
Les «Panama papers» embarrassent les banques

Après les «Luxembourg Leaks», qui dévoilaint fin 2014 les rescrits fiscaux bénéficiant à certaines multinationales, et les «Swiss Leaks», qui révélaient en février 2015 le système d’évasion fiscale mis en place par HSBC, le Consortium international pour le journalisme d’investigation (ICIJ) a publié dimanche ses premiers articles sur les «Panama papers». Cette manne de 11,5 millions de documents portant sur des données de 1977 à 2015 met en cause de nombreuses personnalités politiques, économiques et sportives dans le monde pour avoir mis en place des sociétés offshore dans des paradis fiscaux.
Si la pratique n’est en elle-même pas illégale, ce que les banques incriminées pour avoir fait appel au cabinet d’avocats panaméen Mossack Fonseca, chargé de la création des sociétés écrans, ont rappelé tout au long de la journée de lundi, elle peut permettre, via leur domiciliation dans des juridictions non-coopératives, de cacher des informations aux administrations fiscales concernées. Parmi les dix banques les plus actives auprès du cabinet d’avocats révélées par l’ICIJ, sur un total de 511, on retrouve les suisses Credit Suisse, UBS et J. Safra Sarasin, notamment via leurs filiales de banque privée, ainsi que HSBC.
Du côté des banques françaises, la filiale de Rothschild & Co sise à Guernesey aurait demandé aux avocats panaméens d’enregistrer 378 compagnies. La filiale de banque privée luxembourgeoise de Société Générale aurait fait appel à leurs services en 465 occasions.
Les autorités fiscales de nombreux pays ont déjà annoncé vouloir lancer des enquêtes sur la base de ces révélations, notamment en France, en Australie, au Royaume-Uni et en Suisse. La Finma, l’autorité de surveillance des marchés financiers suisse et ses consœurs suédoise et autrichienne ont par ailleurs déclaré vouloir enquêter sur le rôle joué par leurs banques domestiques, dont Nordea et Raiffeisen.
Si les banques impliquées pourraient être mises en cause pour ne pas avoir rempli leurs obligations de contrôle, c’est leur image qui risque d’être la première victime de ces révélations. Pour contenir les dommages, la Société Générale a par exemple mis en place une foire aux questions sur le sujet, puis a publié un communiqué pour affirmer respecter toutes les lois des pays dans lesquels elle opère, ajoutant participer à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales.
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Paris - Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d’en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise. Fitch ouvre le bal des revues d’automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette «haute ou bonne»), avec, pour certaines comme Fitch, une «perspective négative». Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité «moyenne supérieure»), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d’autant les remboursements de cette dette. Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG School of Management, une dégradation serait «logique». D’abord parce que la situation politique n’aide pas à mettre en œuvre «un plan crédible d’assainissement budgétaire», comme Fitch l’exigeait en mars. Mais aussi pour effacer «une incohérence» : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu’ils ont - à très peu d’exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024. Coup d’envoi Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l’espoir d’un budget 2026 présenté en temps et heure. Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi «plausible» que Fitch «attende davantage de visibilité politique» pour agir. D’autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n’ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que «la croissance résiste». L’Insee a même annoncé jeudi qu’en dépit du «manque de confiance» généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année. Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l’institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, «donne rarement le coup d’envoi» des dégradations. Mais il estime «très probable» que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre. Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l’an prochain, contre les 4,6% qu’espérait François Bayrou. Les économistes affirment cependant qu’une dégradation ne troublerait pas les marchés, «qui l’ont déjà intégrée», relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade. Syndrome La dette française s’y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l’espace d’une journée, mardi, le taux de la dette italienne. Les marchés donnent déjà à la France une «notation implicite» bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie. Il craint des taux qui resteraient «durablement très élevés», provoquant «un étranglement progressif», avec des intérêts à rembourser captant «une part significative de la dépense publique, alors qu’on a des besoins considérables sur d’autres postes». L'économiste décrit une France en proie au «syndrome du mauvais élève». «Lorsqu’on avait 20/20», explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu’a toujours l’Allemagne - «on faisait tout pour s’y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu’on est au-dessus de la moyenne, c’est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!», dit-il à l’AFP. Pour autant, même abaissée à A+, «la dette française resterait de très bonne qualité», relativise M. Camatte, préférant souligner «la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine». Odile DUPERRY © Agence France-Presse -
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