
Le Gouvernement s’est défendu d’assimiler le professionnel de l’expertise comptable à un avocat

L’article 153 de la loi déférée prévoit que les cessions de parts d’une société civile sont soumises aux formalités de publicité foncière qu’implique le recours à l’acte authentique sous contrôle d’un notaire ou à un acte sous seing privé contresigné par un avocat ou un professionnel de l’expertise comptable.
Les sénateurs auteurs de la saisine considèrent que le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence et l’objectif à valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi en permettant aux experts-comptables de contresigner des actes dans les conditions prévues au chapitre Ier bis du titre II de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.
Le Gouvernement n’est pas de cet avis.
La disposition s’inscrit dans l’objectif de sécuriser l’exercice du droit de préemption lorsque celui-ci est exercé sur des cessions de parts de SCI.
Le législateur a souhaité, dans le cadre du débat parlementaire, introduire l’obligation de recourir à un notaire, un avocat ou un expert-comptable pour réaliser la cession de la majorité des parts de SCI, portant sur une unité foncière ou immobilière, soumises au droit de préemption urbain.
Pour assurer le renforcement des modalités de publicité foncière de ces opérations, l’article 153 a prévu d’ouvrir aux experts-comptables, dans ce champ restrictivement limité, la possibilité ouverte aux avocats de contresigner des actes sous seing privé en application de la loi du 31 décembre 1971.
Le renvoi aux modalités prévues par la loi du 31 décembre 1971 précitée permettra d’harmoniser les responsabilités des professionnels chargés de la rédaction d’un même type d’acte (en l’espèce, un acte de cession portant sur la majorité des parts de SCI soumises au droit de préemption urbain).
Il n’aura, en revanche, contrairement à ce que soutiennent les auteurs de la saisine, ni pour objet ni pour effet d’assimiler le professionnel de l’expertise comptable à un avocat et de créer ainsi une incertitude juridique de nature à rendre inintelligible la disposition contestée.
Ce renvoi n'étend pas les compétences des experts-comptables, ceux-ci n’intervenant en matière de rédaction d’actes juridiques que dans les limites fixées par l’ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l’ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d’expert-comptable. En effet, les travaux juridiques effectués par un expert-comptable doivent être directement liés aux travaux comptables dont ils sont chargés et revêtir un caractère accessoire.
Par ailleurs, les conditions dans lesquelles seront contresignés ces actes sont dépourvues d’ambiguïté.
L’article 3 de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et de certaines professions réglementées a inséré au sein du titre II de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques un nouveau chapitre Ier bis intitulé « Le contreseing de l’avocat ».
Selon l’article 66-3-1 de la loi du 31 décembre 1971, en contresignant un acte sous seing privé l’avocat atteste avoir pleinement éclairé la ou les parties qu’il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte.
L’acte contresigné par avocat demeure un acte sous seing privé et n’a, par conséquent, ni date certaine, ni force exécutoire. Seule sa force probante est renforcée puisqu’il fait pleine foi de l'écriture et de la signature des parties, tant à leur égard qu'à celui de leurs héritiers ou ayants cause (article 66-3-2 de la même loi). Ces personnes ne peuvent donc plus dénier ou ne pas reconnaître la signature ou les signatures figurant sur l’acte. Elles ne pourront recourir à la procédure de vérification d'écriture (articles 287 à 298 du code de procédure civile).
Le même article 66-3-2 dispose, par ailleurs, que la procédure de faux prévue par le code de procédure civile lui est applicable. Les parties peuvent contester le contenu de l’acte qu’on leur oppose, si elles estiment notamment qu’il a été falsifié. Elles devront alors utiliser la procédure de faux (articles 299 à 302 du code de procédure civile) qui est distincte de la procédure d’inscription de faux réservée aux actes authentiques (articles 303 à 316 du code de procédure civile).
Enfin, l’article 66-3-3 de la même loi prévoit que l’acte contresigné par avocat est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi.
Dès lors, en permettant que l’acte sous seing privé relatif à la cession de la majorité des parts sociales d’une SCI puisse être contresigné par un professionnel de l’expertise comptable « dans les conditions prévues au chapitre Ier bis du titre II de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 » le législateur a entendu que le bénéfice des dispositions sus-évoquées soit, mutatis mutandis, étendu à ce professionnel.
Au total, le législateur n’a pas méconnu l'étendue de sa compétence en transposant un dispositif juridique à un professionnel se trouvant dans une situation comparable à celui pour lequel il a été institué.
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Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement est d’avis que les griefs articulés dans la saisine ne sont pas de nature à conduire à la censure de la loi déférée.
Aussi estime-t-il que le Conseil constitutionnel devra rejeter le recours dont il est saisi.
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