Immobilier: la guerre en Ukraine freine la production de crédit

Déjà mise à mal par le resserrement des conditions d’octroi, elle a baissé de 14% au mois de mars. En parallèle, la remontée des taux d’intérêt participe à modifier le profil des emprunteurs.
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Les conséquences de la guerre en Ukraine sur le marché immobilier français commencent à faire jour. L’Observatoire du Crédit Logement / CSA souligne dans son baromètre du marché du premier trimestre 2022 une forte baisse de la production de crédit immobilier aux particuliers depuis le début du conflit au mois de mars: -14,1%. Un «trou d’air» que l’économiste Michel Mouillart, en charge de l’Observatoire, impute partiellement au conflit militaire. «Nous tablions déjà sur un début d’année difficile après plusieurs mois d’inflation et des difficultés d’approvisionnement croissantes, a-t-il précisé lors d’une conférence de presse. Le déclenchement de la guerre a été un élément de désordre supplémentaire aux déséquilibres qui œuvraient déjà depuis le début de l’année».

Il est vrai que la production de crédit commençait déjà à marquer le pas avant le début de l’offensive russe. Sur l’ensemble du premier trimestre 2022, elle n’est ainsi en hausse que de 2,1% par rapport à la même période l’année d’avant. Les experts de l’Observatoire imputent cette augmentation aux montants d’emprunts plus élevés pour faire face aux prix des logements en augmentation continue. «En revanche, le nombre de prêts accordés recule de 5.5% sur la même période, en glissement annuel par référence à un 1er trimestre 2021 déjà dégradé», a précisé Michel Mouillart.

Source : L’Observatoire Crédit Logement / CSA

Remontée progressive des taux

Le coup de frein sur la production de crédit n’est pas imputable qu’à la guerre en Ukraine. D’autres facteurs expliquent ce ralentissement. A commencer par la hausse des taux d’intérêt. Au 1er trimestre, ils s’élevaient en moyenne à 1,12%, soit une augmentation de 12 points de base (pdb) depuis décembre 2021. Une remontée «modérée» selon Michel Mouillart, comparée à l’augmentation du taux interbancaire de 60 pdb depuis le début de l’année et de l’envolée de l’inflation au mois de mars (4,5%). La hausse devrait continuer: le Crédit Logement / CSA anticipe un taux moyen de 1,21% pour le mois d’avril.

La remontée générale est donc en cours mais est fortement encadrée par les banques, peu désireuses de se couper du levier des crédits pour attirer de nouveaux clients. Déjà contraintes par le Haut conseil de stabilité financière (HCSF) d’appliquer des conditions d’accès à l’emprunt très strictes, elles veulent éviter d’afficher rapidement des taux repoussoirs. Julie Bachet, directrice générale de Vousfinancer, confirmait dans le dernier Point Immo, notre nouvelle émission consacrée au décryptage de l’actualité immobilière, qu’elles souhaitaient ainsi «préparer les esprits»: «Alors que les banques mettent traditionnellement leurs barèmes à jours tous les mois, elles le font à présent tous les quinze jours», prévenait-elle.

Surtout qu’en parallèle, les Français, eux, veulent toujours acheter. Et pour parvenir à leurs fins, les ménages les moins aisés n’ont d’autres choix que de s’endetter plus longtemps. La durée moyenne des prêts était de 241 mois en ce premier trimestre, en très forte hausse par rapport à 2002 (163 mois). Mais tirer sur la corde ne suffit pas toujours. D’autant que pour compenser la limite d’endettement à 35% imposée par le HCSF, les banques demandent un niveau d’épargne de plus en plus important. Les courtiers commencent à alerter sur l’augmentation du taux de refus des dossiers par les banques, avec des conséquences déjà visibles sur la structure de la production de crédit. «La part des ménages les plus aisés dans la production de crédit a augmenté, a relevé Michel Mouillart. Et comme ils réalisent des projets plus ambitieux qu’avant, le coût des opérations réalisées progresse très rapidement: + 9.5% au 1er trimestre contre + 4.6% en 2021.»

Source : L’Observatoire Crédit Logement / CSA

Cette dynamique s’inverse toutefois dans le marché du neuf. «La part des ménages percevant moins de trois SMIC s’élève et retrouve quasiment son niveau observé en 2019, a observé Michel Mouillart. Ce ré-équilibrage ramène progressivement le marché la structure de la reproduction de crédit de 2019».

Source : L’Observatoire Crédit Logement / CSA

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