
L’OCDE préconise des plans de relance coordonnés en cas d’atterrissage brutal

A quelques jours du G20, la mise au point de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) arrive à point nommé. La croissance économique mondiale sera globalement préservée cette année mais va ralentir dès 2019 sur fond de tensions commerciales et de remontée des taux d’intérêt.
Dans ses perspectives économiques d’automne publiées mercredi, l’OCDE encourage les gouvernements à assurer un atterrissage en douceur des économies mondiales, voire à mettre en oeuvre des plans de relance coordonnés en cas d’atterrissage économique brutal.
En termes de croissance, «on revient vers la tendance de long terme», a déclaré Laurence Boone, chef économiste de l’OCDE, «on ne prévoit pas de ralentissement plus prononcé. En revanche, il y a beaucoup de risques». Elle ajoute qu’un atterrissage en douceur est toujours difficile à négocier et que l’exercice sera compliqué par les tensions commerciales mais aussi par le rééquilibrage en cours des flux de capitaux des économies émergentes vers les pays qui normalisent leur politique monétaire, particulièrement les Etats-Unis.
L’OCDE anticipe toujours une croissance mondiale à 3,7% cette année mais ne table plus que sur 3,5% en 2019, soit 0,2 point de moins qu’elle ne l’attendait en septembre, et la voit se stabiliser à ce rythme en 2020.
L’offensive de l’administration américaine sur les tarifs douaniers a déjà un impact sur le commerce mondial, dont l’OCDE voit la croissance annuelle passer sous 4% sur 2018-2020 alors qu’elle avait été de 5,2% en 2017. Laurence Boone estime que la guerre commerciale impacte déjà négativement de 0,1 à 0,2 point le PIB mondial et que celui-ci pourrait être amputé de 0,8 point à l’horizon 2021 en cas d’escalade, avec toutes les incertitudes qu’elle créerait.
Pour la zone euro, elle revoit en baisse de 0,1 point ses anticipations pour 2018 (1,9%) comme pour 2019 (1,8%), ce ralentissement s’accentuant sur 2020 (1,6%).
Concernant la France, la prévision de croissance est maintenue à 1,6% en 2018, taux qui est également anticipé pour 2019, soit un tassement de 0,2 point, avant 1,5% en 2020.
La plus forte révision porte sur l’Allemagne, dont la croissance reviendrait à 1,6% cette année comme l’an prochain - soit 0,3 et 0,2 point de moins que prévu précédemment et le même rythme que celui attendu pour la France -, et tomberait à 1,4% en 2020.
L’OCDE est également moins optimiste pour l’Italie, avec un PIB revu en baisse de 0,2 point pour 2018 et 2019, à respectivement 1,0% puis 0,9%, estimant que les effets de la politique budgétaire expansionniste du gouvernement seront contrebalancés par un regain d’inflation et un ralentissement de la croissance de l’emploi.
Pour le Royaume-Uni, elle confirme prévoir 1,3% de croissance pour 2018, relève sa prévision 2019 à 1,4% (+0,2 point), mais table sur un ralentissement à 1,1% en 2020 et ce «dans l’hypothèse où la sortie de l’Union européenne se ferait sans heurts».
A court terme, l'économie américaine s’en tire plutôt bien par rapport aux autres pays développés grâce au soutien de la politique de relance budgétaire mise en place par l’administration Trump. L’OCDE ne change rien à ses prévisions sur le PIB des Etats-Unis, qu’elle voit toujours progresser de 2,9% cette année et 2,7% l’an prochain. Mais il tomberait à 2,1% en 2020, l’effet des baisses d’impôt commençant à se dissiper et celui des tensions commerciales persistant.
S’agissant de la Chine, l’organisation anticipe un ralentissement de 6,6% en 2018 à 6,0% en 2020, ce qui constituerait un plus bas depuis 30 ans pour une économie très exposée à une escalade des tensions commerciales.
Le ralentissement de la croissance mondiale «est le reflet de la transition vers des politiques macroéconomiques moins accommodantes (...) et des effets toujours négatifs des tensions commerciales, du durcissement des conditions financières et de la hausse des prix du pétrole», souligne l’OCDE.
Dans ce contexte, l’organisation presse les responsables politiques de «rétablir la confiance dans les institutions internationales et dans le dialogue entre tous les pays, notamment pour apporter une solution coopérative aux discussions sur les échanges commerciaux.»
«L’adoption de mesures concrètes au niveau du G20 serait aussi un signal positif, démontrant que les pays peuvent agir de manière coordonnée et concertée si la croissance devait ralentir plus nettement que prévu», souligne-t-elle.
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Népal: Sushila Karki, la nouvelle Première ministre, s'affiche au chevet des victimes des émeutes
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Népal: la Génération Z en révolte après la mort de Santosh Bishwakarma
Katmandou - «Il rêvait de mourir en ayant été utile à son pays». Santosh Bishwakarma, 30 ans, a été abattu lundi par les forces de l’ordre dans une rue de Katmandou alors qu’il manifestait contre le gouvernement, et sa femme est inconsolable. Dans sa petite maison de la capitale népalaise encombrée de ses proches venus partager son deuil, Amika Bishwakarma, 30 ans elle aussi, peine à évoquer le souvenir de son mari. «Il avait l’habitude de dire qu’il ne voulait pas mourir comme un chien», lâche-t-elle entre deux sanglots. «Il voulait que le Népal soit reconnu dans le monde, et ne pas mourir avant d’y avoir contribué. Je crois qu’il a réussi». Santosh avait rejoint lundi le cortège de ces jeunes réunis sous la bannière de la «Génération Z» qui dénonçaient le blocage des réseaux sociaux et la corruption des élites du pays. Il est tombé lorsque la police, débordée, a ouvert le feu sur les manifestants. Une vingtaine d’entre eux ont été tués, des centaines d’autres blessés. La répression a nourri la colère de cette «Gen Z», qui est revenue le lendemain dans les rues de la capitale et a incendié ou mis à sac tous les symboles du pouvoir: parlement, bureaux ministériels, tribunaux, jusqu’aux résidences de plusieurs dirigeants. Le Premier ministre KP Sharma Oli n’a eu d’autre choix que de démissionner. Respectée pour son indépendance, l’ex-cheffe de la Cour suprême Sushila Kari, 73 ans, a été nommée vendredi soir à la tête d’un gouvernement provisoire chargé de conduire le pays jusqu'à des élections prévues dans six mois. Son entrée en fonction semble satisfaire de nombreux Népalais mais pas Amika Bishwakarma, désormais toute seule pour élever son fils Ujwal, 10 ans, et sa fille Sonia, 7 ans. «Un peu de justice» «Mon mari aurait tout fait pour leur permettre de réaliser leurs rêves, même au prix de sa vie», assure-t-elle. «Mais comment je vais pouvoir y arriver seule maintenant ? Il a sacrifié sa vie pour le pays, j’espère que le gouvernement va m’aider». Quand il a appris la mort de Santosh, son ami Solan Rai, 42 ans, a accouru au chevet de sa veuve. Après les violences de la semaine, il veut croire à des jours meilleurs pour son pays. «je n’avais jamais vu pareille colère», note-t-il, «j’espère que cette fois, ça va enfin changer». D’autres veulent croire que la mort de leurs proches ne sera pas vaine. Ce vendredi, ils étaient des centaines à se presser dans le temple de Pashupatinath, à Katmandou, pour assister à la crémation d’un fils, d’un frère ou d’un ami tué cette semaine. «J’espère que de tout ça sortira une forme de justice, que notre peuple obtiendra enfin les changements qu’il cherche désespérément depuis si longtemps», espère Ratna Maharjan en pleurant son fils, tué d’une balle tirée par un policier. Sur les marches du temple, au bord du fleuve Bagmati, une femme vêtue de rouge s’accroche désespérément à la dépouille de son fils, qu’elle refuse de voir partir en cendres. Un peu à l'écart, des policiers déposent des gerbes de fleurs sur le cercueil d’un de leurs collègues, mort lui aussi pendant les émeutes. La police a fait état de 3 morts dans ses rangs. Avant de retourner au silence de son deuil, Amika Bishwakarma fait un dernier vœu, plus politique. «On ne demande pas la lune», glisse-t-elle d’une petite voix. «On veut juste un peu plus d'égalité, que les riches ne prospèrent pas pendant que les pauvres continuent à dépérir». Bhuvan BAGGA et Glenda KWEK © Agence France-Presse