
Les sociétés de gestion récupèrent de 2022 dans un environnement incertain

L’année 2022 a effacé 6.705 milliards d’euros d’encours sous gestion dans l’industrie mondiale des fonds ouverts selon les données de l’association européenne de la gestion d’actifs Efama. Ces encours perdus sont en train d’être récupérés en 2023 mais rien ne laisse présager qu’ils le seront intégralement à la lecture des résultats des gestionnaires d’actifs cotés pour ce premier semestre 2023 et des analyses de leurs dirigeants.
Face aux incertitudes macro-économiques (soft-landing ou récession ?) et troubles géopolitiques, l’investisseur reste prudent, se réfugiant dans les fonds monétaires et obligataires, classes d’actifs bénéficiant de la hausse des taux, que ce soit en gestion active ou passive. Valérie Baudson, directrice générale d’Amundi, filiale de gestion d’actifs de Crédit Agricole, insiste sur «l’environnement incertain» dans lequel naviguent les gestionnaires. Pour elle, il n’y a aucune raison que les investisseurs redeviennent favorables aux actifs risqués sur les prochains trimestres. Les références à cet environnement incertain, volatile, et à sa persistance, n’ont pas manqué dans les commentaires semestriels des dirigeants de sociétés de gestion.
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La majorité des sociétés font état de rebonds d’encours sous gestion au premier semestre et même d’un record pour le hedge fund britannique Man Group. Mais ces progressions masquent parfois les baisses contenues ou conséquentes d’autres indicateurs (collecte nette, résultat net, revenus nets, commissions de gestion, etc) sur la période selon les différents gérants cotés. Leurs marges opérationnelles se sont souvent réhaussées sur le semestre mais restent en-deçà de celles enregistrées à fin juin 2022. Entre 120 et 740 points de base derrière pour les sociétés cotées qui publient cette information, selon nos calculs.
Les sociétés de gestion ont donc retrouvé des encours et ce, principalement grâce à des effets de marché favorables. Ces gains, combinés aux effets de devises, ont par exemple contribué pour 640 milliards de dollars à la hausse semestrielle de 831 milliards de dollars d’encours du numéro un du secteur, BlackRock (+9,7% d’encours sur le semestre). Ses encours s’élevaient à 9.425 milliards de dollars fin juin. BlackRock est en avance d’un trimestre sur ses encours par rapport aux prévisions des analystes. Ces derniers estiment qu’ils pourraient repasser les 10.000 milliards fin décembre pour atteindre un nouveau record historique.
Le résultat net de BlackRock progresse sur le semestre, les revenus de sa division technologique aussi. Mais côté collecte, la firme a « déçu » les analystes au premier semestre même si plus d’un gérant rêverait de collecter 190 milliards de dollars net en six mois.
Fortunes diverses chez les Français
En France, Amundi ainsi que les divisions de gestion d’actifs de BPCE (Natixis Investment Managers) et de BNP Paribas (BNP Paribas AM) ont vu leurs encours augmenter dans une fourchette de 3 à 5,4% par rapport à fin 2022. Leurs fortunes ont été diverses sur la collecte (négative pour Amundi sur le semestre) ainsi que sur les revenus et résultats nets. La gestion d’actifs d’Axa, elle, n’a pas bénéficié des effets de marché. Ils lui ont été au contraire défavorables et, associés à une décollecte provenant essentiellement des compagnies d’assurance du groupe, ont contribué à une baisse des encours moyens sous gestion de 4% sur le semestre.
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A noter, côté marchés privés, la collecte semestrielle record de 3,3 milliards d’euros, grâce à la dette privée, du gestionnaire alternatif Tikehau Capital. Son résultat net a néanmoins très largement baissé entre fin juin 2022 et fin juin 2023. Tout comme celui de son homologue américain Blackstone qui est entré, fin juin, dans le club des gérants à plus de 1.000 milliards de dollars d’encours. Un seuil qu’il n’avait pas prévu d’atteindre avant 2026. Le futur est tout aussi incertain chez les gérants d’actifs privés que les gérants traditionnels. Les levées de fonds, sauf exceptions, sont difficiles et le contexte inflationniste, cumulé au comportement prudent des investisseurs, freine le marché du M&A et donc les ventes d’actifs.
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Chantiers à l'étranger
A l’étranger, plusieurs sociétés de gestion poursuivant leur repositionnement ont vu leurs encours augmenter même si la collecte n’a pas suivi. C’est le cas entre autres du gérant britannique Jupiter AM et des américains Janus Henderson, Invesco et T. Rowe Price. Les résultats d’arbdn, autre société de gestion en reconstruction, sont attendus le 8 août.
DWS, qui continue de se restructurer sous l’égide de Stephan Hoops arrivé l’an dernier, reste un cas à part. La filiale de Deutsche Bank nourrit de grandes ambitions, jouit d’une dynamique positive (encours et résultats nets en hausse, collecte positive). Mais ses ambitions pourraient être freinées, et les chiffres de ses prochains trimestres grevés, par le résultat à venir des investigations les concernant, sa maison-mère et lui, sur les accusations d’éco-blanchiment dans les fonds de DWS et la communication autour de ces produits.
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Après un premier semestre à la peine - la faute aux actions britanniques toujours boudées par les investisseurs - Liontrust compte sur l'éventuel rachat, contesté, du groupe de gestion d’actifs et de fortune suisse GAM pour gonfler ses encours, qui étaient en recul de 6% sur les six premiers mois. Ou plutôt ce qu’il reste de GAM, qui a perdu 7 milliards de francs suisses d’actifs sous gestion sur la première moitié de 2023. L’offre publique d’acquisition vient d'être étendue par Liontrust jusqu’au 23 août. En terre helvétique, l’autre événement à suivre en août sera la publication des premiers résultats de UBS post-fusion avec Credit Suisse, le rapprochement forcé des deux groupes ayant été parachevé en juin.
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