
Une discrimination à revoir entre résidents et expatriés en matière de plus-value immobilière

Cette discrimination à l’encontre des personnes quittant la France résulte de la loi de Finances pour 2014, qui a souhaité, et ce n’est pas le moins surprenant, améliorer leur situation fiscale au regard des plus-values immobilières.
Rappelons le contexte : l’imposition des profits immobiliers des non-résidents a toujours été un sujet complexe, source de difficulté pour le Fisc.
L’objectif, bien compréhensible, est d’imposer en France les revenus des plus-values issues des biens immobiliers qui y sont situés, quand bien même le bénéficiaire de ces revenus est lui-même non résident fiscal français.
Cependant, de nombreux obstacles existent liés, tant aux conventions fiscales qu’au droit communautaire. Ainsi, le taux d’imposition des plus-values applicable aux non-résidents hors UE, de 33,1/3 %, à comparer au taux applicable aux résidents, de 19 %, a été censuré par les Tribunaux pour les résidents suisses.
De même, depuis 2011 la France applique aux non-résidents les prélèvements sociaux (CSG et assimilés de 15,5 %) au titre de leurs revenus et plus-values immobiliers, or s’agissant d’un prélèvement de nature sociale, cette imposition a fait l’objet d’une procédure d’infraction ouverte par la Commission Européenne l’année dernière.
Le nouveau texte, inclus dans le Collectif Budgétaire pour 2014, est fondé sur l’idée qu’il était nécessaire d’améliorer la situation des non-résidents, qui lors de leur départ de France ne vendaient pas immédiatement leur résidence principale mais commençaient par la louer, pour ensuite la céder dans un second temps.
En effet, dans un tel cas, il ne pouvait être considéré qu’ils cédaient leur résidence principale, puisque le bien avait été loué, la plus-value était donc imposable. Pour éviter cette situation et permettre cette cession en deux temps liée à la particularité d’une expatriation, la loi prévoit désormais que la plus-value liée à l’ancienne résidence d’un non-résident est exonérée, si elle intervient dans les 5 ans de son départ, quand bien même le bien a été loué sur cette période. Cependant, pour financer cet avantage, l’exonération applicable aux non-résidents est désormais plafonnée à un montant de 150 000 Euros, quelle que soit la situation du bien.
Le résultat est le suivant : si nous prenons la situation d’un cadre parisien, qui aurait acquis un appartement pour loger sa famille en 2000 pour 400.000 euros et le revend en 2014 pour un million d’euros, le traitement de la plus-value réalisée dépendra du point de savoir s’il déménage à Lyon ou à Rio.
Dans le premier cas, il sera tout simplement exonéré, dans le second l’exonération de la plus-value sera limitée à 150.000 euros et l’impôt dû sera d’environ 72.000 euros.
Cette situation qui n'était vraisemblablement pas recherchée par le Législateur, découle cependant du texte.
Elle est contestable à bien des égards :
- d’une part en termes d'équité, elle aboutit à imposer de façon différente deux personnes dans des situations semblables, selon leur lieu de destination,
-ensuite d’un point de vue juridique elle est contraire, tout d’abord au principe de liberté d'établissement au sein de l’UE puisque le cadre expatrié à Milan se verra imposer alors que celui muté à Marseille ne le sera pas. Ensuite, hors de l’UE, cette règle est contraire à la libre circulation des capitaux, puisqu’elle conduit à une imposition largement supérieure dans l’hypothèse où un français expatrié voudrait rapatrier dans son nouveau lieu de résidence la valeur de son bien immobilier situé en France, il devra acquitter un impôt qui ne serait pas dû par un résident français.
Une solution serait bien évidemment de vendre sa résidence principale avant de quitter la France, mais cette option n’est généralement pas possible pour un salarié qui s’expatrie à la demande de son employeur et doit généralement occuper son nouveau poste rapidement.
Il n’y a plus qu'à espérer que le Gouvernement reviendra rapidement sur ce dispositif pour en modifier les règles et permettre l’exonération, sans limitation de montant, de la plus-value réalisée sur la résidence principale par des personnes quittant la France dans des conditions similaires aux résidents fiscaux français (cession dans l’année qui suit le déménagement).
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