
Le transport aérien se dirige vers une reprise heurtée

Après une longue période d’attentisme et d’espoirs déçus, l’optimisme fait son retour dans le transport aérien. La reprise constatée dans le trafic de passagers depuis plusieurs semaines incite certaines compagnies à investir dans de nouveaux appareils pour renouveler leur flotte et faire baisser les coûts du carburant. C’est le cas de Qantas Airways qui a annoncé lundi la conclusion d’un contrat avec Airbus portant sur 12 avions long-courriers A350-1000, capables d’effectuer des vols sans escale entre Sydney et Londres ou entre Melbourne et New York.
Ces vols, qui devraient débuter à partir de fin 2025, seront assurés par des appareils spécialement configurés avec des sièges premium supplémentaires et une capacité globale réduite. Ces avions, qui seront 25% plus économes en carburant par rapport aux anciens gros porteurs, pourront ainsi transporter jusqu'à 238 passagers sur un trajet de 20 heures, ce que Qantas présente comme «le vol commercial direct le plus long du monde». La livraison de ces appareils est prévue entre 2025 et 2028.
La principale compagnie aérienne australienne a également passé à l’avionneur européen une commande de 40 avions A321 XLR et A220, dont la livraison sera étalée sur une décennie. Ces deux types d’appareils à fuselage étroit seront utilisés sur des vols intérieurs. Les 20 monocouloirs A321 XLR permettront aussi de relier le sous-continent australien à des pays du Sud-Est asiatique.
Un supplément de facturation atteignant 20%
Si Qantas n’a pas divulgué le montant global du contrat, les analystes de la banque Barrenjoey estiment qu’il s’élèvera à «au minimum 6 milliards de dollars australiens», soit 4 milliards d’euros. Selon le bureau d’analyse, la compagnie prévoit de facturer un supplément de 20% sur les billets des nouveaux vols ultra-long-courriers, qui pourront le cas échéant également desservir Paris, Chicago et Rio de Janeiro.
«Depuis le début de l’année civile, nous avons constaté une augmentation considérable de la demande», a déclaré à la presse le directeur général de Qantas, Alan Joyce. La compagnie, qui prévoit un retour aux bénéfices sur son exercice clos le 30 juin 2023, a expliqué que la forte reprise du marché intérieur et des vols internationaux lui avait donné la confiance nécessaire pour réaliser cet investissement majeur. Elle tire parti d’une structure de bilan saine après avoir ramené son endettement net à 4,5 milliards de dollars australiens à fin avril 2022, en-dessous de son niveau prépandémique, alors qu’il atteignait 5,5 milliards au 31 décembre 2021.
Le décalage existant entre les prises de commandes et la livraison des nouveaux appareils expose cependant les transporteurs aux aléas découlant d’une reprise trop rapide ou trop lente du trafic durant les 18 prochains mois. Le week-end dernier, la compagnie néerlandaise KLM a ainsi dû annuler plusieurs dizaines de vols depuis et vers son hub d’Amsterdam Schiphol en raison de problèmes logistiques mis en avant par la plateforme. Aéroport le plus fréquenté d’Europe en termes de mouvements d’avions en 2019 avec plus de 70 millions de voyageurs cette année-là, Schiphol a enregistré un plongeon sans précédent de son trafic durant la pandémie. Mais depuis que les Pays-Bas ont abandonné la majorité des restrictions anti-Covid-19 à la mi-mars, le nombre de passagers n’a cessé d’augmenter.
Un manque de personnel à Schiphol
«Schiphol a fait la demande exceptionnelle en partie dans le contexte de la sécurité des voyageurs et des employés», expliquait vendredi le gestionnaire aéroportuaire, en faisant également état de pénuries de personnel dans le secteur de l’aviation. La semaine précédente, les bagagistes de KLM avaient déclenché une grève dans cet aéroport afin de protester contre des effectifs insuffisants et de longues journées de travail.
La résurgence du Covid-19 en Chine prouve d’autre part que cette reprise ne sera pas homogène à l’échelle mondiale. Shanghai, où des millions d’habitants sont restés enfermés depuis plus d’un mois, a subi un revers lundi, les autorités ayant signalé 58 nouveaux cas de coronavirus en dehors des zones de quarantaine, tandis que Pékin continue à pratiquer des tests à grande échelle sans aller jusqu’au confinement. Dans la capitale qui rassemble 22 millions d’habitants, les autorités ont renforcé les restrictions pendant les cinq jours de vacances de la fête du travail qui se terminent mercredi, traditionnellement l’une des saisons touristiques les plus chargées.
La hausse inéluctable des tarifs aériens pour répercuter l’augmentation des coûts du kérosène pourrait contribuer à freiner le rebond de certains vols court ou moyen-courriers, en particulier pour les spécialistes européens du transport low-cost. En moyenne, le prix des billets d’avions au départ de la France vers l’étranger a déjà grimpé de 6% sur un an. Les compagnies qui ont massivement emprunté pour survivre durant la pandémie seront en outre contraintes d’augmenter leurs tarifs pour commencer à rembourser leur crédit. A cela s’ajoute l’obligation d’investir dans des équipements destinés à permettre l’incorporation progressive de carburants durables, une partie des coûts induits se retrouvant dans le prix des billets.
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Australie : attaque mortelle de requin sur un surfeur à Sydney, plages fermées
Sydney - Un «grand requin» a tué un surfeur samedi sur une plage populaire de Sydney, a annoncé la police, une attaque mortelle rare qui a entraîné la fermeture de plusieurs plages en Australie. La victime, un habitant de 57 ans, surfait avec cinq ou six amis dans les eaux du Pacifique, au large des plages voisines de Long Reef et Dee Why, au nord de Sydney, ont précisé les autorités. Ce surfeur expérimenté, marié et père d’une jeune fille, a perdu «plusieurs membres», a déclaré le responsable de la police de l’Etat de Nouvelle-Galles du Sud, John Duncan, lors d’une conférence de presse. «D’après ce que je comprends, lui et sa planche ont disparu sous l’eau», a-t-il ajouté. «Le corps a été retrouvé flottant dans les vagues» et «la planche du surfeur a été brisée en deux». Deux surfeurs l’ont aperçu dans l’eau et l’ont ramené à terre. «Malheureusement, à ce moment-là, il avait déjà perdu énormément de sang, et les tentatives de réanimation ont échoué», a poursuivi M. Duncan. Des témoins ont vu le squale, a indiqué la police, qui avait évoqué auparavant un «grand requin». Des experts gouvernementaux examineront les restes de la planche et le corps de la victime afin de déterminer l’espèce du requin, a indiqué la police. La plupart des morsures graves en Australie proviennent de grands requins blancs, de requins-bouledogues et de requins-tigres. Des images diffusées par les médias locaux montraient des policiers rassemblés sur le rivage et des ambulances garées à proximité. Les plages situées entre les quartiers nord de Manly et Narrabeen ont été fermées pour au moins 24 heures, a indiqué Surf Life Saving NSW, branche locale d’un réseau de clubs de sauveteurs bénévoles et professionnels. «Terrible tragédie» «Pour le moment, merci de rester hors de l’eau sur les plages environnantes et de suivre les consignes des maîtres-nageurs et sauveteurs», a déclaré le directeur général de l’organisation, Steven Pearce. «Nous adressons nos plus sincères condoléances à la famille de l’homme touchée par cette terrible tragédie». Les clubs de sauvetage voisins ont annulé toutes les activités et entraînements nautiques pour le week-end. Des drones et des sauveteurs sur des jets skis surveillaient les plages à la recherche de la présence de requins. Il s’agit de la première attaque mortelle de requin à Sydney depuis 2022, lorsque Simon Nellist, un moniteur de plongée britannique de 35 ans, avait été tué au large de Little Bay. La précédente attaque fatale dans la ville remontait à 1963. Un surfeur anonyme a déclaré au Sydney Daily Telegraph avoir été témoin des suites de l’attaque : «Quatre ou cinq surfeurs l’ont sorti de l’eau et il semblait qu’une partie importante de la partie inférieure de son corps avait été attaquée», a-t-il dit. Les gens ont été sommés de sortir de l’eau, a-t-il raconté. «Il y avait un sauveteur qui agitait un drapeau rouge. Je ne savais pas ce que cela signifiait... mais j’ai pensé que je devais probablement rentrer à terre». La dernière attaque mortelle en Australie remonte à mars, lorsqu’un surfeur avait été tué au large de la plage isolée de Wharton Beach, en Australie-Occidentale. Depuis 1791, plus de 1.280 incidents impliquant des requins ont été recensés en Australie, dont plus de 250 mortels, selon une base de données sur les rencontres entre ces squales et les humains. David WILLIAMS © Agence France-Presse -
Anthropic règle un litige majeur sur le droit d’auteur en IA avec un accord à 1,5 milliard de dollars
New York - La start-up américaine d’intelligence artificielle (IA) Anthropic a accepté de verser au moins 1,5 milliard de dollars à un fonds d’indemnisation d’auteurs, ayants droit et éditeurs qui poursuivaient l’entreprise pour avoir téléchargé illégalement des millions de livres, selon un document de justice publié vendredi. Cet accord à l’amiable, d’un montant colossal, constitue une étape marquante dans le débat sur l’utilisation de données pour développer et entraîner les grands modèles d’IA générative. «Cet accord historique est le plus élevé pour une affaire de droits d’auteur», a commenté auprès de l’AFP l’avocat des détenteurs de droits, Justin Nelson, du cabinet Susman Godfrey. «C’est le premier de son genre dans l'ère de l’IA». Fin juin, le juge californien saisi du dossier avait néanmoins estimé que le fait d’alimenter un logiciel d’IA générative avec des oeuvres en théorie protégées par le droit d’auteur ne constituait pas une infraction. Il avait seulement retenu contre Anthropic le téléchargement et le stockage de livres issus de librairies pirates en ligne, reconnaissant la société californienne coupable de ne pas avoir acheté ces ouvrages. «Nous sommes en désaccord avec l’opinion du tribunal selon laquelle on peut séparer le téléchargement d’une oeuvre de son utilisation», a indiqué une porte-parole d’Anthropic. Mais «nous pensons que cet accord va nous permettre de nous concentrer sur notre mission essentielle, plutôt que sur un long contentieux», a-t-elle ajouté. Le montant sur lequel se sont accordées les parties sera au minimum de 1,5 milliard de dollars et pourrait augmenter si la liste définitive des livres concernés, qui n’est pas encore arrêtée, dépassait 500.000, auquel cas Anthropic verserait 3.000 dollars de plus par ouvrage. L’accord doit encore être homologué par le juge William Alsup. Une audience est prévue lundi au tribunal fédéral de San Francisco. «Un début» Cette transaction permet à Anthropic d'éviter un procès, qui devait démarrer début décembre pour déterminer le montant des dommages et intérêts. La start-up risquait d'être condamnée à débourser une somme bien supérieure à celle décidée avec les détenteurs de droit, au point de mettre en péril son existence même. L’accord «va assurer à chaque (plaignant) une indemnisation significative», a fait valoir Justin Nelson, «et il établit un précédent en matière de paiement des détenteurs de droits.» De nombreux autres dossiers sont encore en cours devant des tribunaux américains, initiés par des écrivains, musiciens ou éditeurs de presse pour utilisation non autorisée de leur production. Vendredi, deux écrivains ont lancé un recours, qu’ils souhaitent collectif, contre Apple, accusant le géant de la Silicon Valley d’avoir utilisé des oeuvres contenues dans des bibliothèques pirates pour entraîner les modèles d’IA intégrés dans ses appareils. La plupart des grands acteurs de l’IA générative s’appuient sur la notion juridique d’utilisation équitable («fair use» en anglais), susceptible de limiter l’application du droit de propriété intellectuelle. Dans sa décision de juin, le juge Alsup avait estimé qu’en entraînant ses modèles d’IA, baptisés Claude, avec des milliers de livres, Anthropic s’inscrivait dans le cadre de l’utilisation équitable. «Le principe juridique selon lequel le développement de l’IA sur des oeuvres protégées relève d’une utilisation équitable demeure intact», a souligné la porte-parole d’Anthropic. Cet accord «ne fait que régler un différend sur la façon dont certains documents ont été obtenus», a-t-elle poursuivi. En juin, dans une autre affaire de ce type, concernant Meta, devant la même juridiction, un autre magistrat fédéral avait donné raison au géant des réseaux sociaux, mais tout en expliquant que les plaignants auraient pu soulever des arguments recevables. Les créateurs de contenu, qu’il s’agisse de musique, de livres ou d’articles, s’inquiètent de voir la valeur marchande de leur travail s’effondrer avec l'émergence des interfaces d’IA générative. «Nous espérons qu’il s’agisse du premier exemple d’une longue série de sociétés d’IA à qui on demande des comptes pour le vol de contenu créatif», a réagi l’organisation Human Artistry Campaign, qui milite pour un développement responsable de l’IA. «Ce n’est qu’un début», a écrit l’association sur X, «mais il est marquant et historique.» Thomas URBAIN © Agence France-Presse -
Donald Trump rebaptise le Pentagone en « ministère de la Guerre » pour afficher la puissance américaine
Washington - Donald Trump a signé vendredi un décret visant à rebaptiser le ministère américain de la Défense en «ministère de la Guerre», ajoutant qu’il voulait par là envoyer un «message de victoire» et «de force» au reste du monde. Le président américain a laissé entendre qu’il pouvait se passer d’un vote du Congrès pour procéder à ce changement d’appellation. «Les mots comptent», a dit le chef du Pentagone Pete Hegseth, présent aux côtés de Donald Trump dans le Bureau ovale, assurant que cette nouvelle appellation devait permettre de «restaurer une éthique guerrière». Formellement, il s’agit pour l’instant d’une appellation «supplémentaire», selon un document distribué dès jeudi par la Maison Blanche. Un haut responsable du ministère a indiqué que le coût de cette opération, potentiellement très dispendieuse, deviendrait «plus clair» au fur et à mesure de sa mise en place. Peu après la signature du décret présidentiel, les mots «ministère de la Défense» ont été immédiatement retirés d’un mur dans le Pentagone, devant des caméras de télévision. Le site du ministère a été renommé et Pete Hegseth se présente désormais comme «ministre de la Guerre» sur X. «Nous allons soumettre (ce changement de nom) au Congrès», a prévenu Donald Trump. «Je ne sais pas (si les parlementaires voteront en ma faveur, ndlr), nous verrons bien, mais je ne suis pas sûre qu’ils aient besoin de le faire». «Trop défensif» Ce n’est pas la première fois que le républicain de 79 ans impose ses idées sans passer par la case législative. Son second mandat est marqué par une volonté assumée d'étendre le pouvoir présidentiel, à coups de décrets et de décisions empiétant sur les prérogatives du Congrès. Il a signé vendredi son 200e décret depuis son retour à la Maison Blanche en janvier. Le président des Etats-Unis avait déjà fait part de ce projet qui restaurerait une appellation ayant existé de 1789 à 1947. «Défense, c’est trop défensif, et nous voulons aussi être offensifs», avait-il déclaré. Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump a mobilisé l’armée pour imposer une image de puissance spectaculaire et combler son appétit de fastes militaires. Il a organisé un rare défilé le jour de son anniversaire, déployé la Garde nationale dans des villes dirigées par ses opposants, et ordonné une frappe exceptionnelle sur un bateau dans les Caraïbes dans le cadre de la lutte affichée contre le narcotrafic. Les démocrates dénoncent régulièrement ce recours aux militaires, révélateur selon eux d’une dérive autoritaire. Contre le «politiquement correct» Le président américain avait eu pendant son premier mandat une relation plutôt contrariée avec l’armée. Son ancien chef d'état-major, le général Marc Milley, l’a qualifié d’"aspirant dictateur». Des articles de presse avaient également attribué à Donald Trump des propos méprisants pour des militaires américains morts au combat. Cette fois, le dirigeant républicain a remanié l'état-major américain pour s’entourer de hauts gradés choisis par ses soins, et a nommé en la personne de Pete Hegseth un ministre à la loyauté farouche. Le chef du Pentagone, adepte d’un discours viriliste et d’opérations de communication musculeuses, a dit vendredi que l’objectif de l’armée américaine était d’atteindre «une létalité maximale, pas une létalité tiède». Il a dit vouloir aller à l’encontre du «politiquement correct». Aurélia END © Agence France-Presse