
Natixis reprend en main sa gestion d’actifs

Après le scandale H2O et à quelques mois du mariage d’Ostrum avec La Banque Postale AM (LBPAM) dans la gestion obligataire, Natixis recentre ses efforts. La filiale cotée de BPCE a annoncé hier soir une réorganisation de sa filière risques et une baisse de l’enveloppe dédiée aux acquisitions.
Natixis donne la priorité au «développement et au renforcement des expertises actuelles plutôt qu’à des opérations de croissance externe», a dit la banque hier soir, lors de la publication de résultats trimestriels de bonne tenue dans tous ses métiers. «Je constate que les valorisations dans les paiements sont très élevées […]. Nous ne voyons pas bien comment nous pourrions faire une grosse acquisition sans prendre de risques financiers», a expliqué François Riahi, directeur général de Natixis, au cours d’une conférence téléphonique. Dans la gestion d’actifs, première contributrice aux revenus et aux résultats du groupe, «nous sommes focalisés sur le projet LBPAM et le renforcement de nos modèles. Et les niveaux de marchés rendent aussi coûteuses les acquisitions » dans ce métier.
Solvabilité en hausse
La banque de gros de BPCE prévoit une «réduction du budget 2018-2020 consacré à de potentielles acquisitions d’environ 1 milliard d’euros à environ 800 millions d’euros (dont environ 500 millions d’euros déjà investis)». Après sa boulimie de rachats pour constituer un pôle multiboutique de banque d’affaires, faire croître son réseau d’affiliés en gestion d’actifs et percer dans les paiements via des fintech, le groupe marque une pause. Les 200 millions d’euros -ou davantage- qui ne seront pas utilisés permettront de renforcer sa solvabilité. Natixis porte son objectif de ratio de fonds propres durs CET1 de 11% à 11,2% pour fin 2020, tout en maintenant sa politique de dividende inchangée. A fin septembre, son ratio CET1 s’élevait à 11,5%.
Signe de l’importance donnée à la stabilisation de son business model, la banque a annoncé hier l’arrivée en janvier prochain d’un nouveau patron des risques, Olivier Vigneron, qui assurait les mêmes fonctions chez JPMorgan pour la région Europe Moyen-Orient Afrique, et la responsabilité mondiale des risques de marché de la banque américaine. Il remplacera Pierre Debray, nommé conseiller de François Riahi. Olivier Vigneron devra insuffler une nouvelle culture des risques dans une maison ébranlée par les interrogations sur les actifs illiquides de sa boutique de gestion londonienne H2O il y a quelques mois, et des lourdes pertes dans les dérivés actions en Asie fin 2018.
Natixis a aussi nommé un patron des risques pour l’ensemble des activités de gestion et de banque de financement et d’investissement (BFI) aux Etats-Unis, et une nouvelle gouvernance va être mise en place au sein de Natixis Investment Managers (NIM), la holding qui chapeaute les boutiques de gestion du groupe. NIM et chacun de ses 20 affiliés (Ostrum, Harris Associates, Loomis Sayles, etc.) devra dissocier les fonctions risques et conformité. Les nominations et recrutements s’étaleront sur plusieurs mois. «Nous avons eu des échanges avec les affiliés pour renforcer un modèle qui fonctionne très bien depuis plus de 20 ans. Nous renforçons l’intégration de la gestion et les processus des risques au sein de Natixis et entre les affiliés et NIM», pointe François Riahi. «Les nouveaux responsables de risques dépendront hiérarchiquement du directeur de chaque affilié mais leur nomination, leur évaluation et leur rémunération dépendra de la direction des risques», précise à L’Agefi une source proche du dossier. Natixis a par ailleurs annoncé le mois dernier l’arrivée prochaine de Joseph Pinto, ex-Axa IM, comme chief operating officer de NIM.
1.000 milliards d’encours en vue
Son principal affilié, le français Ostrum (ex-Natixis AM), va aussi accueillir la semaine prochaine un nouveau directeur général, Philippe Setbon, l’ancien patron de Groupama AM, comme l’avait révélé NewsManagers (groupe Agefi). Il remplace Matthieu Duncan, à quelques mois de la fusion de la gestion assurantielle d’Ostrum avec celle de LBPAM, qui a aussi changé de patron. Philippe Setbon, «neutre» vis-à-vis des deux fiancés, devra mettre en place «un management représentatif des talents des deux maisons», explique la source proche de Natixis. «Le projet n’est pas finalisé mais Natixis devrait contrôler entre 50 et 60% du nouvel ensemble et LBPAM le reste», poursuit l’informateur. L’ensemble pèsera environ 400 milliards d’encours, dont 220 milliards provenant d’Ostrum, et permettra à Natixis de passer la barre des 1.000 milliards d’encours sous gestion. A fin septembre, le groupe a atteint 921 milliards d’euros d’actifs, une masse en progression de 14% depuis le début de l’année.
Le projet définitif de rapprochement entre Ostrum et LBPAM sera présenté «fin 2019 ou début 2020», indique François Riahi. Défensif, il doit permettre aux deux acteurs d’atteindre la «taille critique» en mutualisant les coûts de leurs gestions obligataires tournées vers l’assurance vie, peu rentables compte tenu des taux bas dans la zone euro. Le futur ensemble se veut aussi offensif, avec pour objectif de «développer les encours sous gestion en étant un consolidateur du secteur». «La [nouvelle] baisse des taux cet été renforce la pertience de ce projet, estime le directeur général de Natixis. D’autres acteurs plus petits vont être amenés à faire des choix différents, à confier leurs actifs de grandes plates-formes.»
Si elle pèse sur la gestion de portefeuille, la politique monétaire de la Banque centrale européenne aurait un impact limité sur le groupe Natixis. Sur les neuf premiers mois de l’année, les revenus liés à la marge d’intérêt représentent 8% des revenus totaux, contre 33% en 2013 et encore 18% en 2018. «A ma connaissance nous sommes la banque européenne qui affiche le plus bas taux de marge d’intérêt», déclare François Riahi. Natixis s’est peu à peu détachée des activités d’intermédiation en renforçant le poids des métiers «asset-light», peu coûteux en fonds propres, comme la gestion d’actifs, l’assurance, les paiements, le conseil financier et la désintermédiation des financements structurés de sa BFI. Un mouvement accéléré en début d’année par la reprise de ses financements spécialisés (crédits à la consommation…) par BPCE. Les activités non-bancaires, c’est-à-dire hors BFI, pèsent plus de 60% de ses revenus.
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