
Les professionnels de l’immobilier font bloc

A l’image du secteur, elles sont sur les nerfs. Plusieurs organisations professionnelles de l’immobilier (1) se sont fendues d’une lettre commune au ministère de l’économie et des finances lundi 14 décembre. A grand renfort de chiffres, elles dénoncent l’impact des recommandations du Haut conseil de stabilité financière (HCSF) sur le secteur et plaident pour leur assouplissement afin de faciliter la reprise. Le HCSF doit se réunir ce jeudi 17 décembre pour faire le bilan des consignes qu’il a donné aux banques depuis fin 2019. Les professionnels de l’immobilier veulent faire entendre leurs voix et font des propositions concrètes.
Le secteur mis à mal par les confinements
Les professionnels s’insurgent contre les recommandations du HCSF qui compliquent la reprise du marché qui sort à peine d’une année noire. Selon le Syndicat national des promoteurs immobiliers (SNPI), les transactions de vente ont chuté de de plus de 33 % au printemps 2020 par rapport au printemps 2019, et de 5,5 % sur juillet-août-septembre 2020. Le logement neuf s’écroule particulièrement, en raison de l’arrêt net de plusieurs mois dans la construction et d’une durée d’endettement plafonnée à 25 ans «qui ne tient pas compte du différé de remboursement accordé auparavant aux acheteurs de logements neufs», peut-on lire dans le courrier.
La frustration est d’autant plus grande que les acheteurs et investisseurs pouvaient encore compter sur des taux compétitifs. Mais sous le double effet du HCSF et de la conjoncture défavorable, les banques ont dû revoir leurs critères d’éligibilité au financement, notamment sur les niveaux d’apport personnel et d’épargne résiduelle.
Conséquence: le taux de refus explose. Alors qu’il n’était que de 5,5 % en 2019, il a grimpé à 7 % au 1er trimestre, 10,2 % au second, 13,5 % au 3ème trimestre, et devrait atteindre 17 % des dossiers envoyés aux banques au 4e trimestre 2020 d’après le courtier en ligne Vousfinancer.com.
Les principales victimes sont les primo-accédants (environ 37 %) mais aussi les investisseurs locatifs (26 %). Ces derniers voient la durée moyenne d’amortissement accordée par les banques se réduire comme peau de chagrin: elle est passée de 23,2 ans en 2019 à 20,9 ans cette année, pour les adhérents de l’Association française des investisseurs locatifs (AFIL). «La raison principale se situe dans la prise en compte des différés d’amortissement dans la limite globale autorisée des 25 ans : soit 27 mois d’amortissement en moins en moyenne», expliquent les associations.
Les associations font aussi des recommandations
Le courrier ne se veut pas qu’une longue liste de plaintes. Les professionnels entendent avoir voix au chapitre et émettent à leur tour des recommandations, allant dans le sens d’un assouplissement de celles du HCSF. Ils demandent notamment d’augmenter la marge de dérogation des banques aux consignes du Haut conseil de 15 à 30 % de leur production. Objectif: les «laisser apprécier le risque et accorder au cas par cas davantage de crédits à des primo-accédants au potentiel évolutif et aux investisseurs dont la situation financière et professionnelle le permettrait au travers un reste-à-vivre suffisant», explique les associations.
Ils plaident également pour plus de souplesse sur la durée des prêts dans les opérations de PTZ et dans le neuf, surtout pour les primo-accédants et les revenus modestes.
, Enfin, les professionnels réclament plus de souplesse pour les investisseurs et demandentà:
- Autoriser un calcul différentiel pour le calcul d’un taux d’effort investisseur maximal à 33%
- Définir un seuil de reste-à-vivre pour lequel il est possible de déroger au taux d’effort de 33% pour un investisseur. «Les multi-propriétaires peuvent générer plusieurs revenus locatifs, et même s’ils peuvent dépasser 33% d’endettement (plusieurs prêts en cours), leur reste à vivre peut-être conséquent et tout à fait satisfaisant»
- Intégrer un taux d’effort différencié entre un profil locataire et un profil propriétaire souhaitant investir. «Paradoxalement, il est plus facile de respecter 33% d’effort pour un profil investisseur assumant un loyer sur sa résidence principale qui est une charge habituellement moins forte qu’un remboursement de crédit en résidence principale à logement équivalant», soulignent les organisations professionnelles.
(1) :L’Association Française de l’Immobilier Locatif (AFIL), l’Association Professionnelle des Intermédiaires en Crédits (APIC), la Fédération Française des Constructeurs (FFC), la Fédération Nationale de l’Immobilier (FNAIM) et leSyndicat National des Professionnels de l’Immobilier (SNPI)
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Vaccins: la réunion du Comité consultatif américain soulève des craintes majeures chez les scientifiques
Washington - Des experts récemment nommés par le ministre de la Santé de Donald Trump et pour beaucoup décriés vont réexaminer jeudi les recommandations vaccinales faites aux Américains, suscitant une vive inquiétude chez nombre de scientifiques. «Les enjeux sont considérables», alerte auprès de l’AFP Syra Madad, épidémiologiste, en amont de cette réunion qui s'étalera sur deux jours et portera sur deux vaccins infantiles ainsi que sur les vaccins contre le Covid-19. Comme elle, de nombreux experts craignent que cet examen n’aboutisse à des restrictions d’accès, alors même que les taux du vaccination du pays évoluent à la baisse depuis la pandémie et font craindre le retour de maladies contagieuses mortelles, comme la rougeole. Habituellement routiniers, ces rendez-vous du Comité consultatif sur les pratiques de vaccination (ACIP) qui se tiennent à Atlanta, dans le sud-est des Etats-Unis, ont pris une importance nouvelle ces derniers mois dans un contexte hautement politisé. Après avoir limogé en juin l’ensemble des experts de ce groupe, le ministre de la Santé américain Robert Kennedy Jr (RFK Jr), contesté pour ses positions antivaccins, y a nommé des figures de son choix, pour la plupart décriées. Ces derniers ont pour responsabilité de conseiller les CDC, principale agence sanitaire du pays, sur les recommandations en matière de vaccination. «Conclusions préétablies» Or, selon l’ex-directrice de cette agence, qui a également été limogée avec fracas en août, les recommandations à venir seraient basées sur des «conclusions préétablies». Interrogée mercredi par une commission sénatoriale sur les raisons de son éviction, Susan Monarez a expliqué que le ministre de la Santé lui avait demandé de s’engager à soutenir une modification du calendrier vaccinal. «Il n’avait aucune donnée ni aucune preuve scientifique à l’appui» de ce projet, a-t-elle assuré aux parlementaires en insistant sur le rôle crucial joué par les vaccins dans les politiques de santé publique. «Nous nous sommes battus tellement dur pour vaincre la polio, la rougeole, la diphtérie et beaucoup d’autres maladies. Revenir sur ces progrès serait non seulement irresponsable, mais trahirait toutes les familles qui nous font confiance pour protéger leur santé», a-t-elle aussi lancé. Questionné plus tôt sur le sujet, RFK Jr avait lui réfuté toute pression. Ces changements brutaux, qui se sont ajoutés à des coupes budgétaires et des suppressions de postes importantes, ont provoqué une crise importante dans les agences sanitaires fédérales. - «Pas les moyens» - Considérant que la fiabilité de ces dernières était compromise, l’Académie américaine de pédiatrie (AAP) et plusieurs Etats de l’ouest des Etats-Unis ont récemment décidé de publier leurs propres recommandations vaccinales. Des initiatives dont la portée est limitée, car le remboursement des vaccins reste grandement lié aux recommandations émises par les CDC, sur les conseils de ce fameux panel d’experts. Si ces derniers venaient cette semaine à alléger ou à cesser la recommandation des vaccins contre le Covid, l’hépatite B ou encore la rougeole, de nombreux Américains n’y auraient plus accès, s’inquiète ainsi Wilbur Chen, médecin infectiologue. «La réalité, c’est que la plupart des gens n’ont pas les moyens de payer ces vaccins», dont les coûts peuvent s'élever à plusieurs centaines de dollars, explique-t-il. Lors de leur première rencontre fin juin, les experts du comité fraîchement refaçonné avaient déjà suscité des critiques en faisant la promotion de thèses antivax. Des déclarations qui faisaient écho aux positions du ministre de la Santé RFK Jr, qui s’est fait des années durant le relais de fausses informations sur les vaccins, notamment sur un prétendu lien entre le vaccin ROR (rougeole, oreillons et rubéole) et l’autisme. Une spéculation issue d’une étude truquée qui a été maintes fois démentie par des travaux postérieurs. Charlotte CAUSIT © Agence France-Presse