
Révolution immobilière : acheter son bien en cryptomonnaies

En collaboration avec maître Axel Sabban, avocat chez Revo Avocats et membre de LawForCode, maître Margaux Mery, notaire de l’étude 1317 Paris
Avec l’avènement du Web3 et la démocratisation croissante des cryptomonnaies, il est désormais possible d’utiliser ce nouveau mode de paiement pour l’achat ou lalocation de biens immobiliers. Uneopération qui présente bien desavantages mais aussi divers écueils, auxquels il faut veiller.
Les dispositions légales
Possibilité du paiement en cryptomonnaie
Le paiement du prix en euros n’étant pas une obligation légale en matière de transaction immobilière, il est dès lors tout à fait possible de procéder à une vente ou àune location d’un bien immobilier en cryptomonnaie – juridiquement analogue à une vente endevise étrangère.
De plus, l’arrêté relatif à l’information des consommateurs par les professionnels intervenant dans une transaction immobilière* ne fait aucunement mention d’un affichage obligatoire, sur les supports publicitaires, de prix en euros. Il est ainsi possible d’afficher sur les supports publicitaires lesprix des biens en cryptomonnaie.
En revanche, les droits demutation, correspondant aux taxes imposées par les collectivités locales et l’Etat lors d’une vente immobilière, lesémoluments du notaire etles honoraires de l’agence immobilière doivent être acquittés en euros. Il est dès lors indispensable de définir lacontre-valeur du bien immobilier en euros avant lasignature de la vente, pour les calculer auplus juste.
Précisons qu’en principe, lenotaire centralise les fonds en son étude et ne remet le prix payé au vendeur qu’après letransfert de propriété du bien immobilier. Si le bien a été payé en cryptomonnaie, lenotaire ne pourra pas recevoir cepaiement, il devra alors le constater via les relevés de compte du vendeur. Il peut alors être judicieux d’annexer directement àl’acte devente lesdits relevés de compte afin de constater et valider la vente subséquemment.
Obligations de lutte contre le blanchiment
Afin de respecter les obligations en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT), les notaires et agents immobiliers devront vérifier l’identité de l’acquéreur et du vendeur. Cette procédure LCB-FT n’est néanmoins pas une spécificité du paiement en cryptomonnaie, les notaires et agents immobiliers étant soumis à cette obligation pour toute transaction.
Fiscalité des achats immobiliers en cryptomonnaie
Les achats immobiliers en cryptomonnaie n’échappent pas à la fiscalité. Pour l’acquéreur, la cession de cryptomonnaies emporte l’application d’une flat tax, à savoir l’imposition des plus-values à un taux de30%. Toutefois, la flat tax ne sera pas applicable lors de l’achat du bien. Il est conseillé d’ajouter au contrat une estimation en euros pour pallier la volatilité descryptomonnaies et permettre decalculer au plus juste la flat tax. Levendeur, quant à lui, devra s’acquitter del’impôt sur la plus-value générée, en prenant en compte la contre-valeur en euros des cryptomonnaies le jour de la signature delavente du bien immobilier.
Le problème de la volatilité des cryptomonnaies
Puisque la volatilité est inhérente auxcryptomonnaies, il incombe nécessairement au vendeur et à l’acquéreur de subir ce risque. Pour le pallier, plusieurs solutions existent.
Les stablecoins
Une conversion en stablecoins peut permettre de prévenir une volatilité excessive et un risque disproportionné pour le vendeur. Le prix peut alors être défini enstablecoins, c’est-à-dire en garanti-fiat, encrypto «collateralisé » ou non «collateralisé». La conversion du prix en stablecoins aura alors pour effet de définir la contre-valeur du bien en euros au jour de l’avant-contrat.
Les entreprises spécialisées
Certaines entreprises protègent les acquéreurs et les vendeurs de la volatilité des cryptomonnaies en permettant un échange immédiat de cryptomonnaies endollars. Pour l’instant majoritairement présents aux Etats-Unis, ces services envisagent d’opérer également en Europe, cequi pourrait permettre à l’immobilier européen de développer plus sereinement les transactions en cryptomonnaies en luttant au mieux contre leur volatilité.
L’insertion de clauses contractuelles
Il peut être judicieux d’insérer dans le contrat une clause stipulant notamment que le vendeur fera son affaire personnelle de l’évolution du cours des unités de valeur et reconnaît le risque de perte de valeur auquel il s’expose. Par ailleurs, les praticiens suggèrent également de spécifier que lecréancier accepte ce type de règlement en cryptomonnaie et reconnaît la libération de son cocontractant par le transfert effectif de cette devise.
Les prêts immobiliers encryptomonnaies
L’acquisition d’un bien en cryptomonnaie permet en théorie aux plus petits détenteurs de cryptomonnaies de financer leur acquisition immobilière grâce aux prêts. Dans ce type de prêt, les finances personnelles et traditionnelles n’intéressent pas le prêteur, seules comptent les cryptomonnaies disponibles car elles joueront le rôle de collateral, c’est-à-dire de garantie. Mais ilfaut veiller à vérifier les conditions générales des sociétés prêteuses certaines prévoyant que les cryptomonnaies « collateralisées » deviennent leur propriété. Le loan-to-value –le montant d’un prêt en cryptomonnaie – oscille généralement entre 20% et 80% del’épargne du futur acquéreur. Ces prêts en crypto sont alors également fort intéressants pour compléter un apport financier qui aura été fait en euros par exemple.
L’avantage du prêt en cryptomonnaie réside dans la totale indépendance del’acheteur vis-à-vis d’une banque traditionnelle, qui pourrait lui refuser un prêt au motif d’une insuffisance de revenus mensuels ou de l’instabilité de son emploi, afortiori dans un contexte de tension bancaire substantiel. L’organisme prêteur encryptomonnaie ne se soucie que duvolume de cryptomonnaies et ne refusera probablement pas, en principe, d’octroyer unprêt à un acquéreur.
Le développement des loyers en cryptomonnaies
L’acquisition d’un bien immobilier n’est pas laseule opération existante pour ceux qui souhaitent faire partie de l’écosystème de l’immobilier au moyen de leur patrimoine encryptomonnaie. En effet, il est également possible de payer son loyer directement parce biais. Le loyer, même s’il est payé en cryptomonnaie, est toujours taxé au barème progressif en qualité de revenu foncier oudebénéfice industriel et commercial, enfonction de la nature de la location envisagée. La conversion de ce loyer en euros est pour sa part susceptible de générer uneplus-value si les cryptomonnaies ont été perçues par un particulier. Pour éviter cetécueil, le bailleur peut adopter une méthodologie deségrégation du patrimoine.
Et il est fondamental de veiller à ce que lavolatilité (encore elle!) de la cryptomonnaie n’entraîne pas un dépassement du plafond du loyer le cas échéant.
*Arrêté du 10janvier 2017.
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, A retenir - Aucune disposition légale ne s’oppose à l’achat, la vente ou la location d’un bien immobilier en cryptomonnaie. - Certaines dépenses comme les frais de notaire, les frais d’agence immobilière et les droits de mutation doivent être effectuées en euros. - Les notaires et les agents immobiliers sont soumis à l’obligation légale de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. - Des entreprises et des blockchains se spécialisent pour lutter contre la volatilité des cryptomonnaies. - L’acheteur peut souscrire un prêt crypto dont le LTV — montant qui lui sera prêté— peut représenter jusqu’à 80 % de son épargne initiale. - Il est désormais possible de régler son loyer en cryptomonnaie directement via les agences immobilières mettant en place cette possibilité ou via des plateformes spécialisées. ,
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Après la chute de Bayrou, des rassemblements improvisés dans plusieurs villes de France
Paris - Des manifestants fêtent lundi soir dans différents endroits de France la chute du gouvernement de François Bayrou devant des mairies, à l’appel du mouvement «Bloquons tout» le 10 septembre. A Nantes, quelque 300 personnes, selon la préfecture, se sont rassemblées en début de soirée, en musique et sous des pancartes marquées «Bye bye Bayrou» et «le 10/09 on bloque tout», quelques confettis survolant le regroupement. «On en profite pour échanger sur les différentes actions prévues le 10 septembre, les informations circulent», rapporte Inès Guaaybess, 30 ans, qui prévoit de se mobiliser mercredi. A Rennes, quelques centaines de personnes, pour beaucoup des étudiants, se sont réunis place de la mairie autour d’une table avec quelques bouteilles et du pain, sur fond de musique et de confettis. Les manifestants se sont ensuite rendus place Sainte-Anne au centre ville, haut lieu de la vie étudiante rennaise. «On est au bout du système» avec «une alternance droite gauche qui ne remet pas en cause le côté capitaliste libéral. Il va falloir bifurquer», assure Jérémie, ingénieur de 37 ans, venu en vélo avec son enfant. A Paris, des rassemblements étaient organisés devant plusieurs mairies d’arrondissement. Dans le 20e, au moins 200 personnes se sont réunies place Gambetta dans une ambiance bon enfant. «C’est une grande victoire ce soir! Le prochain gouvernement devrait penser aux pauvres et aux retraités. Tout est cher, tout augmente. Macron, je voudrais qu’il s’en aille, pourtant j’ai voté deux fois pour lui pour faire barrage» à l’extrême droite, explique Amina Elrhardour, 60 ans. Selon Marius, 25 ans, «il y a vraiment de la démocratie locale qui s’organise» en vue du 10 septembre, tandis que Xavier Keller, 25 ans lui aussi, dit que «le Nouveau Front populaire doit gouverner. On est capable de faire accepter un budget de gauche, je n’ai aucun doute là-dessus». A Bordeaux, plus d’une centaine de personnes, dont de très nombreux jeunes, ont applaudi et crié de joie à l’annonce de la chute du gouvernement Bayrou, au son d’une fanfare. «Il faut qu’on soit visible, on est nombreux à en avoir ras le bol et n’avoir plus confiance en Macron», lance Mathilde, trentenaire ceinturée d’une banane Confédération paysanne. Un rassemblement a également été organisé en fin d’après-midi à Pau, ville dont M. Bayrou est le maire. Le chef de l’Etat a dit vouloir nommer un nouveau Premier ministre «dans les tout prochains jours». © Agence France-Presse -
Palais Bourbon : la chute de François Bayrou laisse planer l’ombre d’une nouvelle dissolution
Paris - Journée crépusculaire au palais Bourbon: totalement dénuée de suspense, la chute de François Bayrou a plongé les députés dans la circonspection, attisant lassitude et amertume chez les uns, soulagement chez les autres. Avec en toile de fond, l’ombre tenace d’une nouvelle dissolution. Cette issue, à laquelle pousse Marine Le Pen, a été écartée au moins à court terme par l’Elysée, qui a annoncé lundi soir la nomination rapide d’un nouveau Premier ministre. 194 votes pour, 364 votes contre. En début de soirée, le couperet est tombé, implacable. La donne était jouée d’avance pour François Bayrou, qui devient le premier à perdre un vote de confiance sollicité au Parlement sous la Ve République, après neuf mois en poste. Dans l’hémicycle, un silence se fait au moment de l’annonce du résultat, mais il est de courte durée, rompu par les applaudissements de députés La France insoumise (LFI), debout. François Bayrou reste impassible, et après une accolade à deux de ses ministres, quitte les lieux. Mais malgré le moment historique, le palais Bourbon n’a guère semblé traversé par la solennité: ni les journalistes venus de nombreux pays, ni les invectives des chefs de groupe parlementaire dans l’hémicycle n’ont effacé l’ambiance de fin de règne... Une atmosphère bien éloignée des frissons qui avaient parcouru l’Assemblée nationale lors de la censure du gouvernement Barnier, le 4 décembre 2024. Ainsi le discours de François Bayrou, d’ordinaire enclin à s'épancher, n’aura duré qu’une quarantaine de minutes, sans susciter plus d’agitation que d’ordinaire dans l’hémicycle, sous l’oeil attentif de Jean-Luc Mélenchon et Marine Tondelier, assis dans la tribune des visiteurs. L’ambiance a même parfois pris des airs de drôle de rentrée scolaire, avec des députés ravis de se retrouver après plus d’un mois et demi de suspension des travaux parlementaires. - «Gâchis» - Les mêmes sourires ont accompagné à la mi-journée l’arrivée des Insoumis au palais Bourbon. Pour LFI, c’est «le soulagement» qui prédomine, s’enthousiasme la députée Aurélie Trouvé, non sans appeler au «départ du président de la République». «Cette journée est un crépuscule qui n’en finit pas», se désespère l'écologiste Sabrina Sebaihi, qui souligne elle aussi le «soulagement de repartir d’une page blanche» après «une agonie très longue». Des mines satisfaites se lisent également sur les visages des élus du Rassemblement national (RN): «Nous n’avons qu’une envie, c’est retourner aux urnes», glisse la députée Laure Lavalette. Les troupes de la coalition gouvernementale, elles, oscillent entre rancoeur et lassitude. «Je ne peux pas imaginer qu’il ait pensé que le coup de bluff pouvait passer», s’agace un député Les Républicains (LR). «Il se protège mais il nous met tous dans une espèce de nasse.» Le député Renaissance Jean-René Cazeneuve glisse lui aussi que François Bayrou aurait dû «commencer par la négociation». Et fait part d’"une sensation profonde de tristesse, de gâchis, face aux postures des oppositions». Avec une inquiétude majeure, l’hypothèse d’une nouvelle dissolution de l’Assemblée si le blocage institutionnel persiste. «Quand bien même personne ne le souhaite, on ne peut pas ignorer que cette option existe», affirme une source du groupe Renaissance. «Nous sommes dans une impasse dont personne ne pense que nous soyons la solution», se désole un député du même groupe. «A quoi on sert ?» Dans les couloirs, la valse des candidats à Matignon reprend de plus belle: Catherine Vautrin ? Sébastien Lecornu ? Bernard Cazeneuve ? Olivier Faure ? A moins qu’un profil technique n'émerge, ou qu’un médiateur ne soit nommé pour aboutir à un accord de gouvernement ? Rumeurs pour Matignon, rumeurs de dissolution... L’impuissance en guette certains. «On a l’impression de faire et défaire. Faire et défaire c’est toujours travailler, mais espérons qu’on finisse par faire quelque chose quand même», s’alarme le socialiste Philippe Brun. «On participe un peu aussi à ce manège malgré nous, mais nous sommes obligés de censurer François Bayrou.» «Beaucoup de jeunes députés se posent la question: A quoi on sert ? ", admet son collègue centriste Charles De Courson. «Il faut avoir le cuir épais et savoir gérer le temps», philosophe le plus ancien des députés. Antoine MAIGNAN © Agence France-Presse -
Réseaux sociaux : l’usage excessif chez les jeunes pourrait coûter à la France 2,3 points de PIB d’ici 2060
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