
La Banque d’Angleterre s’apprête à enclencher une deuxième hausse de taux

Passer la deuxième. Après une première hausse surprise en décembre, plutôt symbolique (de 0,10% à 0,25%), la Banque d’Angleterre (BoE) devrait décider jeudi de relever son taux directeur de 0,25% à 0,50%. Cette deuxième hausse consécutive, une première depuis 2004, ne suscite guère de débat chez les économistes. Mais l’institution sera aussi attendue sur la suite du processus : hausses de taux, réduction du bilan et projections économiques.
Ralentissement
Sur ce dernier point, le Fonds monétaire international (FMI) a estimé le 25 janvier que le Royaume-Uni connaîtra encore la croissance la plus forte du G7, après les 7,2% de 2021 : 4,7% en moyenne en 2022, contre une estimation initiale de 5% révisée à la baisse à cause des perturbations liées au variant Omicron et aux contraintes d’approvisionnement. «L’enquête de décision mensuelle (DMP) de la Banque d’Angleterre a noté de fortes baisses des attentes au premier trimestre 2022 en raison des restrictions Covid, avec -7% sur les ventes, -10% sur les investissements et -4% sur l’emploi», nuance l’économiste Sanjay Raja chez Deutsche Bank. Il note une perte de confiance des consommateurs en ce début d’année, mais anticipe une reprise rapide au deuxième trimestre pour aboutir à 4,25% de croissance en 2022, 1,5% en 2023 et moins de 1% en 2024…
«La vue d’ensemble est que le Royaume-Uni a une demande faible - la production revient tout juste aux niveaux d’avant Covid - et une offre faible (…). Une réduction de la croissance potentielle se traduira par des hausses de taux plus précoces jusqu’à un niveau neutre bas (…). La production devrait rebondir une fois les effets Omicron passés, mais une compression du revenu réel plus intense que celle anticipée par la BoE devrait réduire la croissance au deuxième semestre», juge Robert Wood, économiste UK chez Bank of America (BofA), qui évoque un rythme de croissance à 2,6% fin 2022, 1,1% fin 2023 et 0,9% fin 2024.
Les tensions du côté de l’offre et du marché du travail devraient quand même persister en 2022, avec la possibilité d’un taux de chômage rapidement au-dessous de 4%. Le taux d’inflation, après avoir atteint 5,4% en décembre et un sommet depuis 1992, augmenterait au-dessus de 6% voire 6,5% au printemps. Gita Gopinath, directrice adjointe du FMI, a d’ailleurs déclaré qu’«un soutien bien ciblé pour les ménages très vulnérables sera utile» pour traverser la crise des revenus qui frappera en avril, lorsque les factures d’énergie et les taxes augmenteront. Un début de boucle prix-salaires semblerait se dessiner outre-Manche, et tous ces risques se reflètent dans des points morts d’inflation élevés à 5 ans (4,33%) et 10 ans (4,16%).
Hausses de taux ou QT ?
Dans ce contexte, les marchés de swaps valorisent donc une hausse de 25 pb en février, deux autres jusqu’à 1% d’ici à l’été, puis deux autres encore lors des quatre comités de politique monétaire (MPC) qui se tiendront entre août et décembre. Le relèvement de jeudi devrait être décidé à l’unanimité des neuf membres. Ensuite, «la vigueur et le nombre des hausses en 2022 dépendront de l’équilibre à trouver entre lutte contre l’inflation et coût pour la croissance», reconnaît Sanjay Raja. «Nous partons du principe que le MPC s’en tiendra à son plan, mais il y a une chance qu’il prenne peur», préviennent aussi les analystes de Capital Economics. Avant de voter pour le statu quo en décembre face au variant Omicron, Silvana Tenreyro, membre du MPC, avait prôné la prudence et convaincu ses collègues de minimiser les attentes des marchés en novembre.
Un autre sujet portera probablement dès jeudi sur la réduction du bilan («quantitative tightening», QT). La BoE devrait annoncer rapidement une réduction «passive», consistant à cesser les réinvestissements de l’Asset Purchase Facility (APF) : 38 milliards de livres en moins sur 895 milliards au bilan cette année, «pas un défi majeur pour les taux vu les importantes réductions d’émission du Bureau de gestion de la dette (DMO)», indique l’équipe d’ING. Les choses pourraient changer avec une réduction «active» consistant à revendre des emprunts d’Etat britanniques sur les marchés. «Nous prévoyons que la BoE commencera également ces ventes actives en novembre, à un rythme initial de 5 milliards de livres par mois. A notre avis, ce QT remplacera certaines hausses du taux directeur», conclut Robert Wood.
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Nucléaire iranien : un nouveau cadre de coopération convenu entre l'Iran et l'AIEA
Le Caire - L’Iran a annoncé mardi avoir convenu d’un nouveau cadre de coopération avec l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), après avoir suspendu sa collaboration avec le gendarme onusien du nucléaire dans le sillage de la guerre contre Israël en juin. Le directeur de l’AIEA, Rafael Grossi, a salué «une étape importante dans la bonne direction». Il a indiqué sur X s'être entendu lors d’une réunion au Caire avec le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi «sur des modalités pratiques pour reprendre les inspections en Iran» des activités nucléaires. La rencontre au Caire, à laquelle a participé le ministre égyptien des Affaires étrangères Badr Abdelatty, était la première entre MM. Araghchi et Grossi depuis la guerre de 12 jours déclenchée par une attaque israélienne sur l’Iran en juin. Le dossier du nucléaire iranien empoisonne de longue date les relations de l’Iran avec les Occidentaux. Les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, et Israël, ennemi juré de l’Iran, soupçonnent le pouvoir iranien de vouloir se doter de la bombe atomique. L’Iran dément vigoureusement avoir de telles ambitions militaires mais insiste sur son droit au nucléaire pour des besoins civils. Après la rencontre au Caire, le porte-parole de la diplomatie iranienne, Esmaïl Baghaï, a annoncé que «l’Iran et l’AIEA étaient parvenus à une entente sur la manière d’agir dans ce nouveau contexte, après les attaques illégitimes menées par les Etats-Unis et le régime sioniste contre les installations nucléaires pacifiques de notre pays», sans autre précision. «Nouvelle relation» Plus tard, MM. Araghchi et Grossi ont signé un accord intitulé «Modalités techniques pour la mise en œuvre des inspections». M. Abdelatty a dit espérer que l’accord «marquera le véritable point de départ d’une nouvelle relation entre les deux parties, caractérisée par une plus grande transparence». Il a aussi espéré qu’il «favorise une entente» d’abord avec les pays européens ayant menacé de rétablir les sanctions contre l’Iran, puis «conduise à un retour à la table des négociations entre l’Iran et les Etats-Unis». MM. Araghchi et Grossi ont ensuite rencontré le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qui a salué «une étape positive vers la désescalade». Téhéran avait suspendu sa coopération avec l’AIEA après la guerre déclenchée le 13 juin par une attaque sans précédent d’Israël sur le sol iranien. L’Iran avait reproché à l’AIEA de ne pas avoir condamné les bombardements israéliens, puis américains, qui ont visé ses installations nucléaires durant le conflit. Téhéran estime également que l’AIEA a une part de responsabilité dans le déclenchement de l’attaque israélienne surprise, car elle a été lancée au lendemain du vote d’une résolution critique sur le programme nucléaire iranien au siège de l’agence à Vienne. Depuis juillet, une loi votée au Parlement iranien bannit en principe toute coopération avec l’AIEA. Menaces de sanctions Des inspecteurs de l’agence ont néanmoins fait un bref retour en Iran fin août pour remplacer le combustible du site de Bouchehr, la principale centrale nucléaire de production d'électricité du pays. Mais ils n’avaient pu accéder aux sites bombardés en juin et dont l'étendue exacte des dégâts n’est pas connue. La rencontre entre MM. Araghchi et Grossi est intervenue au moment où la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne (groupe E3) menacent de rétablir fin septembre des sanctions contre l’Iran, suspendues depuis 2015 par un accord international sur le nucléaire conclu alors avec Téhéran. Une clause de cet accord, enclenchée fin août, permet le rétablissement de ces sanctions si une partie estime que l’Iran ne respecte pas ses engagements. L’accord de 2015, signé par l’E3, les Etats-Unis, la Chine, la Russie et l’Iran prévoyait d’importantes restrictions au programme nucléaire de Téhéran en échange de la levée progressive des sanctions. En 2018, sous le premier mandat du président Donald Trump, les Etats-Unis avaient décidé de s’en retirer et avaient rétabli leurs propres sanctions. Téhéran s'était ensuite affranchie de certains engagements, en accélérant l’enrichissement d’uranium. L’Iran a enrichi de l’uranium au niveau élevé de 60%, selon l’AIEA, niveau proche du seuil de 90% requis pour la fabrication d’une bombe atomique. © Agence France-Presse -
La bourse de New York termine sur des records dans l'attente des taux de la Fed
Washington - La Bourse de New York a terminé à de nouveaux sommets mardi, abordant avec optimisme la publication de plusieurs indicateurs d’inflation aux Etats-Unis susceptibles de donner de nouveaux indices sur la trajectoire monétaire privilégiée par la Réserve fédérale (Fed). Le Dow Jones a avancé de 0,43%, à 45.711,34 points, l’indice Nasdaq a pris 0,37% à 21.879,49 points et l’indice élargi S&P 500 a gagné 0,27% à 6,512,61 points. «Le groupe des mégacapitalisations a joué un rôle moteur en contribuant à soutenir les principaux indices», souligne auprès de l’AFP Patrick O’Hare, de Briefing.com. Nvidia a ainsi gagné 1,46%, Alphabet (Google) 2,39% et Amazon a avancé de 1,02%. Globalement, les investisseurs sont «dans l’expectative des données sur l’inflation, avec l’indice des prix à la production (PPI) qui sera publié mercredi, puis jeudi avec l’indice des prix à la consommation (CPI)», relève Patrick O’Hare. «Les acteurs du marché s’attendent non seulement à ce que la Fed abaisse ses taux en septembre, mais aussi en octobre et en décembre», note l’analyste. Selon l’analyste, les données sur l’inflation donneront par conséquent «une base pour réévaluer la probabilité de ces baisses de taux». La banque centrale des Etats-Unis est investie d’un double mandat pour le pays, consistant à la fois à surveiller le marché de l’emploi et à maintenir l’inflation proche de 2% sur le long terme. Toutefois, prévient M. O’Hare, «il semble que les marchés financiers se concentrent davantage sur l’affaiblissement du marché du travail que sur les données d’inflation pour le moment». Mardi, ils ont gardé un oeil sur la forte révision à la baisse des chiffres de l’emploi américain entre avril 2024 et mars 2025, sans pour autant y réagir négativement. Selon le Bureau des statistiques du travail (BLS), les entreprises américaines ont au final créé 911.000 emplois de moins sur l’ensemble de l’année fiscale 2024-2025, soit quasiment deux fois moins que ce qui avait été rapporté initialement. «Pour ce marché, les mauvaises nouvelles économiques sont synonymes de bonnes nouvelles en matière de baisse des taux», résume Patrick O’Hare. Dans ce contexte, sur le marché obligataire, le rendement des emprunts d’Etat américains à échéance 10 ans se tendait par rapport à la clôture lundi, à 4,08% contre 4,04%. Côté entreprises, Apple (-1,48% à 234,35 dollars) a souffert de la présentation de sa nouvelle gamme d’iPhone 17. L’entreprise a présenté un modèle «Air» ultrafin, a promis des progrès sur l’autonomie et les objectifs photographiques, mais n’a pas annoncé d’avancées majeures pour rattraper son retard dans l’intelligence artificielle (IA). La firme de Cupertino (Californie) a aussi annoncé que les prix des nouveaux iPhone devraient augmenter aux Etats-Unis en raison des droits de douane imposés par le président Donald Trump, qui alourdissent les coûts de production en Chine, toujours le principal centre de fabrication de la marque à la pomme. La start-up américaine spécialisée dans l’informatique à distance («cloud computing») CoreWeave a bondi de 7,13% à 100,22 dollars après avoir annoncé le lancement d’un fonds de capital-risque dédié aux investissements dans l’IA. Le spécialiste néerlandais des infrastructures et services IA Nebius (+49,42% à 95,72 dollars) s’est envolé à l’annonce d’un partenariat avec Microsoft. Nebius dédira une partie des ressources de son nouveau data center au géant américain de l’informatique. Nasdaq © Agence France-Presse