
L’économie britannique recueille un nouveau soutien budgétaire
Un nouveau soutien budgétaire. Les marchés ont accueilli la présentation du budget britannique, mercredi, avec une hausse des taux à 10 ans de 10 points de base (à 0,78%) qui témoigne à la fois de l’espoir de croissance qui en découle et des craintes sur la dette future du Royaume-Uni. Du côté de la livre sterling, l’aspect positif semblait prédominer avec une légère hausse face au dollar (1,398), quand l’euro-livre diminuait un peu (0,863).
Après avoir annoncé les prévisions de croissance de l’Office for Budget Responsibility (OBR), désormais à 4% pour 2021 et 7,3% pour 2022 après une contraction de 9,9% en 2020, le ministre des Finances Rishi Sunak a en effet présenté un budget pour l’année fiscale 2021-2022 qui débute en avril de 1.053 milliards de livres pour 828 milliards de recettes fiscales. Soit un déficit supérieur à 15% encore largement financé par la dette, 234 milliards nets après un montant record de 355 milliards empruntés en2020-2021, et donc un nouveau programme de soutien face à la crise.
Aujourd’hui et demain
Le chancelier de l’Echiquier a reconnu que le Covid-19 a causé des dommages «aigus» à l’économie britannique et qu’il faudrait «beaucoup de temps pour se remettre de cette situation extraordinaire». Pour faire face à l’urgence, il a alloué 65 milliards supplémentaires (sur un total de 407 milliards engagés dans cette crise), dont 44 milliards (2% du PIB) au soutien à court terme des salariés et des entreprises.
Parmi les aides aux salariés, Rishi Sunak a confirmé une prolongation (pour 7 milliards de livres) du régime de chômage partieljusqu’à fin septembre - «ce qui devrait limiter la hausse du chômage à 6,5%», estime James Smith chez ING -, des mesures de soutien aux travailleurs indépendants (12,8), et aux ménages via le complément de 20 livres jusqu'à fin septembre sur l’allocation Universal Credit (2,2). L’annulation des droits de mutation est prolongée (pour 1,35 milliard) jusqu'à fin juin sur les achats résidentiels inférieurs à 500.000 livres et fin septembre au-dessous de 250.000 livres.
Dans le paquet pour les entreprises, le ministre a révélé des subventions aux secteurs les plus touchés (pour 5 milliards et jusqu’à 18.000 livres par entreprise), des déductions fiscales particulières (6,8 milliards) et une réduction de la TVA prolongée jusqu’en septembre pour les secteurs hôtellerie-tourisme (4,7 milliards). «La bonne nouvelle est que la plupart des mesures vont aller au-delà des périodes de restrictions et de confinement», explique Henry Cook, économiste de MUFG Bank, ce qui éviterait des faillites et licenciements prématurés comme cet automne au début de la deuxième vague.
Deux autres mesures fortes concernent l’investissement. Pour le soutenir, Rishi Sunak a dévoilé un système de «super déduction» devant permettre aux entreprises de réduire pendant deux ans leur facture fiscale de 130% du coût de leurs nouveaux investissements, au lieu de 26% avec les règles existantes. Le coût cumulé pour l’Etat sera d’au moins 25 milliards les deux premières années. Le ministre a expliqué aux députés que cette décision soutenue par l’OBR devrait stimuler l’investissement des entreprises d’environ 10%, soit 20 milliards de livres sterling par an, de quoi en faire un régime fiscal pour l’investissement «leader dans le monde», alors que les investissements ont chuté depuis le vote du Brexit en 2016 et que les entreprises sont assises sur une importante trésorerie.
Sur le même thème, une nouvelle banque publique, la UK Infrastructure Bank, avec un capital initial de 12 milliards et 10 milliards pour les garanties publiques, sera lancée au printemps à Leeds. Elle prendra en partie le relais des aides ciblées auparavant fournies par la Banque européenne d’investissement (BEI).
Surtout, cette présentation du budget aura donc été l’occasion d’annoncer un retour en arrière sur la fiscalité : avec un gel des seuils d’imposition sur le revenu en 2022-2025 – que certains analysent comme une manière déguisée d’augmenter les impôts -, et une augmentation progressive de l’impôt sur les sociétés (IS) de 19% à 25% des bénéfices à partir de 2023. Ce nouveau taux, présenté comme un moyen d’aider à rembourser la dette du Royaume-Uni (attendue à 97% du PIB en 2023-2024) puisqu’il rapporterait environ 17 milliards supplémentaires par an en rythme de croisière, resterait le plus faible taux du G7 si Joe Biden remonte comme prévu celui des Etats-Unis de 21% à 28% en 2022. «Le relèvement de l’impôt sur les sociétés (IS) arrive un peu tôt, et a surpris par son niveau alors qu’on parlait plutôt de 23%. Le gouvernement choisit un moment politique meilleur pour cette annonce - qui n’est cependant pas inscrite dans la loi et qui pourrait être retirée si elle ne s’avère finalement pas appropriée», poursuit Henry Cook, pour qui une croissance du PIB de 5% en 2021 pourrait être un autre moyen d’améliorer les finances publiques.
Green attitude
Le ministre des Finances a aussi évoqué d’autres avancées et rappelé le projet, en lien avec la nouvelle politique «verte» du gouvernement, d’émettre ses premières obligations vertes. Au moins deux «green Gilts», pour 15 milliards de livres, seraient placées en 2021. Rishi Sunak a en parallèle, toujours mercredi, écrit au gouverneur de la Banque d’Angleterre (BoE) pour en réactualiser le mandat de politique monétaire afin de refléter cette stratégie économique du gouvernement visant à parvenir à une croissance forte et équilibrée mais «également écologiquement soutenable et compatible avec la transition vers une économie zéro-carbone». La BoE, également attendue sur son accompagnement monétaire de ce budget, pourrait détailler ses intentions sur le sujet, par exemple en matière d’achats d’obligations corporates, dès sa prochaine réunion, le 18 mars.
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