Les «swap spreads» ne réagissent pas normalement au resserrement monétaire

Cette mesure du risque de crédit par les marchés de taux a un impact direct sur le coût du financement obligataire.
Fabrice Anselmi

Le Bund-swap spread n’a pas réagi normalement au resserrement monétaire entrevu le 3 février. Cette mesure du risque de crédit correspond à la différence entre le taux de rendement de l’emprunt d’Etat allemand - ou d’autres titres souverains sûrs - et le taux payé sur la «jambe» à taux fixe d’un contrat de swap - a priori par des signatures moins sûres. Normalement, quand la Banque centrale européenne (BCE) achète des titres souverains mais pas les swaps correspondants, le rendement du Bund baisse et les «swaps spreads» s’écartent. A l’inverse, ces derniers auraient dû se resserrer quand la BCE a laissé entendre qu’elle pourrait arrêter ses achats afin de remonter ses taux plus rapidement. Or c’est le mouvement opposé qui s’est produit, sans s’atténuer avec la crise en Ukraine et le rallye sur le Bund.

En un peu plus d’un mois, les swap spreads se sont écartés sur toutes les maturités : de 30 à 45 points de base (pb) à 1 an, de 37 à 68 pb à 2 ans, de 47 à 71 pb à 5 ans, de 51 à 75 pb à 7 ans, etc. «C’est un signe que les banques ne valorisent pas les mêmes hausses de taux courts que les marchés de swaps qui ont tendance à anticiper un resserrement monétaire encore plus rapide, expliquent Olivier de Larouzière et Arnaud-Guilhem Lamy, directeur des gestions fixed income et responsable des stratégies taux euro aggregate chez BNP Paribas AM. C’est sans doute aussi dû à la rareté du collatéral en ‘taux souverains’ (déjà constatée sur les marchés monétaires en euros en décembre, ndlr), et cela va compter pour la normalisation du marché du crédit le reste de l’année.»

En effet, les crédits aux entreprises sont valorisés à partir des swaps de taux auxquels s’ajoute le spread de crédit en pb. Le fait que les swaps de taux se soient écartés davantage que les taux eux-mêmes a déjà eu un impact négatif sur le marché de crédit. «Ce marché pourrait encore souffrir sur la zone 5-7 ans, avec un afflux d’émissions de banques qui pourrait arriver avec la fin du taux d’emprunt préférentiel de -1% sur les opérations de financement à long terme (TLTRO) de la BCE en juillet», poursuit Arnaud-Guilhem Lamy. Sans compter des facteurs potentiellement aggravants : un nouvel écartement des spreads à cause de la fin des achats BCE, des conditions financières durcies ou encore des risques de crédit croissants. A moins que le marché ne retrouve une forme de logique avec des swaps qui bougeraient moins que les rendements obligataires pendant la normalisation monétaire.

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