Anne d’Anselme : «Nous avons revu et rationalisé notre gamme de fonds début 2023»

Le groupe de gestion de fortune et d’actifs Cogefi se lance dans les activités de family office tandis que la gamme de fonds de Cogefi Gestion fait peau neuve. Entretien avec Philippe de Saint-Martin, président directeur général de Cogefi, Anne d’Anselme, présidente directrice générale de Cogefi Gestion et Charles Bartoli, directeur commercial de Cogefi Gestion.,
Adrien Paredes-Vanheule
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L’Agefi: Comment se positionne le groupe Cogefi aujourd’hui ?

Philippe de Saint-Martin : Notre expertise de gestion pour compte de tiers est répartie sur deux pôles : gestion de fortune et gestion d’actifs. Sur le segment de la gestion de fortune, nous gérons des portefeuilles de clients privés. Cette gestion sous mandat s’est imposée au fil du temps comme de la gestion patrimoniale. Nous avons développé au fur-et-à mesure les services attenants. Nous avons des équipes de banquiers privés à Paris et à Marseille.

Notre activité de gestion d’actifs, spécialisée sur les actions européennes, la gestion diversifiée et le crédit, a été initialement conçu pour servir nos clients privés. Dans notre positionnement de conseil 360°, nous apportons aussi, pour nos clients en gestion de fortune, des solutions d’investissement externes couvrant les autres classes d’actifs.

Pour compléter et renforcer notre activité de gestion de fortune, nous mettons en place un pôle de family-office. Cela s’inscrit dans une stratégie de « premiumisation » de nos clients privés, de leur accompagnement sur le long-terme. Nous fournissions déjà des services de family-office pour plusieurs familles de clients et souhaitons développer ces services en leur proposant un conseil et un accompagnement exclusif, en s’appuyant sur nos expertises internes d’une part et en sélectionnant d’autres compétences externes d’autre part. Le family office Cogefi sera composé d’une équipe de trois personnes, dont deux déjà présentes en interne et une qui va nous rejoindre.

Le groupe compte deux structures, Cogefi, entreprise d’investissement, teneur de compte et dépositaire et Cogefi Gestion, notre société de gestion de portefeuille. Nous comptons une douzaine de collaborateurs par société avec un renouvellement générationnel important.

La période est à la consolidation chez les family-offices, comment allez-vous vous démarquer ?

Philippe de Saint-Martin: La place regorge d’acteurs effectivement. Nous observons que les family-offices, qui ne font que ce seul métier, s’appuient sur un modèle économique complexe. Ils se positionnent comme « indépendants » bien qu’un certain nombre touchent des rétrocessions, et essayent de vivre uniquement avec une rémunération par honoraires. Or, nous nous apercevons que les clients ont du mal avec l’idée de régler des factures qui peuvent être conséquentes uniquement pour le conseil. Nous allons proposer deux options pour le positionnement de notre family-office : soit le paiement en honoraires, soit en nous confiant une partie de la gestion de leurs actifs supervisés.

Sur les fonds ouverts de Cogefi Gestion, comment votre gamme actions a-t-elle évolué ?

Anne d’Anselme : La gamme a été revue et rationalisée début 2023. Nous l’avons adaptée à la stratégie qu’il est nécessaire de poursuivre dans l’environnement actuel. Les taux vont rester plus hauts pour un moment et notre gestion était très orientée croissance jusqu’alors. Avec des taux plus élevés, il fallait être en mesure de proposer aussi une gestion value. Ainsi, nous avons modifié le fonds Cogefi Europe en Cogefi Valeur, en renforçant justement la value européenne. Le P/E a été réduit sur ce fonds tout en gardant une forte dimension qualité sur les entreprises sélectionnées. Nous allons également fusionner les fonds Prospective et Chrysalide. En outre, nous avons conservé le fonds Elixir ISR, investi en actions européennes de grande capitalisation et de qualité labellisé ISR.

Vous vous êtes renforcés sur le secteur de la consommation ces derniers mois. Pourquoi ?

Anne d’Anselme : Nous avons toujours surpondéré le secteur de la consommation dans nos fonds. Nous n’ignorons pas les discussions autour des niveaux de valorisations des acteurs du secteur du luxe. Nous demeurons convaincus que ces valorisations ne sont pas aberrantes. Un titre comme LVMH se paie 25 fois les résultats, ce qui n’est pas choquant au vu de la croissance du groupe. La dynamique reste forte. Nous continuons de nous renforcer sur la consommation car ce secteur porte la conjoncture économique actuelle.

Quelles sont les évolutions de votre gamme de fonds crédit ?

Anne d’Anselme : Nous venons de lancer un fonds obligataire daté à septembre 2026, Cogefi Bonds 2026, avec un rendement brut de plus de 6% pour profiter de la hausse des taux. De plus, nous avons toujours deux autres fonds obligataires, un sur le high yield court-terme et l’autre sur les obligations de qualité investment grade ainsi qu’un fonds partenaire obligataire flexible.

Beaucoup de gérants ont récemment lancé leur fonds daté, quel positionnement pour le vôtre ?

Anne d’Anselme : L’ensemble des obligations incluses en portefeuille sont à échéance 2026, ce qui permet d’avoir une forte visibilité sur le rendement du fonds. Le fonds sera investi à 75% en dette high yield et le reste en investment grade. Nous n’avons pas d’autre exposition, pas de convertibles ni d’obligations perpétuelles ou hybrides. Nous ne faisons pas non plus de dette émergente.

Charles Bartoli : En étant adossé à Cogefi, nous bénéficions d’un « seed money » naturel nous permettant d’atteindre un niveau d’encours suffisant dès le lancement pour déployer la gestion du fonds dans de bonnes conditions avec l’ensemble des lignes obligataires prévues au sein du portefeuille (55). Ainsi, nous pouvons nous permettre une période de commercialisation très courte. Elle vient de débuter et s’achèvera dès la fin septembre 2023.

Quelle a été votre approche vis-à-vis de SFDR chez Cogefi Gestion?

Anne d’Anselme : Nous avons quatre fonds classés article 8 SFDR. Nous sommes dans la continuité de ce que nous avons mis en place lors de l’obtention du label ISR du fonds Elixir ISR. Nos données extra-financières sont sourcées via Moody’s ESG et nous disposons d’un outil en interne qui utilise les notations de Moody’s pour les intégrer dans notre processus de gestion. Nos fonds étaient déjà bien positionnés en amont par rapport à leurs indices sur les aspects ESG.

Charles Bartoli : Sur le plan de la distribution, SFDR complique un peu les choses. Par exemple, un grand nombre d’assureurs-vie demandent à présent des fonds article 8 minimum dans le cadre de nouveaux référencements. Ce qui peut amener certaines maisons de gestion à dévier de leur stratégie pour répondre à de nouvelles exigences qui ne leurs sont pas naturelles. Ça n’est heureusement pas le cas chez Cogefi Gestion en raison de notre approche qualité qui préexiste à l’essor des fonds labellisés.

Pour quelle politique optez-vous ? Exclusions ? Dialogue ?

Anne d’Anselme : Les deux. Nous avons des exclusions sectorielles et mis en œuvre le dialogue actionnarial avec les émetteurs dans le cadre du label ISR. Nous suivons aussi de près les controverses en raison de leur impact sur la valorisation des titres dans une optique de qualité.

Vous votez sur les résolutions d’actionnaires portant sur le climat?

Anne d’Anselme : Nous exerçons toujours nos droits de vote, mais nous n’avons participé à aucune résolution d’actionnaires. Prenons l’exemple de Total. La société investit déjà beaucoup dans le renouvelable quand on regarde la répartition de ses Capex. De manière générale, les compagnies pétrolières sont des acteurs extrêmement puissants en matière d’investissements dans les renouvelables. Je comprends que certains investisseurs veuillent aller plus loin sur cette voie, mais pour y aller, il est nécessaire d’avoir une bonne trajectoire de génération de cash pour assurer ces investissements. C’est une approche pragmatique que nous avons partagée avec des experts de l’ESG, qui l’ont validée.

Le fait que la Commission européenne ne donne pas de définition de ce qu’est un investissement durable, cela vous aide-t-il ou non ?

Anne d’Anselme : Pour l’instant, personne n’est en mesure de proposer une définition claire et uniformisée. Tout le monde tâtonne. Les approches de chacun aboutiront probablement à une approche globale.

Philippe de Saint-Martin : Il y a un manque d’harmonisation prégnant sur ces sujets de gestion extra-financière. Notre approche ESG pragmatique n’est-elle pas finalement plus vertueuse qu’une norme ? Nous attendons un cadre stable. Nous sommes encore dans une phase mouvante de réglementation verte.

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