre époux : conflit sur la nature propre ou commune des parts d’une SCI

Mariés sous le régime conventionnel de communauté réduite aux acquêts en 1979, des époux divorcent le 3 novembre 2003 et s’opposent quant à la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux.
L’ex-mari doit une récompense à la communauté et une créance à son ex-épouse. Dans un premier temps, la cour d’appel condamne l’ex-mari à deux niveaux: celui-ci devra la somme de 360.998,45 euros au titre d’une société civile immobilière (SCI) et une somme de 42.654, 45 euros à son ex-épouse au titre de cette même SCI. Le débiteur de ces sommes forme un pourvoi qui est rejeté par la Cour de cassation au motif que «c’est par l’exacte application de l’article 1469 du Code civil que la cour d’appel a, par motifs propres et adoptés, déclaré [l’ex-époux] redevable d’une récompense et d’une créance calculées selon les règles du profit subsistant en fonction du prix de revente de l’immeuble». En effet, la cour d’appel avait justement relevé que la SCI avait réalisé une opération immobilière financée par des emprunts contractés à titre personnel par [l’ex-mari] et remboursés en partie par des fonds communs et des fonds propres de son ex-épouse. En outre, les juges du fond avaient également constaté que l’ex-mari s’était vu attribuer un des immeubles à la suite de la dissolution de la société, puis l’avait revendu, la communauté n'étant alors pas liquidée.
Le motif «Les parts sociales sont propres à l’ex-mari dès lors que celui-ci s’était engagé par le contrat de société avant le mariage»... Dans un second temps, la cour d’appel déboute l’ex-épouse de sa demande tendant à voir déclarer communes les 97 parts attribuées à son ex-mari dans une autre société civile immobilière. Les parts sont donc considérés comme des biens propres à l’ex-mari. Pour justifier leur décision, les juges du fond ont relevé que les statuts de la société, créés entre l’ex-mari et son frère, avaient été signés en août 1979, soit antérieurement au mariage prononcé le 1er septembre 1979. Peu important le fait que les formalités fiscales et de publicité ont été effectuées postérieurement à la date de ce mariage. Et notamment, les apports de l’ex-mari ont été libérés le 3 septembre 1979. La cour d’appel, comme les premiers juges, estiment que «c’est la convention entre associés qui a créé la société, soit en l’espèce avant le mariage ; que les fonds versés dans les jours qui ont suivi le mariage, et qui n'étaient que l’exécution de ce contrat, sont également propres, le tribunal ayant parfaitement motivé pourquoi la présomption de communauté devait être repoussée».
… est inopérant. La Cour de cassation censure l’argumentation de la cour d’appel sur ce point. La Cour de cassation estime en effet qu’elle s’est déterminée par des motifs inopérants en l’absence de base légale au regard des articles 1401 et 1402 du Code civil étant donné que «dans les rapports entre les époux, la valeur des parts d’une société civile présente un caractère commun en cas d’acquisition au moyen de fonds communs ou un caractère propre en cas d’acquisition à l’aide de fonds propres en présence d’un accord des époux ou d’une déclaration d’emploi ou de remploi».
Pour Pierre-Alain Guibert notaire associé chez 14 Pyramides, «c’est à la date d’immatriculation de la société qu’il faut se placer pour déterminer la nature propre ou commune des parts de la SCI. Car c’est cette immatriculation qui donne leur existence juridique aux parts et fixe leur date d’acquisition. En l’espèce, l’immatriculation étant intervenu en décembre 1979, les parts sont présumées communes. D’ailleurs, si l’ex-époux avait, au moment de la libération des apports ou de l’immatriculation - postérieures au mariage – acté une déclaration d’emploi de fonds propres et d’origine des deniers, contresignée par sa jeune épouse, il n’aurait pas connu ce problème de qualification au moment de la liquidation de la communauté puisque les parts auraient été propres au sens de l’article 1434 du Code civil ».
Cass. civ. 1, 8 octobre 2014, n° 13-21874 (Lire l’arrêt en pdf ci-dessous)
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Agriculture: la FNSEA souhaite une journée de mobilisation le 25 septembre
Paris - Le syndicat agricole FNSEA appelle à «une grande journée d’action» autour des questions des échanges internationaux pour les produits agricoles le vendredi 25 septembre à travers toute la France, annonce son président Arnaud Rousseau dans un entretien au Journal du dimanche. Cette mobilisation aura lieu contre «le Mercosur, les taxes imposées par Donald Trump et le flot des importations internationales qui ne respectent pas les normes qui sont les nôtres», explique le dirigeant. «A l’image des œufs ukrainiens: tous ces produits qui entrent sur notre territoire et que nous ne voulons pas voir dans nos assiettes, car ils sont dangereux pour la santé et pour l’environnement!», poursuit-il. «Les actions sont à l’appréciation des fédérations départementales mais ça peut prendre la forme de visite de grandes surfaces pour aller chercher tous les produits non conformes», a précisé à l’AFP un porte-parole du premier syndicat agricole français, qui mènera ces actions avec les Jeunes agriculteurs (JA). La FNSEA et les JA avaient déjà dit leur hostilité à l’accord de libre-échange entre des pays latino-américains du Mercosur et l’Union européenne. Cet accord UE-Mercosur doit notamment permettre à l’UE d’exporter davantage de voitures, de machines, de vins et de spiritueux en Argentine, au Brésil, en Uruguay et au Paraguay. En retour, il faciliterait l’entrée de viande, sucre, riz, miel ou soja sud-américains, au risque de fragiliser certaines filières agricoles européennes. La FNSEA avait indiqué ne pas vouloir participer au mouvement «Bloquons tout» du 10 septembre pour éviter une «récupération politique» mais avait déjà prévu une mobilisation «cet automne» sur ses propres revendications. «Nous attendons une date de rendez-vous avec (le nouveau Premier ministre) M. Lecornu dans les prochains jours», a précisé le porte-parole à l’AFP. © Agence France-Presse