
Le soutien de l’Etat actionnaire à Valeo est avisé, mais contradictoire

Bpifrance s’installe à nouveau dans le siège passager de Valeo. La banque publique a annoncé hier détenir en direct 5,2% du capital de l'équipementier automobile, qu’elle souhaite accompagner «sur le long terme». En ajoutant ses 2,14%, la Caisse des dépôts, actionnaire de Bpifrance, possède désormais directement et indirectement 7,34% du capital de Valeo (8,5% des droits de vote), ce qui fait de l’Etat le premier actionnaire du groupe.
Ce retour de la banque publique, trois ans après avoir quitté le capital de l’industriel, est justifié pour plusieurs raisons. Valeo est bien positionné sur des marchés promis à une forte croissance, mais souffre d’une visibilité limitée à court terme, notamment en Chine. Le titre a perdu plus de la moitié de sa valeur en 2018, conséquence de plusieurs avertissements sur résultats. Tout investisseur avisé peut y voir une opportunité. A fortiori Bpifrance, dont le précédent investissement au capital de l'équipementier, entre 2009 et 2016, s'était soldé par une plus-value de plusieurs centaines de millions d’euros.
Valeo peut également, à raison, être considéré comme une entreprise stratégique, compte tenu de ses positions fortes dans le domaine de la voiture électrique et autonome. Premier déposant de brevets en France, ses technologies sont présentes dans la plupart des programmes des constructeurs liés à ces deux révolutions. Dans un secteur en proie à une nouvelle vague de consolidation, illustrée par le rachat de l’italien Magneti Marelli par KKR et par les discussions entre plusieurs grands constructeurs, ces technologies pourraient aiguiser les appétits.
Contrer les appétits activistes et étrangers
En devenant le principal actionnaire de Valeo, avec à la clé un siège au conseil d’administration de Valeo, l’Etat vise à protéger le groupe d’une éventuelle prise de contrôle par un acteur étranger. Il espère également dissuader d'éventuels investisseurs activistes, ainsi que les vendeurs à découvert dont les actions pourraient déstabiliser la marche de l’entreprise. Avec 7,15% de son capital prêté aux vendeurs à découvert, Valeo restait la valeur la plus shortée du CAC 40 en fin de semaine dernière, selon IHS Markit.
Mais en montant ainsi au front, l’Etat actionnaire joue à nouveau les équilibristes. Destinée à accompagner en priorité les PME et ETI de croissance, Bpifrance a, au cours des dernières années, renforcé sa présence au capital de grandes capitalisations en difficulté comme Vallourec et TechnipFMC. L’intérêt stratégique et financier de ces investissements peut être débattu. «Si l’adaptation des interventions de la banque publique par rapport au strict cadre de sa doctrine est normale et souhaitable en fonction des évolutions de la conjoncture économique et financière, il demeure que le dimensionnement du portefeuille de participations de Bpifrance dans les moyennes et grosses capitalisations paraît élevé au regard de la nature des nouveaux investissements réalisés dans des ETI de croissance», estimait la Cour des Comptes dans son rapport sur l’Etat actionnaire, publié en 2017.
Il semble en outre illusoire de vouloir protéger les entreprises françaises de la montée en puissance des investisseurs activistes en Europe. Le patron de Bpifrance, Nicolas Dufourcq, a lui-même reconnu qu’avec environ 2 milliards d’euros de liquidités disponibles, la banque se retrouverait vite à court de munitions en cas de «vague» de prises de participations de ces fonds dans les sociétés tricolores.
A l’heure où l’Etat tente de faire le ménage dans son portefeuille de participations via la privatisation d’un opérateur aéroportuaire et d’une loterie nationale, il devra également se montrer sélectif dans ses investissements. Restreindre son champ d’intervention aux secteurs stratégiques et aux sociétés les plus innovantes serait un bon début.
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Wall Street conclut en ordre dispersé avant la Fed la semaine prochaine
Washington - La Bourse de New York a terminé en ordre dispersé vendredi, tournée vers la réunion de la Réserve fédérale (Fed) la semaine prochaine, qui devrait aboutir à une baisse de taux pour la première fois de l’année. Le Dow Jones a perdu 0,59%, l’indice Nasdaq a pris 0,44% et l’indice élargi S&P 500 a clôturé non loin de l'équilibre (-0,05%). «Il n’y a pas eu de donnée économique aujourd’hui et nous sommes en pleine période de silence de la Fed, donc sans commentaire susceptible d’influencer le marché», commente auprès de l’AFP Christopher Low, de FHN Financial. Certes, les investisseurs ont accueilli en début de séance un indice de confiance des consommateurs inférieur aux attentes. Mais «cela correspond à ce que nous avons observé dans d’autres enquêtes et dans les mesures de l’activité économique: le marché de l’emploi est très faible», estime M. Low. C’est précisément ce constat qui devrait pousser la banque centrale américaine à assouplir sa politique monétaire afin de donner un coup de fouet à l'économie. Le comité de politique monétaire (FOMC) se réunira à partir de mardi, et rendra sa décision quant à l'évolution des taux le lendemain. Les analystes sont unanimes: les taux directeurs de la Fed devraient diminuer d’un quart de point de pourcentage la semaine prochaine, la première baisse depuis décembre 2024. Wall Street a «intégré la baisse de taux», assure Christopher Low. Mais la place américaine «ne sait pas quel type d’orientation nous allons obtenir». A l’issue de la réunion mercredi, «nous aurons de nouvelles prévisions économiques de la Fed» ce qui permettra aux investisseurs «d'évaluer le nombre de baisses qu’elle envisage à l’avenir», anticipe l’analyste. Sur le marché obligataire, le rendement des emprunts d’Etat américains à échéance 10 ans se tendait à 4,06% vers 20H25 GMT contre 4,02% la veille en clôture. A la cote, Microsoft (+1,77% à 509,90 dollars) a gagné du terrain, profitant de l’accord préliminaire avec OpenAI, à l’origine de ChatGPT. Microsoft est à la fois un actionnaire minoritaire et un partenaire commercial privilégié d’OpenAI dans lequel il a investi environ 13 milliards de dollars. Le fabricant de semi-conducteurs Micron a atteint un plus haut historique, à 157,23 dollars (+4,42%), après que les analystes de Citi ont relevé leurs anticipations sur le prix du titre de l’entreprise. Le groupe de médias Warner Bros Discovery a connu une deuxième journée d’envolée (+16,70% à 18,87 dollars) après des informations de presse publiées la veille assurant que son concurrent Paramount Skydance pourrait le racheter, et former ainsi un mastodonte du divertissement. La plateforme Gemini, spécialisée dans les cryptomonnaies, a connu une belle progression pour sa première journée à Wall Street. Fondée en 2014 par les frères jumeaux Cameron et Tyler Winklevoss, rendus célèbres par le film «The Social Network» sur la naissance de Facebook, l’entreprise avait fixé le prix de son action à 28 dollars pour son introduction en Bourse. Elle a finalement clôturé à 32,00 dollars vendredi. L’exploitant de parcs d’attractions Six Flags Entertainment (+7,77% à 23,45 dollars) profitait de l’annonce d’une fréquentation en hausse pour la période estivale et d’une forte demande pour les vacances à venir, notamment autour d’Halloween et Noël. Nasdaq © Agence France-Presse -
Astrid Panosyan-Bouvet visée par une plainte autour d'un redressement fiscal évité à une entreprise
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Etats-Unis : ce que l'on sait de Tyler Robinson, l'assassin présumé de Charlie Kirk
Washington - Tyler Robinson, assassin présumé du militant conservateur américain Charlie Kirk, a été arrêté jeudi soir et identifié publiquement vendredi par les autorités américaines. Voici ce que l’on sait de lui. Aîné d’une fratrie de trois enfants dans le sud de l’Utah Tyler Robinson, 22 ans, vivait «depuis longtemps avec sa famille dans le comté de Washington», à l’extrémité sud-ouest de l’Utah, près de la frontière avec le Nevada et l’Arizona, a indiqué le gouverneur de l’Etat, Spencer Cox. Il a fait ses études primaires et secondaires dans la ville de St George et n’a pas de casier judiciaire dans l’Etat, selon les médias américains. «Pendant 33 heures, j’ai prié pour que (...) ce ne soit pas l’un d’entre nous, mais quelqu’un venu d’un autre Etat ou d’un autre pays», a confié vendredi le gouverneur au sujet du meurtrier présumé de Charlie Kirk, tué d’une balle dans le cou mercredi lors d’un débat public sur un campus universitaire. «Mais cela s’est passé ici, et c'était l’un d’entre nous», a-t-il reconnu. Des photos publiées sur les réseaux sociaux de sa mère, Amber, semblent montrer une famille unie. Tyler Robinson était l’aîné de trois garçons. Après sa sortie du lycée en 2021, il a «brièvement étudié à l’Université d’Etat de l’Utah pendant un semestre en 2021", selon cet établissement. Aucune affiliation politique connue Tyler Robinson est un électeur enregistré dans cet Etat majoritairement républicain mais il n’a aucune affiliation politique connue. Un membre de sa famille a néanmoins témoigné que «Robinson était devenu plus politisé ces dernières années», a souligné le gouverneur Cox. Ce membre de la famille a fait état d’une récente conversation avec un parent au cours de laquelle Tyler Robinson avait mentionné la prochaine venue de Charlie Kirk dans l’Utah et partagé son hostilité à sa personne et à ses opinions, très conservatrices. Des messages à tonalité antifasciste ont été retrouvés sur les munitions découvertes après l’assassinat, a indiqué Spencer Cox. «Sur des inscriptions sur les trois munitions non utilisées on pouvait lire +Eh fasciste! Attrape ça!», a expliqué le gouverneur. Une deuxième douille était gravée du refrain de la célèbre chanson antifaciste «Bella ciao» mais d’autres inscriptions paraissaient plus difficiles à interpréter, dont des symboles inspirés de l’univers des jeux vidéo. Dénoncé par des membres de sa famille Tyler Robinson a été signalé aux autorités par des membres de sa famille. Jeudi soir, selon le gouverneur «un membre de la famille» du suspect a joint un ami, lequel a ensuite contacté les autorités pour les informer que «Robinson leur avait avoué ou laissé entendre son implication» dans l’assassinat. «C’est là qu’il vivait et c’est là qu’ils l’ont remis aux autorités», a indiqué M. Cox. Il a été appréhendé jeudi soir vers 22H00 locales (04H00 GMT vendredi) après 33 heures de traque, selon le directeur de la police fédérale (FBI), Kash Patel. Selim SAHEB ETTABA © Agence France-Presse