Une décote à l’achat non négligeable pour qui sait attendre

A l’inverse d’un bureau qui n’a de valeur que parce qu’il dispose d’un locataire, un logement se voit appliquer une décote dès lors qu’il est occupé - Un moyen pour les particuliers d’acquérir un bien à prix réduit à condition d'être bien informés sur la date à laquelle ils pourront en disposer.
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Dans un certain nombre de cas, voulus mais le plus souvent subis, institutionnels -dans le cadre d’un arbitrage ou d’une dissolution d’une SCPI de logements par exemple- ou particuliers sont amenés à mettre en vente des appartements occupés, n’étant pas toujours en mesure de congédier immédiatement leurs locataires. Pour les investisseurs, l’achat d’un tel bien peut se révéler intéressant, mais non dénué de contraintes.

L’attrait de la décote.

L’intérêt, pour un particulier, d’acquérir un logement occupé est bien évidemment la décote qu’il présente. La législation concernant la vente de logements, et plus particulièrement la vente par lots conférant aux locataires un certain nombre de droits tels que la possibilité de préempter le bien, de proroger ou de renouveler leur bail, les propriétaires se trouvent dans l’obligation de composer avec leurs occupants. Le prix de vente s’en trouve affecté, le bien faisant l’objet d’une décote pouvant varier entre 5% et 25%, parfois un peu plus, par rapport à sa valeur libre en fonction du type de bail (loi du 1erseptembre 1948, loi du 6 juillet 1989) et de sa durée restant à courir, ainsi que du type de locataire (protégé ou non).

Les professionnels parlent d’une décote par rapport à une valeur libre comprise entre 8 et 12% en moyenne, entre 15% et 20% si l’appartement est occupé par un locataire âgé de plus de 70 ans, et de 25% si le bail relève de la loi de 48 - dans ces deux derniers cas, les locataires ont la possibilité de rester dans les lieux jusqu’à ce qu’ils décèdent ou décident de quitter leur appartement.

Des contraintes lors de la vente.

Les obligations légales des institutionnels lors d’une vente par lots étant multiples et complexes (lire l’encadré) - ils s’exposent à la nullité de congés pour vente ou à la nullité de l’offre de vente -, les organismes chargés de commercialiser les logements jouent également le rôle de conseil. Ils interviennent «à toutes les étapes de la vente, de l’information des droits des locataires à la valorisation de chacun des lots», déclare Grégory Moreaux, directeur commercial vente par lot d’Ad Valorem. Pour chaque immeuble, «une projection pluriannuelle des ventes est définie par les professionnels selon un scénario en fonction du nombre de logements vacants (ou qui se libèreront naturellement), du nombre de locataires susceptibles d’acquérir leur logement et du nombre de logements qui seront vendus occupés», explique Renaud Capelle, directeur des ventes résidentiel vente par lots de CBRE Global Private Solutions. Chaque bien occupé présente donc trois valeurs: un prix libre, un prix d’achat investisseur et un prix d’achat locataire (inférieur au prix investisseur), déterminé en fonction du statut d’occupation du logement, de l'échéance théorique du bail et de l’ancienneté.

La loi est plus clémente du côté des particuliers. Pour les personnes physiques qui projettent de vendre un appartement libre de toute occupation, la réglementation est assez simple: ils doivent donner congé six mois avant l’expiration du bail (qui dure trois ans) à leur locataire qui, simultanément, bénéficie d’un droit de préemption. A défaut de l’exercer, il sera déchu de tout titre d’occupation (sauf exceptions). En revanche, si les propriétaires décident de vendre leur bien occupé, rien ne les oblige à proposer au locataire d’acheter son logement.

Ces particuliers vendeurs peuvent être des propriétaires souhaitant se défaire d’un bien reçu par succession ou d’un bien acquis par le biais d’un dispositif fiscal arrivé à terme mais pas encore libéré.

Des acquéreurs multiples.

D’après Christophe Gilbert, fondateur du site vente-appartement-occupe.com, les acquéreurs de biens occupés sont des primo-accédants qui achètent un logement qu’ils occuperont à titre de résidence principale lorsque le bail arrivera à échéance. Ce sont également des expatriés qui investissent dans un bien déjà loué en attendant de le récupérer à leur retour ou des investisseurs qui souhaitent se constituer un patrimoine immobilier à coût réduit.

Ce peut également être un véhicule géré à l’image de la SCPI Pierre 48 de Paref Gestionqui investit, entre autres, dans des logements soumis à la loi de 1948 ou à la loi de 1989 avec des locataires protégés, à l’image des quatre lots occupés par des locataires âgés en moyenne de 72 ans acquis récemment pour 2,7 millions d’euros (contre une valeur libre de 4,2 millions d’euros soit une décote de 35,7%).

Une pratique sur la sellette.

Vivement critiquée par la ministre du Logement et de l’Egalité des territoires Cécile Duflot, la vente par lots (connue également sous le nom de vente à la découpe) a constitué ces deux dernières décennies une technique d’arbitrage des patrimoines immobiliers largement utilisée par les institutionnels (compagnies d’assurances, fonds immobiliers, foncières).

Concernée par le sort de certains locataires invités à quitter un logement qu’ils ne pouvaient pas acquérir, Cécile Duflot a de nouveau soulevé l’idée «d’encadrer, par modification législative, la possibilité de mise en copropriété et de congé-vente par le bailleur»,en rappel à la proposition de loi déposée le 22 mars dernier par les écologistes. Un coup dur pour les propriétaires, la protection du locataire étant déjà largement réglementée. L’actualité ne leur étant pas très favorable, les institutionnels ont donc décidé de se faire discrets sur le sujet. L’activité reste suspendue aux décisions à venir.

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