
Les négociations sont ouvertes quant au contrôle des IOBSP

Les banques doivent-elles contrôler les intermédiaires en opérations de banque (IOBSP) ? C’est tout l’objet des discussions menées actuellement entre l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP) et les associations bancaires et d’IOBSP. L’enjeu est de taille et les intérêts divergents.
Soumettre directement au contrôle des établissements financiers les quelques 20.000IOBSP –répartis globalement à parts égales entre courtiers, mandataires exclusifs, non exclusifs et mandataires d’IOBSP - permettrait à l’ACP d'être assurée d’un premier niveau de supervision d’une population qu’elle doit réguler. Néanmoins, les banques ne l’entendent pas ainsi et semblent, à la lecture du projet de position, avoir su faire valoir leur bon droit. L’ACP rendra sa position définitive d’ici à la fin du mois d’octobre prochain.
L’externalisation fondée sur le recours au mandat.
C’est au titre du règlement 97-02, qui enjoint aux banques de se doter de dispositifs de contrôle permanent et périodique de leurs activités externalisées, que l’ACP articule son raisonnement. Selon elle, le recours à des mandataires exclusifs, à des mandataires non exclusifs ainsi qu’à des mandataires de second niveau relève de l’externalisation d’une opération essentielle ou importante, induisant pour la banque, au titre des articles 37-1 et 37-2 du règlement, qu’elle mette en place des procédures de contrôle particulièrement lourdes, et notamment un contrôle sur place.
Contrôle de non-conformité chez les courtiers.
En revanche, les opérations réalisées par les courtiers qui, en vertu de l’article R. 519-4 du Code monétaire et financier (CMF), agissent pour le compte d’un client – à l’exclusion de tout mandat d’un établissement de crédit, ne constitueraient pas des opérations externalisées. Il en va de même pour les mandataires des courtiers. Tout repose donc sur la notion de mandat.
L’autorité de contrôle note qu’en tout état de cause, «les banques doivent s’assurer que leur dispositif de contrôle interne prend en compte les risques induits par ce canal de distribution et s’assurer notamment que ce dispositif intègre les opérations conclues avec un client présenté par un courtier notamment en matière de risque de non-conformité et de risque de crédit».
L’ACP tient ainsi une position diamétralement opposée à celle défendue jusqu'à présent. En effet, elle avait une conception large d’une prestation externalisée visant à inclure tous les opérations des IOBSP: «C’est une erreur de croire qu’une banque, en recourant à des courtiers, ne tombe pas sous le coup d’une prestation externalisée essentielle au titre du règlement 97-02. Dès lors qu’il existe une véritable activité d’intermédiation, ce que nous vérifierons au cas par cas, la banque doit contrôler cette relation.»(1)Les travaux se poursuivent et les banques souhaiteraient aller plus loin dans cette approche en limitant le contrôle des opérations externalisées à celles réalisées par les mandataires exclusifs. Elles affirment que cette activité n’est ni importante ni essentielle et ne présente aucun risque pour l’établissement dans la mesure où cette dernière ne délègue pas l’acceptation du crédit.
Feuille de route de contrôle des banques...
L’ACP précise que le dispositif de contrôle doit permettre aux banques de s’assurer que les intermédiaires se conforment aux procédures définies par l'établissement pour la commercialisation de ses produits, sont immatriculés à l’Orias (ou respectent les conditions d’exemption) et se mettent en accord avec les dispositions du contrat d’intermédiation.
Elle leur donne l’esquisse d’une feuille de route: «Le volume des réclamations de la clientèle concernant un mandataire, la performance des crédits dont le mandataire a été à l’origine et la qualité de la constitution des dossiers peuvent être, par exemple, des points de contrôle adéquats.»
… et de l’ACP.
Parmi les points de contrôle, l’ACP sera attentive à la conformité au regard de la nature de l’intermédiation, en particulier par rapport à la définition légale des différentes catégories d’intermédiaires –un intermédiaire ne pouvant exercer son activité selon des modalités contraires à sa catégorie d’immatriculation. Elle veillera au respect de l’interdiction du cumul des catégories pour le crédit à la consommation, le regroupement de crédits, le crédit immobilier, le crédit viager hypothécaire et les services de paiement, et au respect de l’interdiction d’une chaîne de plus de deux mandataires consécutifs.
Si la plupart des associations d’intermédiaires en opérations de banque se rangent derrière la position des banques, de son côté, l’Association française des intermédiaires bancaires (Afib) milite pour que tous les intermédiaires, quelle qu’en soit la catégorie, soient contrôlés par les établissements de crédit. Son président, Jean-Bernard Valade, se justifie: «En ne soumettant pas les courtiers au contrôle des banques, ces dernières risquent d’imposer aux professionnels du regroupement de crédit la catégorie de courtier comme elles l’ont fait dans le secteur du crédit immobilier. Par ailleurs, il n’est pas exclu que Bercy vienne préciser dans un second temps que les courtiers, dans la mesure où ils ne sont pas mandatés par la banque, sont assujettis à la TVA.»
Assujettissement à la TVA?
Contrairement aux prestations afférentes aux opérations d’assurance effectuées par les intermédiaires en assurances explicitement exonérées de TVA en vertu de l’article 261 C 2° du Code général des impôts (CGI), il faut s’en remettre à la jurisprudence pour savoir si les prestations fournies par les IOBSP le sont également.Or, Jean-Bernard Valade rappelle que «la jurisprudence fiscale est fondée à ce jour sur des contrôles concernant des IOBSP mandatés par une banque».
Les courtiers peuvent-ils dès lors craindre d’être soumis à la TVA ? Selon Corinne Reinbold, avocate chez CMS Francis Lefebvre, «en matière de TVA, on s’attache à la nature de l’opération réalisée et non à la qualité ou au statut juridique de la personne qui l’accomplit. Les vérificateurs s’en remettent souvent aux contrats liant l’intermédiaire et les banques pour qualifier la nature des opérations réalisées et, a fortiori, les soumettre ou non à la TVA».
Elle souligne le risque de déroute des contrôleurs: «Les vérificateurs étant habitués à ce que les contrats stipulent que l’IOBSP est mandaté par la banque risquent d’être désorientés à la lecture des nouvelles moutures. Il sera important pour le courtier d’arriver à démontrer la mise en relation effective de l’emprunteur avec la banque et son rôle jusqu’à la signature du crédit pour éviter la taxation.»
Impératifs réglementaires.
Or, les exigences réglementaires des IOBSP ne sont pas forcément compatibles avec les critères déterminant le régime fiscal. Le CGI dispose que l’octroi et la négociation de crédit sont exonérés de TVA.
La notion de négociation a été précisée par un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 13 décembre 2001 (2): l’activité qui consiste à démarcher des emprunteurs potentiels, à apprécier leur solvabilité, à préparer des dossiers de crédit pour les transmettre à des établissements de crédit s’analyse en une opération de négociation de crédit dès lors qu’il y a bien une mise en relation de l’organisme prêteur et de l’emprunteur.Ainsi, «la mise en relation et la négociation sont essentielles car si l’intermédiaire ne fait que donner les coordonnées d’un emprunteur potentiel à une banque, le fisc pourra estimer qu’il s’agit d’une activité d’indicateur d’affaires soumise de plein droit à la TVA», remarque Corinne Reinbold. Elle ajoute qu’«en pratique,il peut être difficile de concilier l’exigence de mettre en avant dans les contrats l’activité d’entremise, à travers notamment la recherche de clients potentiels pour les besoins de l’exonération de TVA, avec l’interdiction de démarchage faite aux IOBSP. Les contraintes réglementaires limitent en effet la liberté contractuelle des parties».
A noter que le fait que la commission perçue par l’intermédiaire soit corrélée à l’opération de crédit constitue au moins un des indices permettant de retenir la qualification d’opération d’entremise.
(1) L’Agefi Actifsdu15 février 2013, p. 2.
(2) CJCE, Aff.235/00, CSC Financial Services Ltd.
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