
L’Italie fait resurgir le risque politique

Descente aux enfers pour le président du Conseil sortant Mario Monti, divine surprise pour Beppe Grillo, chef de file du mouvement Cinq Etoiles et résurrection pour Silvio Berlusconi. Les élections législatives italiennes ont déjoué certains pronostics, révélant un électorat en proie à la division et au rejet des partis traditionnels. La coalition de centre gauche décroche la Chambre des députés mais pas le Sénat, révélant le pouvoir de nuisance de Silvio Berlusconi. Avec un parlement suspendu, la perspective d’un nouveau vote gagne en consistance.
La chambre basse du Parlement a hérité d’un vainqueur, la loi électorale attribuant 55% des sièges au bloc politique ayant obtenu le plus de voix. La coalition de centre gauche de Pier Luigi Bersani a coiffé sur le poteau le centre droit de Silvio Berlusconi, avec 29,55% des voix, contre 29,18%. Au Sénat, la prime de majorité se fait sur une base régionale et en fonction du poids démographique, un système avantageux pour la droite dans les grandes régions du Nord.
En Lombardie, qualifiée d'«Ohio italien», la coalition de centre droit aurait ainsi remporté 38% des suffrages. Au bout du compte, elle est arrivée en première position au palais Madame. Elle devrait remporter 112 sièges, devant le centre gauche (105 sièges), le Mouvement 5 Etoiles (64 sièges) et les centristes de Mario Monti (20), selon les projections de la chaîne de télévision RAI. Le Sénat compte 315 sièges et un parti ou une coalition politique doit disposer de 158 sièges pour y avoir la majorité.
La question est donc de savoir si des alliances vont pouvoir être nouées afin d'éviter le retour des Italiens aux urnes. Sans le parti de Beppe Grillo, le centre gauche paraît démuni, compte-tenu de la déroute des centristes. Or, le blogueur italien a affirmé hier soir que son mouvement ne participerait pas à des ententes en catimini, évoquant même une «répétition générale». La percée du Mouvement 5 Etoiles est l’une des surprises de ce scrutin. Selon Enrico Letta, bras droit de Pier Luigi Bersani, plus de la moitié des Italiens ont exprimé un vote contre l’austérité, contre l’euro et contre Merkel.
Mario Monti a estimé pour sa part qu’il fallait s’assurer d’un gouvernement pour le pays. Les différents camps ont exclu durant la campagne la possibilité d’une grande coalition entre la gauche et la droite, comme celle conduite par Mario Monti pendant un an jusqu'à son implosion.
«La matérialisation d’un scénario impliquant une majorité différente dans les deux chambres aurait des effets néfastes pour la gouvernabilité», s’inquiétait avant l’issue du scrutin Paola Monperrus-Veroni, économiste au Crédit Agricole. La perspective d’un blocage politique et la portée du discours anti-austérité de Silvio Berlusconi ont semé le trouble chez les investisseurs. L’indice de volatilité VIX du CBOE a flambé de plus de 34%. Egalement perturbés par le dossier budgétaire, les marchés boursiers américains ont clôturé dans le rouge, le Dow Jones cédant 217 points. L’euro perdait de son côté plus de 4% face au yen en soirée à New York.
«Un parlement suspendu serait la garantie d’une paralysie à la fois en termes de programme économique et de réformes structurelles», s’inquiète Annalisa Piazza, analyste chez Newedge. Le verdict des urnes pourrait conduire le président Giorgio Napolitano à installer un gouvernement intérimaire chargé de rédiger une nouvelle loi électorale, prélude à un autre vote.
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Montreuil - «Abandon» d’une nouvelle réforme de l’assurance chômage, d’une «année blanche»... Les organisations syndicales ont lancé vendredi un «ultimatum» au nouveau Premier ministre, lui laissant jusqu'à mercredi pour répondre "à leurs revendications», et menacent d’une nouvelle journée de manifestations s’il ne recule pas sur ces mesures budgétaires. Au lendemain d’une journée de mobilisation qui a réuni de 500.000 à plus d’un million de personnes dans les rues - selon les autorités ou la CGT -, les représentants des huit organisations syndicales (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires) se sont réunies pour arrêter leur stratégie. Pour elles, la journée de jeudi est un «succès», dont l’ampleur «confirme la colère et la détermination» dans le pays. Bien que Sébastien Lecornu a annoncé dès la semaine dernière l’abandon de la suppression de deux jours fériés, pour les centrales syndicales «le compte n’y est toujours pas !». Elles demandent ainsi au Premier ministre «l’abandon de l’ensemble du projet» présenté cet été par son prédécesseur, François Bayrou, dont «le doublement des franchises médicales, l’année blanche (...), la suppression de 3.000 postes de fonctionnaires et la réforme de l’assurance chômage», ainsi que la remise en cause du 1er Mai férié et chômé, dans un texte commun publié vendredi. Réunis pour la première fois depuis 2023 et la mobilisation contre la très controversée réforme des retraites, les syndicats demandent toujours «l’abandon du recul de l'âge légal de départ» à 64 ans. Et lancent un «ultimatum» à Sébastien Lecornu : «Si d’ici au 24 septembre (mercredi), il n’a pas répondu à leurs revendications, les organisations syndicales se retrouveront pour décider très rapidement d’une nouvelle journée de grève et de manifestations», préviennent-elles. Les patrons ne sont pas épargnés : «Les organisations syndicales (...) exigent l’ouverture de négociations salariales dans toutes les branches et les entreprises» et que ces dernières justifient les 211 milliards d’euros d’aides publiques qu’elles ont reçues. «La balle» dans le camp de Lecornu Réforme des retraites adoptée sans vote du Parlement en 2023, échec du conclave après un désaccord profond avec le patronat, cinq réformes de l’assurance chômage en quelque années... la coupe semble pleine du côté des représentants de salariés. «On sait qu’il y a un déficit qu’il faut réduire» mais «ça ne peut pas se faire uniquement sur le dos des travailleurs et des travailleuses», a martelé jeudi soir Marylise Léon, leader de la CFDT, sur RTL. Pour la patronne du premier syndicat de France, «la balle est dans le camp du Premier ministre qui nous a dit qu’il voulait construire des compromis, qu’il était prêt à bouger». «On attend des preuves ! " «Nous sommes en position de force et exigeons des réponses immédiates», abonde la patronne de la CGT, Sophie Binet, qui prévenait dès jeudi soir sur France 5 : «Nous ne rangerons pas les drapeaux tant que nous n’aurons pas eu gain de cause». Interrogé en début de cortège jeudi à Paris, Frédéric Souillot (FO), a lui rappelé que son syndicat a déposé un préavis de grève reconductible cet été. A Albi, jeudi, Nadège, travailleuse sociale, déjà mobilisée la semaine dernière à l’appel du mouvement «Bloquons tout», est prête à poursuivre la «mobilisation, qu’elle espère voir durer». «Quand est-ce que ça va changer ?», interrogeait Christine, accompagnante d'élèves en situation de handicap depuis 13 ans, dans le cortège à Perpignan. «C’est la première fois que je manifeste», confiait-elle, «mais aujourd’hui, je dis STOP, on n’en peut plus». Après la démonstration de force dans les rues, Sébastien Lecornu a fait savoir qu’il recevrait "à nouveau les forces syndicales». Le Premier ministre doit «ouvrir des négociations sérieuses sur la base de leurs revendications», estimait cette semaine François Hollande, interrogé par la presse. Autrement, «si un mouvement social s’installe, il compliquera le débat budgétaire. En revanche si des avancées sont obtenues elles auront à se traduire dans le budget et le PLFSS» (projet de financement de la Sécurité sociale, ndlr). Ambre TOSUNOGLU © Agence France-Presse -
La ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, dépose plainte après des accusations sur la gestion des cotisations sociales de Setforge
Paris - La ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, a porté plainte vendredi «pour dénonciation calomnieuse à l’encontre de l’association AC !! Anti-corruption ", qui l’a récemment accusée d'être intervenue pour faire baisser les cotisations dues par une entreprise, ce que revendique la ministre démissionnaire. C'était un «acte de gestion justifié», selon la ministre du Travail. Selon la plainte de l’association, Mme Panosyan-Bouvet est intervenue pour faire baisser les cotisations dues par l’entreprise Setforge à l’Urssaf, et ce possiblement malgré une décision de justice défavorable à la société, comme l’avait écrit Mediapart début septembre. Cette plainte contre X dénonce plusieurs infractions possibles comme la prise illégale d’intérêts, le détournement de fonds publics ou la concussion, mais aussi l’abus d’autorité, l’abus de biens sociaux ou la présentation inexacte des comptes annuels. «Cette plainte porte sur une décision que j’ai prise en avril dernier à la requête de délégués syndicaux (CFDT, CGT), d’élus locaux (maire et président d’intercommunalité, sénatrice) et d’autorités locales et nationales (préfet, directeur de l’industrie de défense à la Direction générale de l’armement)», rappelle Astrid Panosyan-Bouvet, dans un communiqué transmis à l’AFP. Elle indique avoir agi «en concertation avec Matignon et Bercy, comme il est d’usage dans ce genre de cas, et dans le respect du droit, pour autoriser une modification d’un taux de cotisation sociale d’un des sites de Moselle d’une entreprise industrielle, avec laquelle je n’ai strictement aucun lien». La fragile situation de la société menaçait alors d’entraîner la suppression d’une centaine d’emplois, a fait valoir le ministère. «Cette plainte a été déposée par une association sans agrément, en énumérant des infractions aussi graves qu’hétéroclites», regrette Astrid Panosyan-Bouvet. «Quand la probité est mise en doute avec la volonté manifeste non pas de questionner une décision mais de nuire et cultiver une défiance malsaine, c’est la possibilité même de l’action publique qui est fragilisée», estime la ministre qui accuse «l’association AC !! Anti-corruption d’avoir élaboré et diffusé cette plainte mensongère». Dans une réponse adressée à l’AFP lundi, l’Urssaf avait précisé qu'à la «suite d’un arbitrage rendu par la ministre du Travail, la Carsat d’Alsace-Moselle a régularisé les taux de cotisation ATMP (accidents du travail et maladies professionnelles) applicables à l’établissement de l’entreprise Setforge sur les exercices 2022 à 2025. Suite au recalcul effectué en mai 2025, l’Urssaf a remboursé les cotisations trop perçues». «Préalablement à ce remboursement, l’entreprise n’avait aucune dette vis-à-vis de l’Urssaf et n’avait pas fait l’objet d’un redressement de la part de l’Urssaf», selon cette source. Pour AC !! Anti-corruption, l’intervention de la ministre sur les taux de cotisation «a eu pour conséquence directe de soustraire à la Sécurité sociale des sommes qui lui étaient dues et de faire bénéficier Setforge d’un effacement de dette sociale injustifié». © Agence France-Presse