
L’impôt sur la fortune pourrait connaître une énième réforme

Menés par Albéric de Montgolfier, les sénateurs ont adopté l’amendement visant à remplacer l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) par un impôt sur la fortune improductive à compter de 2021, conformément aux préconisations formulées dans le cadre du rapport d’évaluation de la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en IFI (article additionnel après l’article 47D).
Si la suppression de l’ISF a déjà permis d’enrayer le flux des expatriations fiscales, qui a été divisé par deux en 2017, la mise en place de l’IFI pourrait se révéler décevante du point de vue de l’investissement, au risque de miner l’acceptabilité sociale de la réforme.
L’assiette de cet impôt, composée des actifs immobiliers non affectés à l’activité professionnelle de leur propriétaire, apparaît incohérente économiquement, selon les termes de l'étude..
Première incohérence selon le Sénat, l’inclusion de la « pierre-papier » et l’investissement locatif dans le périmètre de l’IFI, alors même qu’il s’agit indéniablement de placements productifs qui contribuent à la croissance, tout en répondant aux besoins des ménages et des entreprises. De ce point de vue, il est faux de considérer l’immobilier comme une « rente ».
D’autre part, l’IFI exclut de son assiette des actifs qui ne contribuent manifestement pas au dynamisme de l'économie française, relève le président de la commission des finances du Sénat. En effet, le choix de circonscrire le périmètre du nouvel impôt aux seuls actifs immobiliers conduit à exonérer des éléments du patrimoine tels que les liquidités et les biens de consommation, qui représentaient une part substantielle de l’assiette de l’ISF et peuvent difficilement être qualifiés de « productifs », ajoute le sénateur.
» Paradoxalement, une stratégie indubitablement « anti-économique » consistant à vendre un appartement aujourd’hui loué à titre non professionnel pour laisser le produit de la vente sur son compte courant ou acheter un yatch permet d’échapper à l’IFI», ajoute-t-il. Le « malaise » suscité par l’assiette du nouvel impôt au sein même de la majorité présidentielle avait d’ailleurs conduit les députés à voter dans la précipitation des mesures de hausses d’impôts portant sur certains «biens de luxe» (yachts, bijoux, etc.), dont le rapport d’évaluation de la commission des finances a confirmé le caractère symbolique, avec un rendement de seulement 14millions d’euros, soit un niveau trois fois inférieur à celui escompté.
» Si l’incapacité de ce nouvel impôt à stimuler l’investissement se confirmait, il pourrait avantageusement être remplacé à compter de 2021 par un impôt sur la fortune improductive, afin de renforcer la contribution de la suppression de l’ISF au financement de l’économie. Une telle transformation de l’IFI rejoint d’ailleurs l’intention initialement affichée par le président de la République Emmanuel Macron dans le cadre de la campagne présidentielle «, rappelle Albéric de Montgolfier.
Seraient notamment inclus dans l’assiette de ce nouvel impôt :
- les résidences principales (après abattement de 30 %) et secondaires, ainsi que les logements laissés vacants ;
- les immeubles non bâtis (ex : terrains constructibles), lorsqu’ils ne sont pas affectés à une activité économique ;
- les liquidités et placements financiers assimilés (compte courant, livrets, fonds monétaires, etc.) ;
- les biens meubles corporels (objets précieux, voitures, yachts, avions, meubles meublants, etc.) ;
- les actifs numériques (ex: bitcoins);
- les droits de la propriété littéraire, artistique et industrielle, lorsque le redevable n’en est ni l’auteur, ni l’inventeur.
» Avec cette assiette, les incitations économiques seraient en conformité avec l’objectif d’encourager l’investissement productif», d’après le président de la commission. À titre d’exemple :
- un particulier qui déciderait de mobiliser un terrain constructible pour réaliser un investissement locatif serait exonéré d’impôt au titre du logement mis en location, ce qui n’est pas le cas avec l’IFI;
- un contribuable qui déciderait d’investir dans une PME serait mieux traité fiscalement qu’un redevable qui choisirait de laisser son épargne sur son compte courant, ce qui n’est pas le cas avec l’IFI.
Par rapport à l’IFI actuel, le seuil d’assujettissement serait en outre relevé à 2,57millionsd’euros, afin de ne pas imposer les ménages devenus imposables du fait de la flambée des prix mais qui ne disposent pas de revenus suffisants pour pouvoir être qualifiés de fortunés. En effet, 20 % des redevables de l’IFI ont des revenus inférieurs à 62.000 euros.
» Les enjeux économiques d’une telle réforme sont loin d’être négligeables : à titre d’illustration, les liquidités représentaient 12 % du patrimoine taxable des redevables de l’ISF 2017 déposant une déclaration, soit 75 milliards d’euros susceptibles de « ruisseler » vers les entreprises ", poursuit Albéric de Montgolfier.
Le Sénat a entamé l’examen en première lecture des articles non rattachés du projet de loi de finances pour 2020. Leur examen continue ce lundi, avant le vote sur l’ensemble du texte mardi.
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Immigration clandestine : raid policier dans une usine Hyundai-LG aux Etats-Unis, près de 500 arrestations
Washington - Près de 500 personnes, dont une majorité de Sud-Coréens, ont été arrêtées par la police de l’immigration dans une usine de fabrication de batteries des groupes sud-coréens Hyundai et LG dans l’Etat de Géorgie (sud-est), soupçonnées de travailler illégalement aux Etats-Unis. Le raid, mené jeudi, résulte d’une «enquête pénale liée à des accusations de pratiques d’embauche illégales et à de graves infractions fédérales», a expliqué vendredi Steven Schrank, un agent du service d’enquêtes du ministère américain de l’Intérieur, au cours d’une conférence de presse. Il s’agit de «la plus importante opération des forces de l’ordre sur un même site de toute l’histoire du service des +Homeland Security Investigations+ (+Enquêtes sur la sécurité intérieure+)», a-t-il affirmé, s’exprimant d’Atlanta, dans l’Etat de Géorgie. Les 475 personnes arrêtées dans cette usine, située dans la ville d’Ellabell, se «trouvaient aux Etats-Unis de manière illégale» et «travaillaient illégalement», a affirmé M. Schrank, soulignant que la «majorité» d’entre elles étaient de nationalité sud-coréenne. Sollicité par l’AFP aux Etats-Unis, le constructeur automobile a répondu être «au courant du récent incident» dans cette usine, «surveiller étroitement la situation et s’employer à comprendre les circonstances spécifiques» de cette affaire. «A ce stade, nous comprenons qu’aucune des personnes détenues n'était directement employée par le groupe Hyundai», a-t-il poursuivi, assurant donner «priorité à la sécurité et au bien-être de quiconque travaille sur ce site et au respect de toutes les législations et réglementations». De son côté, LG Energy Solution a affirmé suivre «de près la situation et recueillir toutes les informations pertinentes». «Notre priorité absolue est toujours d’assurer la sécurité et le bien-être de nos employés et de nos partenaires. Nous coopérerons pleinement avec les autorités compétentes», a ajouté cette entreprise. La Corée du Sud, la quatrième économie d’Asie, est un important constructeur automobile et producteur de matériel électronique avec de nombreuses usines aux Etats-Unis. Mission diplomatique Une source proche du dossier avait annoncé quelques heures plus tôt, de Séoul, qu’"environ 300 Sud-Coréens» avaient été arrêtés pendant une opération du Service de l’immigration et des douanes américain (ICE) sur un site commun à Hyundai et LG en Géorgie. De son côté, l’agence de presse sud-coréenne Yonhap avait écrit que l’ICE avait interpellé jusqu'à 450 personnes au total. Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères avait également fait d'état d’une descente de police sur le «site d’une usine de batteries d’une entreprise (sud-coréenne) en Géorgie». «Plusieurs ressortissants coréens ont été placés en détention», avait simplement ajouté Lee Jae-woong, le porte-parole du ministère. «Les activités économiques de nos investisseurs et les droits et intérêts légitimes de nos ressortissants ne doivent pas être injustement lésés dans le cadre de l’application de la loi américaine», avait-il poursuivi. Séoul a envoyé du personnel diplomatique sur place, avec notamment pour mission de créer un groupe de travail afin de faire face à la situation. Les autorités sud-coréennes ont également fait part à l’ambassade des Etats-Unis à Séoul «de (leur) inquiétude et de (leurs) regrets» concernant cette affaire. En juillet, la Corée du Sud s'était engagée à investir 350 milliards de dollars sur le territoire américain à la suite des menaces sur les droits de douane de Donald Trump. Celui-ci a été élu pour un second mandat en novembre 2024, en particulier sur la promesse de mettre en oeuvre le plus important programme d’expulsion d’immigrés de l’histoire de son pays. Depuis, son gouvernement cible avec la plus grande fermeté les quelque onze millions de migrants sans papiers présents aux Etats-Unis. Au prix, selon des ONG, des membres de la société civile et jusqu’aux Nations unies, de fréquentes violations des droits humains. D’Atlanta, le Bureau de l’alcool, du tabac, des armes à feu et des explosifs (ATF) a expliqué sur X avoir participé à l’arrestation d’environ 450 «étrangers en situation irrégulière» au cours d’une opération dans une usine de batteries, une coentreprise entre Hyundai et LG. Selon son site internet, Hyundai a investi 20,5 milliards de dollars depuis son entrée sur le marché américain en 1986 et compte y investir 21 milliards supplémentaires entre 2025 et 2028. L’usine d’Ellabell a été officiellement inaugurée en mars, avec l’objectif de produire jusqu'à 500.000 véhicules électriques et hybrides par an des marques Hyundai, Kia et Genesis. Elle devrait employer 8.500 personnes d’ici à 2031. © Agence France-Presse