
Le défi climatique pourrait rebattre les cartes dans le transport aérien

Si la pandémie de Covid-19 a fortement pénalisé le transport aérien, la gestion de sa transition énergétique représente un enjeu plus important à moyen terme. C’est l’un des principaux enseignements du rapport publié mercredi conjointement par le bureau d’analyse CAPA (Center for Aviation) et Envest Global, société spécialisée dans les stratégies de réduction des émissions de dioxyde de carbone (CO2). Etabli à partir d’une enquête réalisée auprès de 52 compagnies aériennes et d’une centaine d’entreprises qui réalisent de nombreux voyages d’affaires, ce rapport montre que 75% de ces entreprises se sont engagées à réduire à zéro leurs émissions nettes de CO2 d’ici à 2030. Mais le processus d’ajustement du secteur aérien sera nettement plus lent, puisque l’Association internationale du transport aérien (IATA), qui regroupe plus de 290 compagnies, a annoncé début octobre qu’elle comptait y parvenir à l’horizon 2050.
«L’activisme des actionnaires et des autres parties prenantes est grandissant envers les compagnies aériennes», constate Brett Mitsch, directeur exécutif d’Envest Gobal, ajoutant que les investisseurs «exigent davantage d’informations et de transparence de la part de toutes les sociétés du secteur dans lesquelles ils détiennent une participation». En conséquence, certaines compagnies, sans moyens financiers suffisants pour accélérer leur plan de lutte contre le réchauffement climatique, sont susceptibles de déposer le bilan d’ici trois à cinq ans. A cette échéance, le rapport estime que «les systèmes de compensation carbone destinés au transport aérien deviendront probablement non rentables, inaccessibles ou inacceptables» en raison de l’augmentation du coût de cette compensation. Cette hausse découlera de règles d’éligibilité plus strictes et d’un besoin plus important de décarbonation.
L’âge des flottes d’avions est important
En se référant aux volumes de CO2 émis en 2019 par l’ensemble du secteur, les compagnies les plus polluantes, à savoir United Continental, Delta et American Airlines, sont toutes les trois américaines, avec plus de 40 millions de tonnes émises par chacune d’entre elles. Elles sont suivies par Emirates et par des transporteurs chinois (China Southern, Air China et China Eastern). Lufthansa et British Airways figurent aussi parmi les dix compagnies les moins vertueuses, tandis qu’Air France, KLM et Ryanair arrivent respectivement à la 13e, 19e et 20e place. A l’autre extrémité du spectre, on trouve plusieurs compagnies régionales ou à bas coûts comme Croatian Airlines, Silk Air (fusionné cette année avec Singapore Airlines), Aegean, Brussels Airlines ou Wizz Air, qui émettent de très faibles quantités de carbone.
Globalement, le quartile supérieur des 52 compagnies aériennes examinées a émis en moyenne 30% de moins par passager-kilomètre parcouru en 2019 que celles du quartile inférieur. L’ancienneté des flottes d’avions joue un rôle important dans ces émissions. «Si l’âge moyen des avions utilisés en 2019 avait été réduit d’un an, les émissions de CO2 des transporteurs aériens à l’échelle mondiale auraient été réduites d’environ 40 millions de tonnes, soit 4,5%», indique le rapport, en soulignant le manque de données disponibles sur les émissions du fret aérien qui représente environ 12% des volumes transportés. Alors queJapan Airlines (JAL), situé au milieu de ce classement, a pu atteindre son seuil de rentabilité avec un prix du carbone de plus de 160 dollars par tonne sur la base des comptes 2019, de nombreuses compagnies ayant des marges bénéficiaires plus faibles auraient enregistré une perte à un prix du carbone de seulement 30 dollars par tonne.
Les vols court et moyen-courriers épinglés en Europe
Les compagnies européennes à bas coûts pourraient d’autre part être confrontées à une baisse future du trafic si Bruxelles va dans le sens des recommandations de Greenpeace. L’organisation non gouvernementale a appelé mercredi l’Union européenne à interdire les voyages par avion lorsqu’une alternative par le rail permet d’accomplir le même trajet en moins de six heures. Selon ses calculs, les avions émettent en moyenne cinq fois plus de CO2 que les trains sur des trajets similaires. Si les vols long-courriers sont responsables de la plus grande partie du volume d’émission de gaz à effet de serre, «les appareils court et moyen-courriers émettent davantage de CO2 par passager et par kilomètre en raison du carburant nécessaire pour le décollage», précise Greenpeace. L’organisation milite aussi en faveur de la fin des exemptions fiscales qui contribuent à faire baisser le prix des billets d’avions.
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L'armée israélienne appelle à l’évacuation de la ville de Gaza avant un assaut terrestre d’ampleur
Gaza - L’armée israélienne a appelé samedi matin les habitants de la ville de Gaza à l'évacuer vers une zone déclarée «humanitaire» plus au sud, en prévision d’un assaut au sol sur cette agglomération, la plus grande du territoire palestinien dévasté par près de 23 mois de guerre. Le colonel Avichay Adraee, porte-parole arabophone de l’armée, a lancé cet appel sur les réseaux sociaux alors que l’ONU, qui estime à environ un million les résidents de la région, a averti d’un «désastre» à venir en cas d’expansion de l’offensive sur Gaza-ville. L’armée israélienne, qui dit contrôler environ 75% de la bande de Gaza et 40% de cette agglomération, affirme vouloir s’en emparer pour venir à bout du Hamas et libérer les otages qu’il retient encore. L’appel à évacuer intervient après que le président américain, Donald Trump, a affirmé vendredi que les Etats-Unis étaient «en négociation approfondie avec le Hamas», dont l’attaque sans précédent en Israël le 7 octobre 2023 a déclenché la guerre. «Nous leur disons: +Libérez-les (otages NDLR) tous immédiatement», sinon «ça va être terrible», a-t-il dit. M. Trump a également avancé que certains des otages pourraient être «morts récemment». L’armée israélienne estime à ce stade que 25 des 47 captifs restants à Gaza - sur 251 enlevés le 7-Octobre - sont morts. Le mouvement islamiste palestinien avait donné son accord en août à une proposition de trêve et libération des otages présentée par les médiateurs (Egypte, Etats-Unis et Qatar). Le gouvernement de Benjamin Netanyahu exige qu’il rende les armes et dit vouloir prendre le contrôle sécuritaire de la bande de Gaza. «L’armée ment» Dans son message, le colonel Adraee précise que pour «faciliter le départ des habitants» de la ville de Gaza, le secteur côtier d’Al-Mawasi, dans le sud du territoire, est déclaré «zone humanitaire». Selon l’armée, cette zone comprend des «infrastructures humanitaires essentielles», et est approvisionnée «en nourriture, tentes, médicaments et équipements médicaux». Depuis le début de la guerre, qui a ravagé la bande de Gaza, désormais en proie à la famine sur 20% du territoire selon l’ONU, l’armée a souvent bombardé des zones déclarées «humanitaires» et «sûres», affirmant y viser des combattants du Hamas. «L’armée ment aux gens, quand nous allons chercher de l’aide (...) ils ouvrent le feu», s’indigne Abdelnasser Muchtaha, 48 ans, déplacé à l’ouest de la ville de Gaza après avoir quitté son quartier pilonné de Zeitoun. Il affirme vouloir «pour l’instant» rester sur place. Déja déplacé à Al-Mawasi, avec sa famille, Bassam al-Astal, 52 ans, assène que la zone n’est «ni humanitaire ni sûre». «C’est là qu’il y a chaque jour le plus de martyrs, il n’y a pas de place pour les tentes, pas de services humanitaires, pas d’eau, pas d’assainissement, pas d’aide alimentaire», dit-il. Vendredi, l’armée israélienne a encore intensifié ses opérations dans la ville de Gaza bombardant, après un appel à évacuer, une tour d’immeuble dans le centre, qui s’est écroulée comme un château de cartes. Selon l’armée, le Hamas y avait installé «des infrastructures» pour «préparer et mener des attaques» la visant. Elle avait auparavant prévenu qu’elle ciblerait «dans les jours qui viennent» des «infrastructures terroristes», en particulier dans des tours d’immeubles. Le Hamas a rejeté comme «des prétextes fallacieux et des mensonges éhontés» les affirmations d’Israël selon lesquelles il utilisait ces bâtiments. «Propagande diabolique» La Défense civile du territoire palestinien, où le Hamas a pris le pouvoir en 2007, a fait état de 42 personnes tuées vendredi par des tirs ou bombardements israéliens, dont la moitié dans la ville de Gaza. Compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d’accès sur le terrain, l’AFP n’est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les bilans de la Défense civile. Le Hamas a dans le même temps diffusé une vidéo montrant deux otages - Guy Gilboa-Dalal et Alon Ohel - au moment où les proches et soutiens de ces captifs se mobilisaient à travers Israël pour marquer leurs 700 jours de détention et réclamer leur retour. La séquence montre M. Gilboa-Dalal demandant à M. Netanyahu de ne pas mener d’offensive dans la ville de Gaza. «Aucune vidéo de propagande diabolique ne nous affaiblira ni n'émoussera notre détermination», a réagi le Premier ministre israélien, après s'être entretenu avec les parents des deux hommes, selon son bureau. L’attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles. Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.300 morts à Gaza, en majorité des femmes et des enfants, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l’autorité du Hamas, dont les chiffres sont jugés fiables par l’ONU. Equipe de l’AFP dans la bande de Gaza © Agence France-Presse -
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