
La hausse du chômage américain incite la Fed à patienter

Le rapport mensuel du Département du Travail américain, le dernier avant la réunion de la Fed le 20 septembre prochain, était très attendu depuis la baisse surprise des statistiques de postes vacants (Jolts) mardi. Vendredi, l’US Bureau of Labor Statistics (BLS) a publié un Job Report encore plein de contradictions : avec des créations d’emplois non agricoles (NFP, payrolls) supérieures aux attentes en août (187.000 au lieu de 170.000 prévues) selon l’enquête auprès des entreprises (CES) ; et en même temps une hausse du taux de chômage inattendue de 3,5% à 3,8%, un plus haut depuis février 2022 selon l’enquête auprès des ménages (CPS).
La progression des créations d’emplois doit encore être nuancée puisque, comme très souvent désormais, les chiffres de juillet ont encore été révisés à la baisse de -30.000 emplois (157.000 créations en juillet au lieu de 187.000). «La révision est de -110.000 sur les deux mois précédents, et de -342.000 au total sur six mois, du jamais-vu hors récession», remarque Bastien Drut, responsable des études et de la stratégie de CPR AM. L’indicateur descend pour le troisième mois consécutif au-dessous du seuil de 200.000, qui marque pour certains un assouplissement progressif du marché du travail. L’emploi poursuit sa hausse dans les soins de santé (+71.000), les loisirs et l’hôtellerie (+40.000), l’assistance sociale (+26.000) et la construction (+22.000), mais diminue encore dans le transport et la logistique (-34.000) et l’information (-15.000).
Mercredi, la société ADP, spécialisée dans la gestion des paies des entreprises américaines, avait publié son estimation avec 177.000 créations d’emplois privés en août (154.000 dans les services), un plus bas de cinq mois, inférieur aux attentes (195.000) suite à une révision à la hausse de 324.000 à 371.000 créations pour juillet… Nela Richardson, l’économiste en chef d’ADP, a parlé d’un retour «au rythme d’avant la pandémie».
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La hausse des salaires se calme
Le marché du travail s’étant assoupli, la croissance du salaire horaire moyen a ralenti plus que prévu, pour la première fois en un an et demi, au rythme mensuel de 0,2% en août, après 0,4% en juillet, et désormais à 4,3% sur un an. «La progression du salaire horaire moyen passe au-dessous de 4% sur trois mois annualisés pour la première fois depuis longtemps. En variation mensuelle, la progression pour les ‘non-cadres’ est la pire depuis janvier 2021, note Bastien Drut. Le bilan global est donc mitigé. Au-delà d’erreurs statistiques qui laissent sceptique par leur récurrence, il n’y a pas encore de destructions d’emplois catastrophiques. Les heures travaillées par semaine remontent même un peu, alors que le recours à l’intérim continue à baisser. Mais le ralentissement du marché du travail recherché par la Fed est désormais clair, et corrobore d’autres statistiques.» Comme la nette baisse des perspectives pour l’emploi dans l’indice ISM des services début août. L'économiste estime désormais que «compte tenu de la difficulté à contrôler ces phases, cela devrait inciter la banque centrale américaine à la patience» avant une éventuelle hausse du taux directeur au-delà de 5,50%. Sur les marchés de futures, une telle probabilité pour la réunion de novembre est passée de 62% lundi à 36% vendredi (CME FedWatch). Pour la prochaine réunion qui doit avoir lieu en septembre, cela fait plusieurs semaines qu’un statu quo est acté par les marchés, sauf énorme surprise.
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Concernant le chômage CPS issu des données des ménages, que les prévisionnistes ne voyaient pas bouger, il correspond à 514.000 déclarations en plus, pour un total de 6,4 millions de chômeurs, avec une hausse de la population active de 736.000 personnes. «Le nombre de personnes en plus se disant employées (222.000) est cohérent avec les créations d’emplois non agricoles, mais les effets statistiques liés à la population active semblent désormais poser des problèmes méthodologiques chaque année en août : la hausse du chômage est peut-être moindre que ce que ne laisse penser l’enquête», poursuit Bastien Drut.
La consommation résiste ?
Jeudi, le département du Commerce avait publié ses données sur la consommation des ménages (PCE) aux Etats-Unis qui s’est accélérée, de 0,8% en juillet après 0,6% en juin (0,6% hors inflation après 0,4%). Avec des dépenses tirées par les biens et les services liés aux loisirs et la bonne santé du marché du travail. Ce rapport du département du commerce américain pour juillet procurait cependant deux «bonnes nouvelles» pour la Fed : une inflation PCE stable à +0,2% en rythme mensuel pour l’indice global comme pour l’indice sous-jacent (3,3% et 4,2% en rythme annuel) ; et un ralentissement de la hausse du revenu disponible moyen (0% en juillet après 0,2% en juin), voire une baisse en dollars constants (-0,2%).
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