Un plafonnement plus favorable que le bouclier fiscal

La décision du Conseil constitutionnel portant sur la dernière loi de Finances a renforcé l’attrait de l’assurance vie pour optimiser un plafonnement - Les techniques portant sur la limitation des revenus, l’emprunt ou les avances doivent être mises en œuvre avec précaution sous peine de sanction.
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Pour un expert, le plafonnement tel qu’il résulte de la décision du Conseil constitutionnel de décembre 2012, «c’est encore mieux que le bouclier fiscal». Il est vrai que la méthode visant, pour un contribuable, à limiter ses revenus pour profiter à plein du plafonnement, pratique dont la généralisation a été récemment évoquée par le ministre du Budget lui-même, a de quoi susciter l’intérêt des gestionnaires de patrimoine.

L’exclusion des revenus non réalisés.

Et comment minorer des revenus si ce n’est en recourant au contrat d’assurance vie ? Si la réforme de l’ISF a été validée cet hiver par le Conseil constitutionnel, les Sages ont annulé le principe de l’intégration dans le plafonnement des revenus non réalisés (1). Précisément, ils ont considéré que «toutes les sommes qui ne correspondent pas à des bénéfices ou à des revenus que le contribuable a réalisés ou dont il a disposé au cours d’une année donnée ne doivent pas être prises en compte»(L’Agefi Actifs, n°574, p.5). Par conséquent, l’accroissement de valeur des contrats d’assurance vie, mais aussi des contrats de capitalisation, des OPCVM de capitalisation et le résultat distribuable mais non distribué des sociétés familiales non opérationnelles et soumises à l’impôt sur les sociétés échappent au plafonnement.

Celui-ci gagne en efficacité si l’on s’en tient à l’exemple de redevables disposant d’actifs en euros dans leurs contrats d’assurance vie qui profitent du plafond plus avantageux que celui du bouclier fiscal malgré un taux de 75% plus élevé. Pour mémoire, avec 50.000 euros de revenus pris en compte pour le plafonnement et 60.000 euros placés sur un actif en euros, le plafonnement 2013 est fixé à 37.500 euros (50.000 x 75%), contre 55.000 euros si le plafond de l’ancien bouclier fiscal avait dû être appliqué (L’Agefi Actifs n°588, p.6 et 7).

Intégration des prélèvements sociaux.

Ce nouveau plafonnement est d’autant plus intéressant «qu’au niveau des impôts à retenir dans son application, rien ne nous contraint à exclure les prélèvements sociaux acquittés au fil de l’eau sur les supports en euros des contrats d’assurance vie», avance Anne Quenedey, avocat associée au cabinet Dentons. En suivant ce raisonnement, le dispositif tient compte des prélèvements appliqués à l’accroissement de valeur des supports en euros et il exclut les revenus provenant de ces contrats en euros en ce qu’ils sont réputés non réalisés.

Selon l’avocat, «cette distinction ne devrait pas être remise en cause dans l’immédiat, le Conseil constitutionnel ayant adopté une analyse rassurante en se recentrant sur les revenus effectivement réalisés». Elle écarte par ailleurs l’éventualité d’une remise en cause de ce plafonnement par le législateur dans le cadre de la prochaine loi de Finances: «Nous ne sommes pas persuadés qu’un plafonnement du plafonnement soit adopté prochainement car cela reviendrait à atténuer la portée de la décision du Conseil constitutionnel du 9 août 2012.»

Causer le crédit.

Toute la difficulté pour les experts patrimoniaux consiste à optimiser ce plafonnement. Un banquier explique que «pour réaliser un investissement, un client aura le choix entre un rachat de son contrat, ce qui l’amènera à déplafonner, ou bien il s’endettera auprès d’un établissement qui sera susceptible de lui accorder un crédit négocié à hauteur de 1,5%. Ce prêt à taux variable sera renouvelé tous les ans. Emprunter 2 millions d’euros lui reviendra alors à 30.000 euros. En comparaison, un retrait partiel de 30.000 euros l’exposerait à une diminution de son plafonnement et à une charge fiscale supplémentaire. Il y a donc tout intérêt à limiter au maximum les retraits partiels».

Il n’empêche, cette technique doit être utilisée avec parcimonie: «Il y a lieu de causer le crédit, nous ne prêtons pas à nos clients pour qu’ils financent leur train de vie»,se défend le responsable. D’ailleurs, le traitement fiscal de cette pratique n’est pas clairement défini et la question de savoir si le remboursement de ce crédit peut être assimilé à un passif déductible de l’ISF se pose. Si la dernière loi de Finances a limité la déduction des dettes «aux seules dettes se rapportant à des biens imposables», l’article 885 G quater du Code général des impôts a exclu «les dettes contractées pour l’acquisition ou dans l’intérêt de biens qui ne sont pas pris en compte pour l’assiette de l’ISF dû par l’intéressé ou qui en sont exonérés». Pour certains, cette exclusion ne trouverait pas à s’appliquer dès lors que les sommes prêtées alimentent les comptes courant du client.

Le recours au crédit peut être une solution pour l’épargnant dont le contrat est essentiellement investi sur un fonds euros et qui présente peu de flexibilité. Pour Mai Trinh-Brunswick, associée, responsable de l’ingénierie patrimoniale chez Massena Partners, «il ne sera pas utile de procéder à des rachats pour souscrire un nouveau contrat sous peine de perdre l’antériorité fiscale de son contrat. L’idée consiste alors à nantir son contrat au profit d’un établissement en garantie d’un emprunt bancaire. Plus l’actif en euros occupe une place importante dans le contrat et plus le montant du prêt accordé par la banque sera élevé. Entre autres, l’investisseur aura alors la capacité de financer le compte courant d’une société holding qui a besoin de fonds propres».

Avance et nantissement.

L’éventualité de procéder par des retraits partiels n’est pas exclue pour autant. L’expert préconise «de les réaliser sur de nouveaux contrats où la quote-part d’intérêt est relativement faible». D’autres stratégies doivent être évaluées, comme le système des avances qui permet de ne pas être taxé à l’IR, «mais il ne faut pas abuser», prévient Mai Trinh-Brunswick. Les contrôles du fisc sont en effet basés sur la récurrence de l’opération qu’il faudra justifier par des charges exceptionnelles pour éviter la requalification en abus de droit.

(1) Décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012.

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