
Les dossiers du médiateur - juillet 2023

Par Arnaud Chneiweiss, médiateur de l’assurance
Etude de cas 1
L’OPTION FISCALE EN CAS DE RACHAT NE PEUT ÊTRE EXERCÉE APRÈS LE RÈGLEMENT
Lors d’un rachat, l’assuré peut opter, concernant les versements effectués jusqu’au 26 septembre 2017, pour le prélèvement forfaitaire libératoire (PFL). Il n’appartient pas à l’assureur, après la réalisation de l’opération, d’accéder à une demande de modification du mode d’imposition retenu.
A l’occasion du rachat total de son contrat d’assurance sur la vie, un assuré sollicite, postérieurement à la réalisation de l’opération par l’entreprise d’assurance, la modification du mode d’imposition choisi. L’assuré souhaite revenir sur l’application du barème de l’impôt sur le revenu au profit du PFL. L’assureur refuse de faire droit à sa demande en lui indiquant que l’option pour le PFL ne peut être exercée a posteriori.
Conformément à l’article 125-0, A, II du Code général des impôts, le souscripteur a la possibilité d’opter, concernant les primes versées jusqu’au 26 septembre 2017, pour un PFL de l’impôt sur le revenu à l’occasion du rachat de son contrat.
Bien qu’une telle option n’obéisse à aucune condition formelle, il est nécessaire que l’assuré en ait formulé la demande de manière claire et explicite auprès de l’assureur. A défaut, c’est le régime de droit commun qui s’applique, à savoir l’intégration des produits du contrat dans le revenu global soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu. En application de l’article susvisé, l’option choisie est « irrévocable » et doit être « exercée au plus tard lors de l’encaissement des revenus ».
Préalablement à sa demande de rachat, l’assuré s’était vu rappeler par le biais d’une note explicative la fiscalité applicable aux produits réalisés sur son contrat en cas de rachat. Il lui avait également été précisé la possibilité de choisir entre le barème de l’impôt sur le revenu et le PFL, avec une présentation des modalités d’application de chacun de ces régimes. L’assuré avait alors fait part de sa décision lors de sa demande adressée à l’entreprise d’assurance.
Compte tenu du choix formulé en faveur du barème de l’impôt sur le revenu, celui-ci devait s’appliquer. L’assuré ne pouvait solliciter l’application du PFL après avoir reçu le règlement des sommes issues du rachat. L’assureur a dès lors fait une exacte application des dispositions légales en refusant de modifier a posteriori le régime fiscal retenu.
En tout état de cause, l’assureur n’est que collecteur d’impôt pour le compte de l’administration fiscale. Il ne peut donc lui-même procéder à une telle modification.■
La recommandation du médiateur
Les assurés sont invités à lire attentivement les documents évoquant la fiscalité applicable à l’occasion des rachats et à solliciter si besoin tout conseil nécessaire.
Le cas échéant, il leur appartient d’opter pour le PFL avant le paiement des sommes dues afin que ce prélèvement puisse être opéré par l’assureur pour le compte de l’administration fiscale.
Etude de cas 2
LA SAISIE FISCALE DU CONTRAT D’ASSURANCE-VIE ENTRAÎNE SON RACHAT FORCÉ
La saisie administrative à tiers détenteur permet au comptable public d’obtenir le paiement d’une somme dont le redevable ne s’est pas s’acquitté. Lorsqu’elle porte sur un contrat d’assurance-vie rachetable, cette procédure dérogatoire se matérialise par un rachat auquel le souscripteur ne peut s’opposer.
En mars 2019, un assureur s’est vu notifier par l’administration fiscale une saisie administrative à tiers détenteur portant sur le contrat d’assurance-vie de l’un de ses assurés. En exécution de cette saisie, l’assureur a procédé quelques jours plus tard au rachat total du contrat d’assurance-vie.
L’assuré a contesté l’opération, soulignant n’avoir jamais fait de demande de retrait et reprochant à l’assureur de ne pas avoir « protégé » son contrat. Il a alors sollicité le remboursement de la somme versée à l’administration fiscale. L’entreprise d’assurance a refusé de faire droit à cette demande en indiquant à l’assuré qu’un contrat d’assurance-vie peut faire l’objet d’une saisie de la part du comptable public.
L’article L.262 du Livre des procédures fiscales prévoit : « Les créances dont les comptables publics sont chargés du recouvrement peuvent faire l’objet d’une saisie administrative à tiers détenteur notifiée aux dépositaires, détenteurs ou débiteurs de sommes appartenant ou devant revenir aux redevables. »
Le tiers saisi est contraint de procéder au versement des sommes dues dans les trente jours à compter de la réception de la saisie, sous peine de s’exposer à une majoration des sommes saisies à hauteur du taux d’intérêt légal. Ainsi, la saisie administrative à tiers détenteur produit un effet attributif immédiat au profit du créancier saisissant l’administration fiscale à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée.
Une saisie administrative à tiers détenteur peut porter sur un contrat d’assurance-vie rachetable et provoque alors son rachat forcé, celui-ci pouvant être partiel ou total.
L’assureur était donc contraint de procéder à l’opération de rachat et ne pouvait « protéger » le contrat d’assurance-vie en cause. Il s’est ainsi conformé à ses obligations en versant les sommes dues à l’administration fiscale en exécution de la saisie administrative à tiers détenteur.
Le rachat forcé produisant les mêmes effets qu’un rachat sollicité par le souscripteur, ce dernier a pu choisir les modalités d’imposition des plus-values, en l’occurrence le barème de l’impôt sur le revenu ou le prélèvement forfaitaire libératoire. ■
La recommandation du médiateur
Si le souscripteur ne souhaite pas qu’un rachat forcé soit réalisé sur son contrat d’assurance-vie, il peut encore régulariser sa situation en versant la somme dont il est redevable à l’administration fiscale, afin que celle-ci donne mainlevée de la saisie. La saisie administrative à tiers détenteur ne produit pas ses effets lorsque le contrat d’assurance-vie fait l’objet d’un nantissement en cours ou lorsque le bénéfice du contrat a été accepté par le(s) bénéficiaire(s) désigné(s).
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