
Vivendi envisage de coter Havas à Amsterdam et Canal+ à Londres

Vivendi prend ses distances avec la Bourse de Paris. Le groupe a annoncé lundi la faisabilité de son projet de scission et a identifié les places boursières les plus appropriées pour les trois sociétés Canal+, Havas et Louis Hachette Group après leur séparation du spécialiste des médias et du divertissement. Avec Londres en vue pour la première et Amsterdam pour la deuxième, la place boursière parisienne va perdre en substance.
Au premier trimestre, Canal+ et Havas ont représenté 51% des ventes du conglomérat et ils avaient généré plus de 80% de son résultat opérationnel ajusté l’an dernier.
Vivendi avait lancé en décembre 2023 une étude de faisabilité d’un projet de scission où le groupe audiovisuel Canal+, le publicitaire Havas et une société regroupant les actifs dans l'édition et la distribution, Louis Hachette Group, deviendraient des structures indépendantes cotées. L’objectif de l’opération est de supprimer la décote de conglomérat du groupe, qui s'élevait à 44% avant l’annonce du projet et limite la capacité de ses filiales à réaliser des opérations de croissance externe.
Canal+ resterait domicilié en France
Canal+ serait cotée au London Stock Exchange «afin de refléter la dimension internationale de l’entreprise, notamment dans le cadre du rapprochement en cours avec MultiChoice», a poursuivi Vivendi, en assurant que la société resterait «domiciliée et fiscalisée en France». Le groupe audiovisuel pourrait, en fonction du succès de son offre d’achat sur son concurrent sud-africain MultiChoice, faire l’objet d’une seconde cotation à la Bourse de Johannesburg.
Le publicitaire Havas serait coté sous la forme d’une société par actions de droit néerlandais sur Euronext Amsterdam, tout en restant «résident fiscal français», tandis que la structure Louis Hachette Group serait cotée sur Euronext Growth à Paris, en cohérence avec le maintien de la cotation de sa filiale Lagardère SA sur le marché réglementé d’Euronext Paris. Louis Hachette regroupe les actifs détenus par Vivendi dans l'édition et la distribution, à savoir 63,5% du capital de Lagardère SA et 100% des parts de Prisma Media.
Dans cette configuration, Vivendi resterait coté sur le marché réglementé d’Euronext Paris, et ses activités consisteraient à développer l'éditeur de jeux vidéo Gameloft et à gérer un portefeuille de participations, au premier rang desquelles la maison de disques Universal Music Group.
Un endettement quasi nul pour Canal+ et Havas
Les détails apportés lundi par Vivendi sont «utiles», commente UBS, car ils permettent de se faire une idée de la manière dont la dette de Vivendi sera répartie entre les différentes sociétés scindées.
En cohérence avec la stratégie de Vivendi visant à permettre à ses filiales de saisir des opportunités d’investissement, Canal+ et Havas auraient une dette nette quasi nulle après leur scission, à l’exception de la dette mise en place par Canal+ pour l’OPA sur MultiChoice.
Louis Hachette Group n’aurait pas d’endettement propre en dehors de l’endettement net d’environ 2 milliards d’euros de Lagardère qui a récemment fait l’objet d’un refinancement.
Après les opérations de scission, la dette nette de Vivendi pourrait se situer entre 1,5 milliard et 2 milliards d’euros.
Au vu de cette répartition attendue de l’endettement de Vivendi et de la réévaluation des capitaux propres de toutes les entités, JPMorgan a relevé son objectif de cours sur l’action Vivendi de 15,10 à 15,40 euros. La banque d’affaires américaine reste à «surpondérer» sur la valeur, qui demeure son premier choix dans le secteur des médias.
A la Bourse de Paris, l’action Vivendi a reculé de 0,6% lundi après avoir gagné jusqu'à 1,5% en séance.
A lire aussi: Vivendi solde son dernier litige de l’ère Messier
Une AGE pourrait se tenir en décembre
Vivendi a précisé que l'étude des aspects fiscaux de ce projet se poursuivait. Aussi, les procédures d’information et de consultation des instances représentatives du personnel compétentes au sein du groupe vont maintenant être engagées. Parallèlement, «un certain nombre d'échanges seront organisés avec les autorités fiscales et réglementaires, notamment boursières», a ajouté Vivendi.
«Si ce projet devait se poursuivre à l’issue de cette procédure d’information et de consultation, une décision pourrait être prise à la fin du mois d’octobre 2024 en vue de le soumettre à une assemblée générale extraordinaire des actionnaires qui pourrait se tenir au mois de décembre 2024", envisage le groupe.
«Cette opération n’aura ainsi lieu que si elle recueille l’approbation, lors de cette assemblée, des deux tiers des voix des actionnaires», a prévenu Vivendi, qui a assuré qu’«aucun besoin d’autorisation réglementaire n’a[vait] été identifié à ce jour, qui conditionnerait la réalisation de ce projet».
«Compte tenu des avantages attendus pour tous les actionnaires, nous nous attendons à ce que l’opération soit approuvée à une large majorité», écrivent les analystes de JPMorgan dans une note envoyée à leurs clients.
En cas d’approbation par l’AGE, l’attribution aux actionnaires de Vivendi des actions des différentes sociétés concernées, et leur cotation en Bourse, devraient avoir lieu «dans les jours suivants», a précisé Vivendi. Les investisseurs apprécient le fait que la scission pourrait intervenir plus rapidement que prévu initialement, observe UBS.
Après attribution de ces actions, le groupe Bolloré détiendrait environ 30,6% du capital et des droits de vote de Canal+ et de Louis Hachette Group. Il regrouperait autour de 30,6% du capital d’Havas NV, mais plus de 40% des droits de vote.
La mise en œuvre de ce projet de scission n’aurait donc pas vocation à entraîner d’offre publique sur Vivendi ou sur l’une des entités séparées du groupe. L’apport de la participation majoritaire dans Lagardère SA à Louis Hachette Group fera l’objet d’une demande de dérogation à l’obligation de lancer une OPA auprès de l’Autorité des marchés financiers, fondée sur le motif propre aux opérations de scission.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse -
Jérôme Durain, le "M. Narcotrafic" du Sénat, est élu président de la région Bourgogne-Franche-Comté
Dijon - Le sénateur socialiste Jérôme Durain, élu vendredi à la tête de la région Bourgogne-Franche-Comté, a acquis une notoriété nationale en cosignant la proposition de loi contre le narcotrafic, ce qui lui a valu d'être élu «sénateur de l’année» en 2024. Jérôme Durain, élu à la tête de la région en remplacement de Marie-Guite Dufay, démissionnaire, est né le 2 juin 1969 à Nancy. Diplômé en 1993 de l’Institut d'Études Politiques de Paris, il épouse une carrière dans la fonction publique territoriale. Ce n’est qu'à 33 ans qu’il prend sa carte du PS, suite au choc qu’a représenté pour la gauche le 21 avril 2002 et la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle. Le combat contre le RN reste depuis son cheval de bataille, qu’il devra encore enfourner lors des prochaines élections régionales, en 2028, l’extrême droite étant en nette progression dans la région. En 2004, il fait la connaissance d’Arnaud Montebourg, alors député de Saône-et-Loire. Le futur ministre de l'Économie (2012-14) offre à Jérôme Durain de prendre sa succession à la tête de la fédération PS du département en 2005, ce qui vaudra à M. Durain l'étiquette de «bébé Montebourg». Il tient la «fédé» pendant dix ans, lui valant une réputation d’apparatchik, et gravit les échelons. Il est fait adjoint à la mairie PS de Chalon-sur-Saône en 2008, jusqu'à ce que la ville soit reprise par la droite en 2014, puis est élu en 2010 à la région, dont il prend en 2012 la vice-présidence à l’aménagement du territoire. En 2015, il est élu à la nouvelle région fusionnée Bourgogne-Franche-Comté, sur la liste de gauche de Marie-Guite Dufay, et prend la présidence du groupe majoritaire. Peu avant, en 2014, il devient le premier sénateur de gauche élu en Saône-et-Loire depuis 1986. Il n’a alors que 45 ans, et un pédigrée loin des barons du Sénat, mais, réélu en 2020, il s’impose comme le «M. Sécurité» du groupe socialiste, lui valant des critiques de ses pairs, notamment quand il apporte son soutien aux très contestées Brigades de répression de l’action violente (BRAV), en 2023, en s’immergeant avec ces policiers lors de la manifestation du 1er Mai à Paris. En 2024, il corédige, avec le sénateur LR Étienne Blanc, la proposition de loi «visant à sortir la France du piège du narcotrafic». La loi, promulguée le 13 juin 2025, est adoptée très largement par le Parlement, offrant à Jérôme Durain une grande visibilité médiatique. Élu «sénateur de l’année 2024", il était pressenti pour succéder à Patrick Kanner à la tête du groupe des sénateurs PS, mais la loi sur le cumul des mandats lui impose de démissionner du Sénat. © Agence France-Presse