Paris Europlace : Les gérants de stratégies alternatives liquides font valoir leur rôle

Adrien Paredes-Vanheule
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L’avenir des investissements alternatifs liquides s’annonce «brillant» de l’avis des spécialistes qui ont composé ce mardi le panel du International Finance Forum de Paris Europlace consacré à l’avenir de cette classe d’actifs. Si le terme de «hedge fund» est très souvent employé pour la définir, le gestionnaire américain Bridgewater Associates, fondé et dirigé par Ray Dalio, ne se voit pas nécessairement comme un hedge fund, indique Jessica Oleson, directrice des partenariats de sub-advisory de Bridgewater. La société, dont le fonds phare est en hausse de 27% depuis le début de l’année, se qualifie d’abord comme un gérant du risque de diversification. Concernant l’avenir «brillant» des hedge funds, Jessica Oleson observe que les investisseurs reconnaissent de plus en plus la diversification et la valeur ajoutée par les stratégies alternatives liquides à condition de choisir la bonne stratégie alternative et le bon gérant. «Nous voyons un mouvement de sortie du modèle des fonds de hedge funds et un mouvement d’allocation plus qualitative vers les hedge funds», dit-elle. Outre leur rôle dans les portefeuilles, les hedge funds en ont un tout aussi important dans les marchés, soutient Emmanuel Gavaudan, co-fondateur et directeur général de Boussard et Gavaudan, qui se concentre sur les stratégies d’arbitrage et compte quelque 3 milliards d’euros d’encours. Les hedge funds ont la capacité de redémarrer des cycles financiers de manière vertueuse selon lui. «En mars 2009, les entreprises ne pouvaient pas lever d’argent, les marchés étaient fermés. Arcelor Mittal a réouvert les marchés avec un instrument financier hybride. Les hedge funds ont investi dans cet instrument qui a connu un grand succès et ouvert la voie à 19 autres émissions similaires dans la foulée pour un montant de 11 milliards d’euros juste pour l’Europe», rappelle-t-il, faisant également référence à la crise Covid de mars 2020 où les obligations convertibles de certaines sociétés désireuses de renforcer leurs bilans ont été massivement souscrites par les hedge funds alors qu’elles ne trouvaient aucun autre financement. «On dit parfois que les hedge funds sont en désaccord avec les régulateurs mais c’est une idée reçue. En 2008, après avoir réalisé que le système bancaire international était trop faible, on a demandé aux marchés des instruments pouvant absorber les pertes des banques. Les AT1 (Additional Tier 1) ont vu le jour grâce aux hedge funds car on leur a confié la mission de fournir un financement du risque que ne pouvaient pas fournir les marchés actions et obligations. Nous étions plus flexibles et agiles. Aujourd’hui, le marché des AT1 représente trois fois celui des convertibles en Europe», développe Emmanuel Gavaudan. La France à la traîne dans l’allocation aux hedge funds Pour leur distribution sur le sol européen, les stratégies liquides alternatives peuvent s’appuyer sur le format Ucits, propagé par la directive AIFMD, qui a constitué aux yeux de Nathanael Benzaken, responsable de la gestion alternative d’Amundi, l’événement le plus important en Europe pour le développement des hedge funds. «L’année 2022 pourrait être un catalyseur pour l’accélération de l’adoption des stratégies liquides alternatives en portefeuille. A date, le secteur est «flat» en moyenne bien que cela cache une grande dispersion de performances entre gérants. C’est une année fantastique pour la macro et les CTA, les fonds long-short s’en sortent bien», constate-t-il. Mais il faudra selon lui plus de produits et plus d’éducation à faire auprès des investisseurs. En France, particulièrement, ajoute Nicolas Gaussel, directeur général de Metori Capital Management, société de gestion quantitative française qui gère environ 800 millions d’euros. «Il y a une différence surprenante en termes d’allocations aux hedge funds entre régions. En Europe, l’allocation des investisseurs institutionnels est proche de 9-10% contre 15-20% aux Etats-Unis. En France, ce chiffre est de 4%, c’est beaucoup trop bas et je ne comprends pas toujours pas pourquoi c’est aussi bas. C’est déroutant dans la mesure où tous les investisseurs cherchant de la performance sur le long terme devraient avoir une allocation similaire à travers le monde. La question est donc de savoir qui a tort dans son allocation entre les deux rives de l’Atlantique», explique-t-il, exposant par ailleurs sa réticence à proposer ses fonds aux investisseurs particuliers même s’il a reçu des demandes. Débat sur les frais Dans l’industrie des hedge funds, les structures de frais peuvent faire l’objet d’âpres négociations entre les investisseurs institutionnels et les hedge funds. Si une baisse a été amorcée dans le secteur, Jessica Oleson indique que Bridgewater n’a pas changé la sienne même si des investisseurs continuent de faire pression sur la firme pour qu’elle les réduise. «C’est à l’investisseur qu’il convient de juger s’il paye un montant juste en termes de frais. De notre point de vue, il faut plus de trois ans pour évaluer un gérant. Nous conseillons aux investisseurs de bien comprendre notre stratégie, de regarder notre historique de performance qui remonte à 1999 et depuis quand notre équipe travaille ensemble». Nicolas Gaussel, chez Metori Capital Management, observe que la plupart des investisseurs sont «prêts à payer desfrais énormes» s’ils trouvent une stratégie qui apporte une vraie valeur ajoutée à leur portefeuille. Les limites de capacités d’encours sous gestion sont un autre élément clé dans les discussions. Bridgewater a fait le choix de fermer son fonds aux investisseurs (hard-close) depuis plus d’une décennie. «Nous avons déjà rendu de l’argent dans le passé, nous pourrions le refaire très prochainement. Les limites d’encours doivent être respectées car nous devons gérer nos coûts de transactions. Or, nous négocions sur 200 marchés différents et nous ne voulons pas compromettre notre budget de risque», précise Jessica Oleson. Chez Amundi, Nathanael Benzaken se méfie des réouvertures de stratégies de hedge funds pour grappiller un ou deux milliards d’encours en plus. Cela se fait en général au détriment de la performance du fonds concerné selon lui.

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