
L’apport de Johnny Hallyday à la gestion de patrimoine

, Jacques Amar, maître de conférences en droit privé, Université Paris-Dauphine et associé fondateur de www.legal-tools.fr,et Amélie de Bryas, directrice adjointe, Institut de gestion , du patrimoine et de banque privée, Université Paris-Dauphine ,
Johnny Halliday, cela a été longuement évoqué, est devenu en l’espace d’un demi-siècle une icône de la culture populaire. A l’heure des bilans, peut-être faut-il également envisager son apport à la gestion de patrimoine.
Johnny face aux maisons de disque… Tout commence bien évidemment avec Jean-Philippe Smet. A 16 ans, le jeune Johnny signe un contrat sans l’autorisation de sa mère avec la maison de production Vogue. Johnny est mineur – n’aurait-il pas été lésé? L’affaire ira en cassation et aboutira à un arrêt de principe sur la rescision pour lésion: «Quelle que soit la nature du contrat, la question de savoir si le mineur est ou non lésé, est une question de fait soumise à l’appréciation souveraine des juges du fond dont la décision sur ce pointéchappe au contrôle de la Cour de cassation» (Cass. 1e civ, 4 oct. 1966, n°449). Et toute sa vie, Johnny aura défendu ses intérêts patrimoniaux contre les maisons de disques, contre la presse people. Il est même à l’origine de la consécration du droit patrimonial sur l’image (CA Versailles, 12e ch., 2e sect., 22 sept. 2005, SAS Calendriers Jean Lavigne c/ Sté Universal Music).
… et au fisc. Une chose est sûre: Johnny n’a pas uniquement cherché à défendre ses droits; il a surtout tout au long de sa carrière cherché à protéger son patrimoine du fisc de manière ni toujours très élégante, ni toujours très efficace. Johnny s’installe en Suisse en 2007 afin de bénéficier du fameux forfait suisse. Pas de chance, les photos postées sur Twitter ou Instagram révèlent qu’il passe très peu de temps dans son chalet, au mépris des règles du droit suisse. On retiendra alors deux principes de base du droit fiscal: une personne peut être domiciliée fiscalement en France même si elle n’y vit pas à partir du moment où s’y trouve le centre de ses intérêts économiques; l’administration fiscale est en droit de prouver la situation fiscale d’un contribuable par tout moyen. Aujourd’hui, nous parlerions de domiciliation fictive susceptible d’être réprimée sur le fondement de la fraude fiscale. Mais dès 1975, comme le rappelle Les Echos, le chanteur avait été condamné à de la prison avec sursis. Il n’a donc pas connu les portes du pénitencier.
Et cela ne s’est pas arrangé en vieillissant. Nous retrouvons Johnny en 2017 dans un montage à base de holding située au Luxembourg et des fonds qui transitent via le Liberia avec un rappel cinglant du juge: la volonté systématique d’éluder l’impôt à partir de sociétés fictives constitue un abus de droit et non un procédé d’optimisation fiscale.
Même disparu, Johnny continuera à alimenter les finances publiques. Aujourd’hui, Johnny est mort. Le requiem pour quelqu’un que la fiscalité avait un peu rendu fou a été joué. Mais, compte tenu de l’importance de son patrimoine immobilier et des droits d’auteur que vont générer ses chansons, les problématiques patrimoniales restent plus que jamais présentes. Nous rappellerons donc que même si ses ayants-droit quittent réellement la France, d’une part les droits d’auteur pour l’exploitation d’œuvres à l’étranger, de même que ceux en France perçus par une personne non domiciliée sur le territoire, sont susceptibles d’être soumis au prélèvement de l’article 182 B du Code général des impôts; d’autre part, les biens immobiliers situés en France restent dans l’assiette du futur impôt sur la fortune immobilière. Bref, même mort, Johnny continuera à alimenter le budget de l’Etat par-delà, finalement, ses dernières volontés.
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