Airbnb vs Paris : la mairie remporte la partie

La Cour de cassation a validé le mécanisme de compensation mis en place par la municipalité.
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Une bataille de cinq ans devant les tribunaux s’achève. La Cour de cassation s’est prononcée (1), le 18 février 2021 sur les litiges qui opposaient la capitale à des bailleurs de résidences secondaires en meublés touristiques, appelés aussi «location Airbnb». En faveur de la mairie. «Victoire totale de la Ville de Paris face à Airbnb et aux fraudeurs qui louaient leur logement illégalement : nos outils de régulation sont reconnus conformes au droit européen !», s’est félicité Ian Brossat, maire adjoint en charge du logement, de l’hébergement d’urgence et la protection des réfugiés.

Pour comprendre les décisions, il faut d’abord revenir aux impératifs posés par la loi. Si la location meublée touristique est libre dans la plupart des communes, le Code de la construction et de l’habitation impose certaines restrictions à Paris et dans les départements de la petite Couronne. Il l’impose égalementdansles 10 communes françaises de plus de 200.000 habitants et celles de plus de 50.000 habitants en zones tendues. Dans ces lieux, elle n’est autorisée que pour larésidence principale, dans la limite de 120 jours par an. Les résidences secondaires n’ont donc pas accès à ce marché, sauf si les propriétaires sollicitent une autorisation de changement d’usage pour transformer le local d’habitation en local commercial. Or, les villes concernées par ces restrictions peuvent choisir de moduler ou de conditionner cette autorisation. A Paris, la mairie y a attaché un principe de compensation équivalente : pour tout changement d’usage, un local commercial de la même taille - voire du double dans certains quartiers - doit être transformé en local d’habitation. A défaut, le propriétaire doit présenter un titre de compensation (également appelé rachat de commercialité) acheté auprès d’un tiers qui garantit lasauvegarde des surfaces destinées à l’habitation.

En 2015, la mairie de Paris démarre des poursuites à l’encontre de certains bailleurs qui s'étaient affranchis de ces règles. Gravissant les instances, l’affaire est portée devant la Cour de cassation qui saisit la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour savoir si la réglementation objet du litige était conforme au droit communautaire.Dans un avis de septembre 2020, celle-ci valide la législation française,justifié par une raison impérieuse d’intérêt général de lutte contre la pénurie de logements. En revanche,ellelaisse le soin aux juridictions nationales de trancher sur la question du mécanisme de compensation en fonction de la situation du marché local. C’est chose faite avec cette série d’arrêts de la Cour de cassation, qui estime le dispositif «justifiépar une raison d’intérêt général, qui satisfaitaux exigences de clarté, de non-ambiguïté, d’objectivité, de publicité, de transparence et d’accessibilité» imposé parl’article 10 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur.Ces critères «tels que mis en œuvre par la Ville de Paris dont le règlement municipal prévoit une obligation de compensation, sont conformes au principe de proportionnalité.»

Ce sont maintenant 420 litiges en suspens concernant des multiloueurs n’ayant pas fait de demande de changement d’usage qui vont reprendre. Avec, certainement, une pluie d’amendes à la clé : les propriétaires s’exposent à des sanctions pouvant aller jusqu'à 50.000 euros par dossier, soit 20 millions d’euros cumulés.

(1)Arrêt n°195, 198 et 199 du 18 février 2021

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