
- Allocation d'actifs
- Tribune
La souveraineté européenne constitue une opportunité d’investissement

Les paysages politiques mondiaux connaissent actuellement de profonds changements. La pandémie de Covid, la guerre en Ukraine, les bouleversements du système commercial mondial, ou le conflit entre Israël et l’Iran, ont conduit à une nouvelle réalité dans laquelle les Etats européens, tant individuellement que collectivement, doivent réaligner leurs priorités et adopter un ton de plus en plus indépendant sur la scène politique et économique mondiale.
Ces changements, déjà en cours et qui devraient s’accélérer au cours des prochaines années, peuvent être observés sous le prisme d’une souveraineté européenne croissante, motivée par la nécessité d’atteindre une plus grande indépendance et une plus grande autonomie dans une série de secteurs stratégiques.
Les changements s’accélèrent
La pandémie de Covid a contraint les entreprises et les gouvernements à reconsidérer rapidement les chaînes d’approvisionnement à mesure qu’elles étaient perturbées, et la re-régionalisation ou la délocalisation proche sont devenues le mot d’ordre. L’importance grandissante de l’autonomie stratégique dans les agendas politiques et économiques s’est accrue avec l’invasion massive de l’Ukraine par la Russie. Elle a non seulement provoqué un choc commercial immédiat – lié à l’approvisionnement en énergie - mais a également fait peser une menace existentielle sans précédent sur de nombreux pays de l’Union européenne. L’expansion de l’Otan et les engagements de réarmement et de forte augmentation des budgets de défense ont rapidement suivi.
Le début du second mandat de Donald Trump a accéléré ces tendances. Tout d’abord, le désengagement de la guerre en Ukraine, et plus largement de l’Europe, a encore stimulé les dépenses européennes en matière de défense, notamment le programme «Préparation 2030" de l’UE et plusieurs initiatives similaires au niveau national. Deuxièmement, bien qu’il soit impossible de prédire la configuration finale des droits de douane, le «Liberation Day» de Donald Trump a conduit de nombreux secteurs en Europe à reconsidérer rapidement leurs perspectives stratégiques et leurs futurs moteurs de croissance. En effet, la souveraineté européenne est devenue un enjeu politique majeur pour de nombreux acteurs du monde des affaires et de la sphère politique.
Des vents contraires sectoriels
Le paysage économique européen a déjà beaucoup changé depuis le début de l’année. L’incertitude, la volatilité et les perspectives de plus en plus pessimistes aux Etats-Unis ont poussé les investisseurs à se tourner vers les actions européennes, les marchés locaux affichant des performances nettement supérieures à celles de leurs homologues outre-Atlantique. Parallèlement à ce facteur externe, l’impulsion donnée par le nouveau gouvernement allemand, qui s’est engagé à stimuler l’investissement, dont le besoin se fait cruellement sentir, a eu un impact positif sur l'économie européenne. L’augmentation des taux d’intérêt, ainsi que les engagements pris par l’UE d’accroître les dépenses de défense et de soutenir les industries stratégiques, contribuent également à renforcer le sentiment optimiste sur les marchés européens.
Si ces récents développements sont certainement les bienvenus, la voie que le continent est appelé à suivre au cours des prochaines années aura un effet plus durable et plus profond sur le marché des actions européennes. Si l’effet le plus visible et le plus intéressant de la souveraineté européenne croissante réside dans les vastes engagements de réarmement observés dans de nombreux pays, l’idée de souveraineté s'étend également à toute une série de secteurs stratégiques et s’accompagne d’autres mégatendances importantes telles que la transformation numérique et la transition énergétique.
Parallèlement à la défense, et sous l’impulsion de celle-ci, la réindustrialisation technologique offrira des opportunités dans l’aérospatial, les infrastructures et la cybersécurité, en favorisant les acteurs étant capables de tirer parti des développements rapides de l’intelligence artificielle, et de la technologie en général. La transition et le besoin d’autonomie énergétique stimuleront les investissements dans les technologies vertes, en particulier dans la mobilité durable, l’efficacité énergétique et le développement de l'économie circulaire.
Toutefois, d’autres secteurs devraient également en bénéficier. Par exemple, la biotechnologie et la santé bénéficieront de la restructuration des chaînes d’approvisionnement et de l'évolution vers l’autonomie européenne. Ces tendances stimuleront l’innovation et la croissance dans les secteurs de la finance et de l’assurance, afin de faciliter les flux de capitaux et l’indépendance financière des entreprises européennes.
Opportunités de marché
Du point de vue de l’investissement, la tendance séculaire de la souveraineté européenne présente des opportunités multisectorielles à moyen et long termes. Les éléments clés sont «les catalyseurs technologiques» - des entreprises ne se limitant pas aux secteurs traditionnels de la technologie ou de l’informatique, mais étant impliquées dans tous les aspects de la transition numérique, de la cybersécurité et de la défense, ainsi que de la transition écologique. Il est en effet essentiel d’identifier les entreprises qui deviendront les futurs champions européens, offrant un leadership mondial et une excellence dans des domaines clés. La souveraineté européenne reposera donc certainement sur les leaders actuels du marché, mais aussi sur les petites et moyennes capitalisations appelées à soutenir la transition du continent au cours des années et des décennies à venir.
Plus d'articles du même thème
-
La dominance budgétaire avance
La menace sur l’indépendance de la Fed et la crise politique française illustrent un affaissement des standards de politique économique dans le monde développé, explique Vincent Chaigneau, directeur de la recherche de Generali Investments. -
Les actions restent plébiscitées dans les portefeuilles des gérants
Les actifs risqués pèsent toujours 51% des allocations du Panel, même si un tiers des gestions ont renforcé leur poids, pour un quart d'entre elles qui l’ont allégé. -
EXCLUSIF
Figen AI lance la première plateforme d’intelligence artificielle de la pierre papier
SCPI.AI recense plus de 200 indicateurs sur 270 fonds immobiliers, avec un historique de données remontant à 2013.
ETF à la Une

Xtrackers lance un ETF sur la défense
- A la Société Générale, les syndicats sont prêts à durcir le ton sur le télétravail
- Revolut s’offre les services de l’ancien patron de la Société Générale
- Boeing essaie de contourner la grève en cours dans ses activités de défense
- Les dettes bancaires subordonnées commencent à rendre certains investisseurs nerveux
- Mistral AI serait valorisé 12 milliards d’euros par une nouvelle levée de fonds
Contenu de nos partenaires
-
Infrapolitique
« La crise du politique » – par Raphaël LLorca
La rupture entre les Français et la classe politique est tellement documentée et a fait l’objet de tellement de commentaires qu’on n’y prend plus vraiment garde, alors que la rupture est historique, souligne l'essayiste Raphaël LLorca dans sa chronique pour l'Opinion -
Incitation
Allemagne : les avantages fiscaux pour maintenir les retraités en activité sous le feu des critiques
Le chancelier Friedrich Merz veut permettre aux retraités de gagner jusqu'à 2 000 euros par mois totalement défiscalisés dès 2026 -
Népal: au moins 16 morts à Katmandou pendant une manifestation contre la censure des réseaux sociaux et la corruption
Katmandou - Au moins 16 personnes ont été tuées et une centaine blessées lundi dans la capitale népalaise Katmandou, lorsque la police a dispersé une manifestation contre le blocage des réseaux sociaux et la corruption du gouvernement. «Seize personnes sont malheureusement décédées selon un décompte auprès des hôpitaux. Une centaine d’autres ont été hospitalisées, dont des policiers», a annoncé à l’AFP un porte-parole de la de la police, Shekhar Khanal. Des affrontements étaient toujours en cours en fin d’après-midi dans les rues de Katmandou, où la police tentait de disperser le dernier carré des protestataires, selon des journalistes de l’AFP. Le gouvernement du Premier ministre KP Sharma Oli devait se réunir en urgence en soirée pour faire le point de la situation. Les forces de l’ordre sont intervenues lorsqu’une foule de plusieurs milliers de personnes s’est rapprochée du Parlement, dont elles avait bloqué l’accès, notamment avec des barbelés. Certains manifestants ont alors tenté de franchir le cordon de sécurité mis en place par la police. «Nous avons utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau quand les manifestants ont pénétré dans la zone interdite», a justifié auprès de l’AFP le porte-parole de la police. Selon des témoignages anonymes publiés par les médias locaux, la police a tiré à balles réelles sur la foule pour la contenir. L’AFP n’a pas été en mesure de confirmer immédiatement ces informations. Au moins trois des victimes ont succombé à leurs blessures à l’Hôpital civil de Katmanadou tout proche, qui a accueilli plus de 150 blessés, selon une porte-parole de l'établissement, Ranjana Nepal. «Je n’ai jamais vu un tel chaos à l’hôpital», a-t-elle dit à l’AFP. «Les gaz lacrymogènes se sont propagés dans les locaux et ont rendu difficile le travail des médecins». «Pratiques autoritaires» Le ministère népalais de la Communication et des Technologies de l’information a annoncé jeudi avoir ordonné le blocage de 26 plateformes, dont Facebook, Youtube, X et Linkedin, qui ne se sont pas enregistrées auprès de lui dans les délais. En application d’un arrêt rendu en 2023 par la Cour suprême, le ministère exige qu’elles nomment un représentant local et une personne chargée de la régulation de leurs contenus. Cette décision, qui a continué lundi à perturber de nombreuses activités, a convaincu de nombreux usagers en colère de descendre dans la rue. Les manifestants se sont rassemblés dans la matinée en brandissant des drapeaux nationaux et en chantant l’hymne national, avant de lancer des slogans hostiles au gouvernement. «Nous sommes là pour dénoncer le blocage des réseaux sociaux mais ce n’est notre seule motivation», a déclaré à l’AFP un étudiant, Yujan Rajbhandari, 24 ans, «nous dénonçons aussi la corruption institutionnalisée au Népal». «Cette décision traduit les pratiques autoritaires du gouvernement et nous voulons que ça change», a renchéri un autre, Ikshama Tumrok, 20 ans. Depuis l’entrée en vigueur du blocage, les plateformes encore en service, comme Tik Tok, sont inondées de vidéos mettant en cause la vie luxueuse des enfants de responsables politiques. «Il y a eu des mobilisations contre la corruption partout dans le monde, ils (nos dirigeants, ndlr) redoutent qu’il en soit de même ici», a commenté un autre protestataire, Bhumika Bharati. Dans une déclaration publiée dimanche, le gouvernement a démenti vouloir grignoter les libertés de pensée et d’expression et affirmé que sa décision visait à créer «un environnement destiné à leur protection et à leur libre exercice». Il a répété que le fonctionnement des plateformes visées serait rétabli sitôt le dépôt d’une demande d’enregistrement de leur part. Le blocage décrété jeudi n’est pas inédit. En juillet dernier, le gouvernement avait déjà suspendu la messagerie Telegram en raison, selon lui, d’une hausse des fraudes en ligne. Paavan MATHEMA © Agence France-Presse