Les Etats-Unis se dirigent à nouveau vers un blocage budgétaire

Les douze lois d’application du budget 2024 doivent être votées avant le 30 septembre au soir.
white house Maison Blanche Washington
Les marchés craignent qu’un blocage de l’administration fédérale n'affecte l’activité un peu plus que prévu par la Maison-Blanche.  - 

Le mot revient au moins une fois par an dans l’actualité, souvent au moment des négociations sur le budget fédéral, qui doit théoriquement être voté par le Congrès des Etats-Unis avant le 1ᵉʳ octobre. Encore cette année, le pays se dirige vers une phase de «shutdown», c’est-à-dire une fermeture provisoire de l’administration faute, pour le gouvernement américain, de pouvoir payer ses fonctionnaires.

Les débats engagés en juillet à la Chambre des représentants laissent assez peu d’espoir qu’un accord budgétaire ou qu’une résolution de prolongement du budget 2023 puisse être adoptée avant la fin de l’exercice en cours. «Il est difficile d’imaginer que les marchés de Bons du Trésor ou d’actions réagissent bien à une période potentiellement prolongée de chaos à Washington, mais pour le moment, c’est le résultat le plus probable», concluait d’ailleurs Ian Shepherdson, chef économiste de Pantheon Macroeconomics dans une note publiée lundi.

De multiples blocages

Les blocages sont multiples. Pour rappel, le premier semestre, animé par l’atteinte du plafond de la dette et le risque d’un défaut américain, s’était conclu par un accord sur la suspension du plafond jusqu’au 1ᵉʳ janvier 2025 (post-élection présidentielle). Mais cet accord était conditionné à une limite des dépenses discrétionnaires hors défense – plafonnées au niveau actuel pour 2024 et à une hausse de 1% pour 2025 - et à une progression modérée des dépenses de défense. «La proposition récente de sénateurs d’utiliser une clause d’urgence pour renforcer le soutien à l’Ukraine constitue un premier point d’achoppement : elle est considérée par le speaker à la Chambre, Kevin McCarthy, comme un contournement de l’accord conclu en juin dernier», souligne Florence Pisani, directrice de la Recherche chez Candriam.

L’aile extrême du parti républicain, dite Freedom Caucus, s’était prononcée contre le projet de loi sur le plafond de la dette le 1ᵉʳ juin. Elle mélange un peu tous les sujets politiques à l’approche des élections de 2024 et se veut encore plus virulente sur ces questions budgétaires. Elle demande à réduire les dépenses discrétionnaires d’au moins 120 milliards de dollars, autour de 1.460 milliards au lieu des 1.600 milliards prévus en juillet (et 1.700 en mars). Or, elle représente environ 40 voix sur 435 (222 républicains) à la Chambre des représentants, peut y bloquer les votes et même, avec les nouvelles règles de fonctionnement fixées en janvier, menacer la position de Kevin McCarthy. «Même s’ils parvenaient à rassembler suffisamment de soutien à la Chambre, leurs mesures n’ont aucune chance d’être adoptées au Sénat (à majorité démocrate, ndlr), où les dirigeants républicains ne souhaitent pas rouvrir le débat et sont opposés au blocage des dépenses et des aides à l’Ukraine», estime Ian Shepherdson.

«Alors que les deux partis avaient fini par trouver un compromis sur le plafond de la dette en juin, il leur faut réussir à voter 12 lois d’application d’ici au 30 septembre : cela semble très difficile dans le climat politique actuel», confirme Florence Pisani. Pour éviter un arrêt du service public, une autre solution passerait par le vote au Congrès d’une «continuing resolution», permettant de poursuivre les dépenses budgétaires à leur niveau actuel pendant un ou quelques mois, le temps de trouver un accord… D’un côté, alors que les élus des deux partis à la Commission des Crédits du Sénat ont soutenu les projets de décrets, certains députés démocrates restent critiques sur leur rédaction et certaines coupes qui ne respecteraient pas l’accord initial. D’autre part, le Freedom Caucus se sentirait moins «coupable» avec un «shutdown» qu’il ne l’aurait été avec un «défaut» des Etats-Unis lié au maintien du plafond de la dette.

Mauvais moment ?

En théorie, le «shutdown» concerne essentiellement des services administratifs moins directement vitaux pour le fonctionnement du pays comme les services fiscaux ou les musées nationaux, pas les personnels médicaux, contrôleurs aériens ou gardiens de prison… Si le rapport sur l’emploi de septembre n’est pas à risques, «on ne sait pas dans quelle mesure les agences qui publient les statistiques pourront toutes continuer à opérer à un moment où l’on a besoin d’avoir une bonne visibilité sur la conjoncture, note Florence Pisani. Par ailleurs, l’effet sur la croissance pourrait être non négligeable : les salaires des fonctionnaires ne seraient plus versés, et les fournisseurs de l’Etat ne seraient plus payés. Si la fermeture se prolonge, l’effet sur la confiance affecterait aussi l’activité.» Goldman Sachs a estimé le coût à 0,2 point de PIB par semaine de «shutdown», qui tomberait en même temps que la fin du Tax Child Credit et que la fin du moratoire sur les remboursements des prêts étudiants.

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