
Airbnb, c’est fini ?

Chasse aux annonces illégales, durcissement de la réglementation, multiplication des procès… La guerre qui oppose les mairies aux loueurs meublés touristiques fait rage. Dernièrement, les champions des deux camps – la mairie de Paris d’un côté, Airbnb de l’autre – se sont encore combattus sans merci devant les tribunaux. L’audience s’est soldée par une nouvelle défaite pour la plateforme, condamnée à huit millions d’euros d’amende pour avoir maintenu depuis 2017 des annonces sans numéro d’enregistrement obligatoire. Airbnb a annoncé quelques heures avant le prononcé du verdict rendre obligatoire son affichage pour tous les loueurs parisiens. Pour rappel, c’est un décret d’application de l’article 55 de la loi de 2019 « Engagement dans la vie locale et proximité de l’action publique » qui introduit la possibilité pour les villes de plus de 200.000 habitants, situées en Ile-de-France ou soumises à la taxe sur les logements vacants d’imposer ce droit d’enregistrement. La question est donc réglée pour les loueurs illégaux, et ceux qui voudraient proposer sur la plateforme un local à usage d’habitation doivent se plier à la réglementation (voir encadré). Les locaux à usage commercial, épargnés jusqu’ici, y sont à leur tour soumis. Un récent décret (1) autorise les communes ayant mise en œuvre la procédure d’enregistrement à soumettre à autorisation la location de certains biens. Les locaux commerciaux concernés doivent avoir l’une des sous-destinations suivantes : artisanat et commerce de détail, restauration, commerce de gros et activité de service ou s’effectue l’accueil d’une clientèle, cinéma, hôtel ou autre hébergement touristique. Le texte permet également la possibilité d’une application différenciée en fonction de quartiers ou de zones.
, Les locaux à usage d’habitation Utiliser une résidence secondaire pour faire de la location meublée touristique nécessite un changement d’usage – de local à usage d’habitation à local à usage commercial - à solliciter en mairie. A Paris, c’est un changement de destination, plus définitif, qui doit être sollicité et que la mairie conditionne à un principe de compensation. Le loueur doit en contrepartie transformer une surface équivalente en logement, voire deux fois la surface dans certains arrondissements. ,
Protéger l’environnement urbain
Autorisation et non plus enregistrement, cela signifie que la commune pourra donc refuser la demande du loueur. Pour cela, elle devra justifier de la protection de « l’environnement urbain » ou de la préservation de « l’équilibre entre emploi, habitat, commerces et services » sur les territoires concernés. « Que veut dire environnement urbain, préservation de l’équilibre ? - interroge Ombeline Soulier-Dugénie, associée au cabinet Redlink. Le décret détaille simplement les formalités administratives à suivre. » L’avocate pointe le risque que les autorisations soient refusées pour des motifs arbitraires en raison d’un texte aux contours mal définis. A l’inverse, difficile pour l’investisseur floué de prouver devant les tribunaux que son investissement n’affecte pas l’environnement urbain. « C’est à la mairie de décider si l’équilibre est en péril, même si l’abus de droit sera compliqué à démontrer pour le particulier qui s’estime victime d’une décision abusive », reconnaît Bruno Pavy, notaire à Melun.
A Paris, les locaux disponibles à l’investissement meublé touristique ne sont déjà plus nombreux pour les investisseurs. « Il ne peut s’agir de commerces sur rue, souvent protégés par le Plan local d’urbanisme (PLU), mais de locaux commerciaux qui donnent sur cours, comme d’anciens commerces de gros, de textile », poursuit Ombeline Soulier-Dugénie. Si certaines copropriétés étaient dérangées par les allers et venues des touristes, l’avocate rappelle qu’il s’agissait d’investissement résiduels. Conseil de fin pour les investisseurs : viser une ville non soumise à réglementation, de moins de 200.000 habitants ou francilienne qui n’a pas encore été réglementé. Bientôt la ruée vers les campagnes ?
(1 ) Décret n° 2021-757 du 11 juin 2021 relatif à la location d’un local à usage commercial en tant que meublé de tourisme.
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