
Exclusif : Trois ex-Comgest lancent leur société de gestion

Trois anciens collaborateurs de Comgest se sont associés pour créer leur société de gestion, Sparta Gestion, a appris L’Agefi. Il s’agit de Wojciech Stanislawski, qui dirigeait l’équipe marchés émergents chez Comgest, Charles Biderman, qui était gérant et analyste au sein de cette équipe, et de Benjamin Hottin.
Wojciech Stanislawski et Charles Biderman, qui ont travaillé ensemble pendant près de quinze ans, racontent à L’Agefi avoir quitté Comgest «à des moments différents et pour des raisons différentes». Ils se sont retrouvés en 2022 avec l’envie de retourner sur les marchés. «Investir est un métier passionnant», justifie Wojciech Stanislawski. «A condition d’avoir le cadre pour l’exercer de manière libre et sans contraintes», ajoute-t-il. Ils ont ensuite demandé à Benjamin Hottin de les rejoindre.
«Avec Sparta, nous voulons revenir aux sources de la gestion», explique Wojciech Stanislawski. «Nous constatons que notre secteur est dominé par une volonté d’industrialisation. A cela s’ajoute une quantité de contraintes incroyables liées à la réglementation, mais aussi aux clients. Si bien que, petit à petit, les gérants prennent de moins en moins de décisions courageuses», analyse-t-il. D’où cette volonté de se mettre à son compte et d’être indépendant, un choix qui n’est pas sans rappeler le parcours d’une autre ancienne gérante de Comgest, Céline Piquemal-Prade, qui a aussi fondé sa société il y a trois ans.
Le trio a choisi de donner à sa société le nom de Sparta, pour les valeurs de combativité, courage, discipline et humilité que véhicule cette ville de la Grèce antique et qu’ils partagent.
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Naturellement, Sparta Gestion se concentrera sur la gestion d’actions d’entreprises des marchés émergents, la spécialité des deux gérants, mais aussi de Benjamin Hottin, qui a été stagiaire dans l’équipe marchés émergents de Comgest. Ce dernier aura toutefois un rôle plus opérationnel au sein de la nouvelle structure.
Lancement d’un premier fonds au printemps
Une première étape a été franchie fin février avec l’obtention de l’agrément de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et l’équipe s’attelle désormais à la création de son premier fonds, qu’elle espère pouvoir lancer au printemps. Les gérants y mettront en œuvre leur gestion de conviction.
«L’objectif de notre gestion sera de profiter au maximum de la croissance des pays émergents, qui sont en croissance structurelle, quel que soit le marché. Cela pourra se faire de manière directe, en investissant directement en Chine ou au Brésil, ou de manière indirecte, en sélectionnant des sociétés cotées sur les marchés développés et dont la croissance dépend fortement des marchés émergents», détaille Charles Biderman.
«Nous investirons dans des entreprises solides, avec des business models éprouvés», précise Wojciech Stanislawski. «Nous serons très sensibles à la croissance des bénéfices et aux dividendes dans notre sélection de titres». Le tout, saupoudré de macroéconomie, «car sur les marchés émergents, même les entreprises les plus solides peuvent être déstabilisées par des situations macroéconomiques difficiles. Il est donc important de bien comprendre l’environnement des entreprises dans lesquelles nous investissons», ajoute-t-il. Les deux gérants notent que la situation actuelle sur les émergents offre un bon point d’entrée.
La gestion se veut libre et avec le moins possible de contraintes. Dans cette perspective, outre l’indépendance capitalistique, les fondateurs ont choisi de ne pas recruter de commercial, à l’image de ce que faisait Comgest, estimant qu’ils sont eux-mêmes les meilleurs vendeurs de leur gestion et que la présence de commerciaux peut entraver la gestion. «Nous sommes très vigilants au risque que présente le fait d’avoir des commerciaux au sein des sociétés de gestion», lance Wojciech Stanislawski. «A un moment donné, les gérants ont peur de perdre les clients et les commerciaux leur expliquent ce qu’il faut faire ou ne pas faire pour éviter de les perdre. Et c’est comme cela qu’on perd la flexibilité en matière de gestion. In fine, on s’approche du benchmark, car c’est moins risqué. Et on ne s’expose pas aux critiques des commerciaux ou des clients», développe-t-il.
Alignement d’intérêts
Dans la même optique, les fondateurs ont choisi d’être article 6, à contre-courant de la ruée vers les articles 8 et 9 de la réglementation européenne SFDR. «L’ESG en tant que concept de vouloir rendre le monde meilleur nous attire énormément. Mais dans la pratique, est-ce à nous, gérants, d’être juge et de faire la police des entreprises ? », s’interroge Charles Biderman. Wojciech Stanislawski prône de son côté une gestion de bon sens. «On ne veut pas détenir une entreprise qui produit des résultats financiers exceptionnels, mais qui, d’un point de vue environnemental, se comporte très mal. C’est inacceptable ! Nous voulons investir dans des entreprises respectueuses et qui se comportent bien à tous points de vue», dit-il. «Nous allons placer une grande partie de notre épargne dans le fonds que nous créons et nous ne souhaitons pas que notre argent ni celui des client finisse dans de mauvaises mains», renchérit-il.
In fine, l’objectif est de dégager une bonne performance, «ce qui est parfois oublié dans notre secteur», déplore Wojciech Stanislawski. «Pour cela, il faut rester concentré». Concentration dans le portefeuille, qui comptera une trentaine de valeurs, mais aussi focus sur la gestion. «Nous aimons beaucoup notre métier, nous ne voudrions pas nous transformer en gérants de société de gestion, à la place de gérants de portefeuille. Nous voulons rester gérants de portefeuille et proches de nos entreprises, sur les 20-30 années à venir de notre vie professionnelle», souligne Wojciech Stanislawski, sous-entendant qu’il ne souhaite pas se disperser avec une gamme pléthorique de fonds.
Sparta Gestion s’adresse à «tous ceux qui seront intéressés par ce qu’on fait, qui puissent comprendre ce que nous faisons et l’horizon de temps, sans nous imposer des contraintes», indique Charles Biderman, questionné sur la clientèle visée. En pratique, cela concernera principalement des individus fortunés, de la banque privée, des sociétés de gestion qui n’auraient pas d’exposition actions émergentes en interne, des family offices ou des petits institutionnels. «Nous aimons beaucoup travailler mais il faut que cela nous fasse plaisir. Cela passe par une bonne entente avec le client», ajoute Wojciech Stanislawski, qui insiste aussi sur la notion de transparence et d’alignement d’intérêts.
Quant à leurs objectifs de croissance, les fondateurs de Sparta Gestion répondent qu’ils ont le temps. «Nous ne sommes pas pressés, nous prendrons notre temps pour bâtir les choses comme nous le souhaitons, tout en restant pragmatiques», conclut Wojciech Stanislawski.
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