
Les inquiétudes du rapport sur la complémentaire santé obligatoire
Comment va se dérouler la mise en place de la complémentaire santé obligatoire en entreprise à partir du 1er janvier prochain ? C'était entre autres choses l’objectif du rapport sur la solidarité et la protection sociale complémentaire collective, remis le 23 septembre par Dominique Libault, l’ancien directeur de la sécurité sociale et directeur général de l’Ecole nationale supérieure de la sécurité sociale (EN3S), à Marisol Touraine, la ministre de la Santé.
Le rapport chiffre le nombre de personnes concernées par cette réforme. «Avec cette loi, qui généralise la couverture santé en entreprise, 4 millions de personnes assurées en contrats individuels devraient basculer dans un contrat collectif et 400 000 personnes devraient accéder à l’assurance maladie complémentaire», est-il écrit.
De ce fait, l’ancien directeur de la sécurité sociale alerte sur l’importance d’une meilleure information aux salariés «qui vont basculer d’un système de protection individuel à un système collectif, et qui ne disposent pas d’informations sur les changements qui les attendent, en dehors de celle fournie par les assureurs et les entreprises».
Dans un sondage récent, Swiss Life révélait que les salariés étaient très peu informés de ce changement futur de statut.
Dominique Libault pointe également les risques d’"effets de bord», générés par cette réforme. Surtout en ce qui concerne les inactifs. Car «l’obligation de couverture ne couvre que les salariés en emploi dans les entreprises ; de nombreux publics en sont exclus, tels les retraités, les non salariés, les fonctionnaires et certains agents publics, les chômeurs (hors cas de portabilité)».
Un comble puisqu’aujourd’hui, les personnes les plus mal couvertes «sont celles qui sont le plus éloignées de l’emploi», précise-t-il. Ils doivent ainsi souscrire à des contrats de complémentaires individuels, mais ces contrats risquent de se renchérir substantiellement, craint le professionnel.
Le rapport revient par ailleurs sur les fameuses «clauses de désignation», permettant de déterminer des garanties et un organisme assureur unique pour l’ensemble d’une branche et rendant obligatoire l’adhésion de l’ensemble des entreprises de la branche à ce contrat. Une disposition rejetée par le Conseil Constitutionnel le 13 juin 2013.
Selon Dominique Libault, le gouvernement devra «renforcer le dispositif de recommandation» en l’absence de ces clauses, et «prévoir des exceptions à la fin des clauses de désignation dans un nombre restreint de branches caractérisées par une très forte mobilité des salariés». Le rapport prend l’exemple des employés à domicile ou des intermittents du spectacle, susceptibles «de justifier le maintien d’un assureur unique».
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