L’assureur tenu des agissements délictuels de son agent général

La compagnie, en sa qualité de mandant, doit rembourser un client victime du détournement de ses fonds par un agent général qui lui avait proposé un faux contrat
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Par un arrêt du 20 novembre dernier, la Cour de cassation confirme la condamnation de l’assureur au remboursement de la somme investie par l’intermédiaire d’un agent général ayant été condamné à indemniser la compagnie à hauteur de 1.258.300 euros au titre de détournements de fonds.

Détournement de fonds. En l’espèce, un client démarché par un agent général de la société Abeillevie, (Avivavie aujourd’hui), a souscrit deux contrats d’assurance- viedont un pour un montant de 50.000 euros par chèque à l’ordre de la Société générale, le document remis faisant référence à un placement sur un support financier Victoire Asset Management, qui n'était pas proposé par la société Abeillevie. L’agent général lui a seulement fait parvenir la première demande de souscription. Il a ensuite été licencié pour faute lourde pour avoir commis de nombreux détournements de fonds. Un jugement correctionnel l’a déclaré coupable d’escroquerie, abus de confiance, faux et usage de faux, et sur l’action civile, l’a condamné à payer à Avivavieles sommes de 1.258.300 euros au titre de son préjudice matériel et de 20.000 euros au titre de son préjudice commercial. L’agent général a également été condamné à indemniser les victimes qui s'étaient constituées parties civiles. Le client a alors assigné l’assureurafin d’obtenir le remboursement de la somme investie par l’intermédiaire de l’agent général.

L’assureur contestait la position de la cour d’appel de l’avoir tenu à rembourser le montant de l’investissement estimant que celle-ci a violé les articles les articles L. 511-1 du code desassurances et 1384 du code civil en jugeant que le mandataire avait agi dans le cadre de ses fonctions, en engageant la responsabilité de l’assureur, après avoir constaté qu’aucun contrat n’avait été conclu, qu’aucun document afférent n’avait été remis dans les quarante jours, que la demande de souscription ne « s’adossait » à aucun placement proposé par l’assureur, et que le règlement avait été effectué dans des conditions exclues par les conditions d’engagement. De surcroît, la compagnie faisait également valoir que le client avait été négligent et ne pouvait pas légitiment croire en la conclusion de l’opération d’assurance.

Qualité de mandataire. La Cour de cassation écarte l’ensemble des prétentions de la compagnie d’assurance. La cour d’appel a en effet relevé que le client avait démarché par l’agent général en cette qualité, que la demande de souscription du contrat litigieux était établi à l’en-tête de la société Abeillevieet présentait une apparence d’authenticité, renforcée par la mention de son identité en qualité d’intermédiaire de la société Abeilleviedans ce document.

Légitime croyance du client. De surcroît, le règlement par chèque à hauteur du montant souscrit à l’ordre de la Société générale, et non à l’ordre de l’agent général n'était certes pas conforme au mode de règlement indiqué en gras sur l’exemplaire du contrat mais cette banque était tout de même expressément désignée comme l'établissement habilité pour percevoir des règlements en espèces jusqu'à 3.000 euros et une relation de confiance s'était instaurée entre le client et l’intermédiaire du fait de la souscription trois semaines auparavant d’un premier contrat du même type pour un montant de 45.734 euros, qui avait été validé par la compagnie.

Enfin, le client ne pouvait difficilement envisager que la banque accepterait de verser à un tiers le produit d’un chèque libellé à son ordre et la cour souligne que l’ensemble de cette opération s'était déroulée dans le contexte particulier d’un démarchage. Ainsi, il ne pouvait être reproché à un particulier non averti et profane dans le domaine, nonobstant son âge et sa qualité professionnelle d’informaticien, d’avoir manqué de vigilance en ne s’inquiétant pas, dans un délai de quarante jours suivant la passation du prétendu contrat, de ne pas avoir reçu les documents y afférents ou de ne pas avoir détecté que la demande de souscription ne s’adossait pas à un placement financier proposé par Abeillevie. Au demeurant, même si la victime avait pris attache avec l’assureur dans les quarante jours suivant la date de la pseudo-souscription, le détournement des fonds n’en aurait pas moins été consommé.

Cass. Civ. 2ème du 20 novembre 2014n° 4-10776

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