
Assurance vie et pouvoirs élargis du HCSF: explications d’un vote
Lors des échanges en commission, les députés sont revenus sur l’article visant à élargir et à renforcer les pouvoirs du Haut conseil de stabilité financière. L’extrait de la discussion est à lire ci-dessous:
Article21bis
(Art. L.612-33, L.631-2-1 et L.631-2-2 du Code monétaire et financier)
Elargissement et renforcement des pouvoirs du Haut conseil de stabilité financière
Introduit en commission à l’Assemblée nationale à l’initiative du rapporteur, le présent article comprend plusieurs mesures distinctes visant à renforcer les pouvoirs du Haut conseil de stabilité financière (HCSF):
– Il renforce les pouvoirs macroprudentiels du HCSF dans le domaine de l’activité de crédit pour tenir compte de l’évolution économique du secteur en matière d’octroi de crédit: le HCSF pourra désormais prendre, sous certaines conditions, des mesures macroprudentielles sur les conditions d’octroi de crédits non seulement pour les entités soumises au contrôle de l’ACPR (droit actuel) mais également pour celle soumises au contrôle de l’Autorité des marchés financiers(AMF) (alinéa5).
–Il étend les pouvoirs macroprudentiels du HCSF vers le secteur des organismes d’assurance en lui permettant, d’une part, de moduler les règles de constitution et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices pour le secteur de l’assurance (alinéa7) et, d’autre part, de prendre, afin de préserver la stabilité du système financier ou de prévenir des risques représentant une menace grave et caractérisée pour la situation financière de l’ensemble ou d’une partie significative du secteur, des mesures conservatoires temporaires sur le modèle de celles de l’ACPR (alinéas8 à13).
–Il tire les conséquences de l’introduction de ces nouveaux pouvoirs en prévoyant qu’ils fassent l’objet d’une publication, à l’instar des autres pouvoirs macroprudentiels contraignants du HCSF(alinéa14).
– Enfin, il complète les pouvoirs d’audition et de transmission d’informations couvertes par le secret professionnel au HCSF (alinéa15).
Le Sénat a effectué plusieurs modifications au texte adopté par l’Assemblée nationale. En Commission des finances, le rapporteur alimité à trois mois au lieu de six mois la période pendant laquelle le HCSF pourra prendre des mesures conservatoires pour un ensemble ou un sous-ensemble d’organismes d’assurance. Il a également précisé que ces mesures ne pourront être prises qu’afin de prévenir une menace grave (proposition initiale) mais également caractérisée (proposition du Sénat) pour la situation financière, tout en imposant qu’elles fassent l’objet d’un avis motivé qui sera rendu public. En séance, un amendement de M.Philippe Mouiller est venu limiter le dispositif de surveillance macroprudentiel tel qu’envisagé aux seules activités dont l’exécution dépend de la durée de la vie humaine.
Le Rapporteur partage la position du Sénat concernant la dimension caractérisée de la menace pour la situation financière, la nécessité de réduire à trois mois la durée maximale renouvelable durant laquelle les mesures conservatoires sont prises ainsi que la nécessité de publier les décisions.Il propose toutefois de supprimer la limitation du dispositif de surveillance macroprudentiel aux seules activités dont l’exécution dépend de la durée de la vie humaine. Il propose également quelques adaptations de nature rédactionnelle concernant les conditions d’entrée en vigueur des mesures conservatoires, les conditions de publicité de la décision et l’ouverture aux personnes concernées de la possibilité d’effectuer un recours en annulation de la décision devant le Conseil d’Etat.
*
* *
La commission est saisie de l’amendement CF3 du rapporteur pour avis.
M.le rapporteur pour avis.Le Sénat a limité le dispositif de surveillance macroprudentiel aux seules activités dont l’exécution dépend de la durée de la vie humaine – autrement dit aux assurances vie. Je considère, comme le rapporteur du Sénat, que cette disposition sans doute superfétatoire réduit la portée du dispositif. Je vous propose donc de la supprimer.
M.Éric Woerth.Ce dispositif mérite d’être retravaillé. Je n’en conteste pas l’objectif – éviter les crises systémiques –, mais il faut également rassurer les épargnants.
Il faut sans doute distinguer les situations et permettre dans certaines d’entre elles aux personnes de disposer de leur épargne. En dépit de la qualification du caractère exceptionnel de la situation dans lequel il doit s’inscrire, le dispositif actuel s’apparente à un cheval de Troie et pourrait rendre l’épargne indisponible. Il me semble très important d’examiner les cas susceptibles d’être traités différemment – les accidents de la vie, par exemple, qui rendent l’utilisation de l’épargne nécessaire.
MmeKarine Berger.Soyons transparents, ce dispositif répond à une demande de l’Association française d’épargne et de retraite (Afer), collecteur d’assurance vie. Le problème qu’il pose ne tient pas aux personnes qui détiennent les contrats mais au type de contrats. Il ne s’agit pas de savoir comment protéger certaines personnes, mais de s’assurer que cet article s’appliquera aux seuls contrats de nature véritablement systémique. Nous savons de quels contrats nous parlons – en l’occurrence de ceux d’Aviva.
M.le rapporteur pour avis.Il est sans doute nécessaire de travailler avant la séance publique afin d’apporter des réponses à ceux qui nous ont sollicités.
Dans le droit fil des garde-fous que le Sénat a souhaité ajouter, je propose, dans le prochain amendement, de réaffirmer que le dispositif ne peut être enclenché qu’en cas de menace grave et caractérisée pour la situation financière des organismes d’assurance mais aussi pour la stabilité du système financier. Avec la rédaction actuelle, il est possible d’invoquer la protection de la stabilité du système financier pour mettre en œuvre des mesures conservatoires, sans qu’il existe pour autant de menace grave et caractérisée sur ladite stabilité.
Je suis disponible pour travailler et clarifier les points qui le justifient.
Par ailleurs, je vous indique que, en concertation avec les sénateurs et à l’issue d’une discussion franche avec le gouvernement, j’ai retiré l’amendement qui rétablissait une durée de six mois pour les mesures de sauvegarde qui peuvent être prises par le Haut conseil de stabilité financière, dans le souci de conserver la rédaction du Sénat et de réaffirmer le caractère exceptionnel et temporaire de ces mesures.
La commissionadoptel’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CF49 du rapporteur pour avis.
M.le rapporteur pour avis.Il s’agit de l’amendement de précision quejeviensd’évoquer sur le caractère grave et caractérisé de la menace.
La commissionadoptel’amendement.
Elle aborde l’amendement CF4 du rapporteur.
M.le rapporteur pour avis.Cet amendement de précision rédactionnelle concerne la publicité – souhaitée par le Sénat – des décisions du Haut conseil de stabilité financière en matière de surveillance macroprudentielle des organismes d’assurance.
La commissionadoptel’amendement.
Puis elle émet un avisfavorableà l’adoption del’article21bismodifié.
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