
Les juges sanctionnent la facturation des arbitrages

Si la jurisprudence est abondante en la matière, cet arrêt, qui fait l’objet d’un pourvoi en cassation, est intéressant dans la mesure où les juges, après avoir rappelé que l’assureur doit exécuter loyalement la convention, retiennent que l’instauration en cours de vie du contrat d’une commission de souscription de 1% lors des arbitrages conduit à dénaturer l’équilibre contractuel, neutralisant les conséquences péjoratives pour l’assureur de la clause d’arbitrage à cours connu.
Instauration d’une commission. Dans cette affaire, l’assuré a assigné son assureur devant le TGI de Paris, estimant que l’instauration de cette commission ne pouvait pas être mise à sa charge et que son introduction a eu pour effet de dénaturer illicitement le contrat d’assurance.
En l’occurrence, le plaignant a souscrit un contrat individuel d’assurance-vie en euros et en unités de compte, “Corbeille Sélection”, auprès de la Fortis Assurance, devenue Ageas France, qui lui donne accès, outre au fonds en euros, à trois unités de compte dénommées “Corbeille Sélection performance”, “Corbeille Sélection Equilibre” et “Corbeille Sélection Prudence” gérées par la société Edmond de Rothschild Asset Management. Son contrat précise que «les frais d’arbitrage prélevés à l’occasion de chaque transfert représentent 0.50 % du montant transféré mais sont toutefois plafonnés à 750 euros par arbitrage.»
Le client, qui a effectué un versement initial de 7.500 euros sur son contrat en octobre 2006, a ensuite abondé le contrat pour un montant de 9.600.000 euros en quatre versements d’octobre 2007 à mai 2009. L’assureur se plaignant du bouleversement économique résultant de la fréquence de l’utilisation de la clause d’arbitrage à cours connu par son client (35 arbitrages), lui avait proposé des contrats qu’elle estimait plus adaptés à leurs objectifs spéculatifs, mais en vain.
Par courrier du 27 mai 2009, le gestionnaire et l’assureur ont informé l’ensemble des souscripteurs des modifications affectant les OPCVM en leur adressant un rapport d’activité au 31 mars 2009 ainsi qu’un exemplaire du prospectus des unités de compte faisant apparaître dans la partie relative à l’information sur les frais à la charge de l’investisseur, “une commission de souscription acquise au FCP” de 1% , alors que les prospectus précédents ne prévoyaient aucun frais à ce titre. En juin 2009, le client réalise quatre arbitrages sur son contrat, ayant donné lieu à l’application de la commission de souscription des unités de compte.
Par jugement du 15 janvier 2013, le TGI de Paris a déclaré l’assureur responsable pour avoir modifié unilatéralement le contrat d’assurance souscrit par son client et l’a condamnée, avec exécution provisoire, à payer à celui-ci la somme de 267.504 euros en réparation de son préjudice. La cour d’appel de Paris confirme ce jugement.
En appel, l’assureur affirmait la répercussion de cette commission est conforme à la loi et à la jurisprudence en ce que l’assureur en matière d’assurance sur la vie dont le capital est exprimé en unités de compte ne doit et ne peut devoir à l’assuré que la contre-valeur en euros des unités de compte, qu’il n’a qu’une obligation d’information à l’égard du souscripteur, investisseur final, s’agissant des frais supportés par l’unité de compte, en ce compris les frais et commission de l’OPCVM et qu’il a en conséquence régulièrement répercuté sur le contrat les modifications des unités de compte, sans avenant, dans la mesure où celles-ci ne constituaient pas des modifications du contrat.
Déséquilibre contractuel. La Cour d’appel soulève que les conditions générales du contrat stipulaient très clairement que l’investisseur est l’assureur et que «pour les profils de gestion en unités de compte, chaque cotisation nette de frais de souscription est investie le mercredi suivant son encaissement par l’assureur en titres représentatifs du profil de gestion que vous avez choisi” et qu’en conséquence, la commission de souscription décidée par le gestionnaire de l’OPCVM, était à la charge de l’assureur.
De surcroit, cette commission n’existait pas lors de la souscription du contrat, l’assureur l’a acceptée et contrairement aux termes du rapport d’activité, cette commission n’avait pas vocation à s’appliquer aux nouveaux souscripteurs puisqu’il résulte d’un courrier en date de janvier 2008, adressée par l’assureur à son client, que la commercialisation du produit Corbeille Sélection avait cessé, ce qui signifie que la commission de souscription n’était applicable qu’aux souscripteurs antérieurs du contrat qui effectuaient des arbitrages.
Les juges concluent que si le client a pu continuer à arbitrer, la répercussion de la commission de souscription a eu pour effet de retirer tout intérêt à la clause d’arbitrage à cours connu qui constituait un élément essentiel du contrat puisque que l’assureur insistait sur la possibilité pour l’assuré de procéder librement à des transferts entre les différentes unités de compte. L’assureur ne peut invoquer le fait qu’elle a rempli son obligation d’information, qui n’est pas en cause et il ne démontre pas en quoi le fait de supporter cette commission serait illicite alors qu’elle est tenue d’exécuter loyalement la convention souscrite en application de l’article 1134 du code civil. L’assureur a dénaturé l’équilibre contractuel, neutralisant les conséquences péjoratives pour elle de la clause d’arbitrage à court connu et ainsi commis une faute dans l’exécution de ses obligations contractuelles qui engage sa responsabilité à l’égard de son client dont elle doit réparer le préjudice. Il lui est donc fait interdiction de répercuter le coût de la commission de souscription de 1% à l’acquisition des unités de compte servant de valeur de référence au contrat “Corbeille Sélection” aux arbitrages qui seront effectués par son client à compter du présent arrêt.
CA de Paris n° 13/02072 du 18 novembre 2014
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