
La SEC veut faciliter la compensation centralisée sur les bons du Trésor

La Securities and Exchange Commission (SEC) a proposé mercredi de modifier les règles de gestion des risques pour les chambres de compensation (CCP). Son objectif est de développer la compensation centralisée enregistrée sur les bons du Trésor américains (US Treasuries), «pour aider à garantir que ces marchés restent efficaces, compétitifs et résilients», a précisé le président du régulateur boursier, Gary Gensler, dans le communiqué.
«Si la compensation centralisée n’élimine pas tous les risques, elle les réduit certainement, ajoute-t-il. Il y a encore du travail à faire (...) sur une partie vitale de nos marchés de capitaux.» Gary Gensler s’appuie sur un rapport de 2021 du groupe de travail des régulateurs chargé de surveiller le marché des US Treasuries. Seulement 13% des transactions cash sont compensées de manière centralisée, contre 68% de compensations bilatérales - sans CCP interposée entre le vendeur et l’acheteur -, et 19% de compensations hybrides - avec une compensation centrale pour la «jambe» de la transaction traitée par une plate-forme «interdealer broker» et une compensation bilatérale pour l’autre. Gary Gensler a clairement fait comprendre qu’une partie de ces compensations ne sont, de fait, pas vraiment régulées en tant que telles.
Le marché des Treasuries, de 24.000 milliards de dollars, est devenu relativement moins liquide avec la réduction du bilan des banques d’investissement après la grande crise financière. Après plusieurs incidents, à la fois sur le cash et sur la prise en pension (repo), certains s’inquiètent désormais des effets du resserrement quantitatif de la Fed sur ce marché. «L’intérêt d’élargir le champ de la compensation centralisée sur les bons du Trésor se comprend, commente Céline Choulet, économiste bancaire chez BNP Paribas. Cela permettrait d’améliorer la visibilité des intervenants de marché et des régulateurs sur les conditions de marché, de promouvoir une gestion du risque plus standardisée et transparente, et de faciliter les conditions d’intermédiation puisque, pour une transaction compensée de façon centralisée via une CCP, il est possible, sous certaines conditions, pour les parties prenantes de compenser leurs positions, en d’autres termes d’afficher dans leurs bilans une position nette, ce qui allège les bilans.»
Effets contre-productifs ?
Mais la compensation centralisée peut aussi présenter quelques désavantages : «Elle est coûteuse (marges initiales, engagement à financer la CCP en cas de stress, exigences opérationnelles, de capital et de liquidité de la CCP), ce qui peut être néfaste à la liquidité, réduit les risques de contrepartie et opérationnels des contreparties mais les concentre dans une seule institution systémique», poursuit Céline Choulet. L'économiste n’est pas plus convaincue que les membres de l’International Swaps and Derivatives Association (Isda) d’un rapport coûts/bénéfices vraiment avantageux pour le marché des US Treasuries.
Si cette contrainte de compensation centralisée venait à être adoptée, elle pourrait transformer le marché de façon importante, et entraîner le retrait de certaines contreparties, estiment divers intervenants à Wall Street. Il s’agirait surtout des sociétés de trading pour compte propre et des hedge funds, même si la règle s’appliquerait aussi indirectement aux fonds monétaires, très présents sur ces opérations. En outre, elle risque d’accroître sensiblement le rôle de la Fixed Income Clearing Corp (FICC), filiale de DTCC et seule chambre de compensation pour les bons du Trésor américain.
Quatre séries de mesures
Dans le détail, le régulateur américain a proposé quatre séries de mesures. La première reviendrait à exiger, pour les CCP enregistrées sur les US Treasuries, qu’elles puissent imposer à leurs participants directs de soumettre à la compensation centralisée certaines transactions éligibles sur le marché secondaire. Ces opérations incluraient tous les accords de mise/prise en pension (repo/reverse repo) garantis par des bons du Trésor conclus avec une des deux contreparties membre de la CCP («clearing members»).
Elles comprendraient aussi toutes les transactions d’achat et de vente conclues avec un membre de la CCP enregistré comme «interdealer broker». Cette situation se produit quand ce participant réunit plusieurs acheteurs et vendeurs via un système de négociation et se trouve être une contrepartie à la fois de l’acheteur et du vendeur dans deux transactions distinctes. Elles comprendraient enfin des transactions d’achat et de vente conclues entre un membre de la CCP, d’une part, et d’autre part, une autre contrepartie qui serait un courtier-négociant enregistré (dealer-broker), un courtier (broker) ou un négociant (dealer) spécialisé en titres d’Etat, un fonds spéculatif ou un autre compte à effet de levier.
Ensuite, une deuxième mesure obligerait les chambres de compensation de ce marché à collecter et à calculer séparément la marge pour les transactions «internes» - comptes propres de leurs participants directs - et pour celles de clients participants indirects. La réforme exigerait, en troisième mesure, des politiques et des procédures conçues pour garantir que la CCP dispose des moyens appropriés pour faciliter l’accès à la compensation, y compris pour des participants indirects. Enfin, le régulateur souhaiterait permettre aux broker-dealers d’inclure la marge requise et en dépôt auprès d’une CCP en lien avec le marché des bons du Trésor américain en tant que débit dans la formule de réserve client.
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