Les créanciers seniors des banques ont gros à perdre avec le futur «bail-in»

Le taux de perte sur la dette non sécurisée pourrait atteindre 89% en cas de préférence accordée aux déposants, selon une étude de Bruxelles
Alexandre Garabedian

Bruxelles fait tourner ses modèles sur la résolution bancaire. Alors que le commissaire aux services financiers Michel Barnier doit présenter fin juin un nouveau projet de directive sur le règlement des faillites bancaires, ses services ont publié début mai une étude d’impact, pour les créanciers des banques, des mesures qui seront retenues. Trois options sont en effet sur la table: un traitement pari passu de tous les créanciers, une protection des déposants dans la limite de 100.000 euros, ou un traitement privilégié de tous les déposants (hors établissements de crédit) y compris pour la part excédant 100.000 euros.

Dans la mesure où la protection des dépôts est privilégiée, les porteurs de dette bancaire senior non sécurisée risquent de subir des pertes équivalentes à celles des créanciers subordonnés. Fitch a d’ailleurs indiqué hier que la préférence donnée aux déposants constitue le principal facteur de subordination des obligataires, loin devant «l’encombrement» des actifs bancaires destinés à garantir des obligations sécurisées.

Le taux de perte de la dette senior pourrait ainsi atteindre jusqu’à 80% du pair pour les petites banques, 63% pour celles de taille moyenne (en raison d’une structure de bilan différente), et surtout 89% pour les grandes banques. Ces calculs de la Commission se basent sur plusieurs hypothèses maximalistes : un privilège accordé à tous les déposants sans limitation, et 25% de perte sur le bilan de la banque. Mais même si les créanciers n’étaient protégés que jusqu’à 100.000 euros, les obligataires seniors non sécurisés ne recouvreraient que 26% de leurs créances.

Alors que la dette senior coûte moins cher que la subordonnée, ces résultats plaident a priori pour une réduction de cet écart. Bruxelles se refuse cependant à franchir le pas et à en déduire que le coût de financement des banques augmenterait. C’est même le traitement pari passu de tous les créanciers qui serait le plus onéreux en cas de stress de liquidité, relève la Commission, puisque les déposants non garantis se rueraient au guichet des banques pour retirer leurs avoirs.

Marnik Hinnekens, à la recherche crédit de Tullett Prebon à Paris, pointe du doigt un autre problème: le marché des CDS bancaires traite sur une hypothèse d’un taux de recouvrement de 20% pour la dette senior. Un taux de perte de 89% et non plus 80% pour les grandes banques changerait les modèles de valorisation.

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