
Le CGPI est tenu à un devoir de conseil spécifique

Un joueur de rugby professionnel a, de 2006 à 2008, souscrit, par l’intermédiaire d’un cabinet de CGPI quatre contrats d’assurance-vie et quatre emprunts immobiliers, dont le remboursement in fine a été garanti par le nantissement des contrats d’assurance vie. Estimant que les placements proposés ont fragilisé sa situation financière et que le système patrimonial mis en place par le CGPI s’est révélé inadapté à ses objectifs, le client a recherché sa responsabilité pour manquement à son obligation de conseil.
Condamné par la Cour d’appel d’Agen ( arrêt ci-dessous) à payer à son client les sommes de 123.176 euros au titre du préjudice financier, 30.000 euros au titre du préjudice moral et 15.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, le CGPI s’est pourvu en cassation.
Devoir de conseil. La Cour de cassation confirme que le CGPI, au titre de son activité de courtage en assurance, est tenu d’une obligation de conseil envers son client à l’occasion de la souscription, par son intermédiaire, des quatre contrats d’assurance-vie, y compris ceux conclus avant le 1er mai 2007, date d’entrée en vigueur de l’article L. 520-1 du code des assurances. En effet, la Cour de cassation affirme que «la cour d’appel n’a pas fait de cet article une application rétroactive mais seulement rappelé que ses dispositions avaient consacré le principe, reconnu dès avant cette date, de l’obligation de conseil de l’intermédiaire d’assurance.»
L’approche globale du CGPI. Le conseiller contestait devoir être tenu à une mise en garde sur les risques des investissements immobiliers financés par des prêts in fine garantis par un nantissement de contrats d’assurance vie, estimant devoir seulement informer son client sur les caractéristiques précises du contrat et lui délivrer notamment l’ensemble des informations précontractuelles et contractuelles requises.
Pour la haute juridiction, le CGPI est bien tenu à une obligation de conseil à l’égard de son client, à laquelle il ne peut satisfaire en se contentant de lui apporter l’ensemble des informations précontractuelles et contractuelles dues au titre de son devoir de renseignement.
A l’appui de cette affirmation, la cour relève qu’en sa qualité de conseil en gestion de patrimoine, la société est intervenue dans le cadre d’une lettre de mission d’assistance fiscale et de suivi patrimonial de 2006 à 2009 pour assister son client, qui sportif de haut niveau, était confronté à des exigences professionnelles particulières. Elle avait «une entière vision de la situation patrimoniale et des objectifs de son client». «La société a mené l’ensemble de la stratégie patrimoniale, soit directement par l’orientation vers des produits de placements, soit, indirectement, en qualité d’intermédiaire en opération de banque par la recherche d’un financement dans le cadre d’investissements immobiliers, garantis pour l’essentiel par le nantissement de contrats d’assurance vie.»
Pour Dounia Harbouche, avocate à la Cour «cet arrêt consacre nettement l’approche globale que les juges du fond doivent prendre en considération s’agissant de la RCP du CGP, contrairement au législateur qui n’a pas encore cru bon de créer un véritable statut harmonisé du CGP»
Enfin, «le rôle de la société était d’autant plus crucial que les prêts immobiliers conclus par son intermédiaire ont été contractés auprès de trois établissements différents» souligne l’arrêt, une précision à mettre en perspective avec la MIF 2.
Absence de projection à long terme. Autre fait traduisant le manquement au devoir de conseil du CGPI, ce dernier «n’a réalisé aucune projection à long terme pour envisager la pérennité du système patrimonial mis en place à l’arrêt de la carrière sportive de son client.» Par ailleurs, «le risque des placements, pour l’essentiel investis en unités de compte sur une durée de trente ans, n’a pas été évalué quand ils devaient garantir le remboursement in fine d’emprunts immobiliers contractés pour quinze à vingt ans.»
Un préjudice financier. En revanche, la Cour de cassation censure l’approche de la Cour d’appel quant à la détermination du préjudice financier. En l’occurrence, le CGPI a du payer la somme de 123.176 euros au titre du préjudice financier subi par son client, la cour d’appel ayant calculé la perte des contrats d’assurance-vie souscrits les 28 septembre 2006 et 24 octobre 2007 par différence entre leur valeur de rachat à la date la plus proche de la demande en justice et celle du placement initial. La Cour de cassation relève à juste titre que la Cour d’appel a indemnisé un préjudice éventuel en n’établissant pas que les contrats avaient été racheté à la date retenue et que la perte avait été effectivement réalisée. «Il n’est pas surprenant que la Cour de Cassation ait décidé de sanctionner la position de la Cour d’appel d’Agen. Rappelons que celle-ci avait condamné, contrairement aux premiers juges, le courtier à payer les moins-values latentes observés un instant T sur les contrats d’assurance vie» remarque Dounia Harbouche.
Enfin, s’agissant de la prise en compte dans le calcul de l’indemnisation du préjudice financier des immeubles que le client s’est vu contraint de vendre, la Cour de cassation estime également que la Cour d’appel a privé sa décision de base légale en ne recherchant pas si les investissements immobiliers opérés grâce au CGPI et non revendus avaient procuré au client une économie d’impôt sur le revenu.
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Un décret interdit les sachets de nicotine en France à partir de mars 2026
Paris - Dénoncés pour leur toxicité et leur caractère addictif en particulier pour les enfants et adolescents, les sachets, billes et gommes de nicotine seront interdits en France à partir de mars 2026, une «victoire» pour les associations anti-tabac. Le décret d’interdiction, paru au Journal officiel samedi, fait suite au bannissement des cigarettes électroniques jetables, prohibées à la vente depuis fin février, et à l’interdiction de fumer dans les espaces publics comme les jardins et parcs, les plages ou encore aux abords des écoles en vigueur depuis le 1er juillet. Le bannissement des sachets «vise à protéger la santé publique: la nicotine est désormais considérée comme une substance vénéneuse en raison de ses effets nocifs, et son usage à visée récréative présente un risque d’initiation au tabagisme, notamment chez les jeunes», a justifié à l’AFP le ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités. La ministre «Catherine Vautrin confirme ainsi son engagement» contre les «risques liés aux addictions», selon cette source. Le gouvernement Barnier avait annoncé à l’automne 2024 son intention de bannir les sachets de nicotine, également appelés pouches, en raison notamment d’un accroissement des intoxications chez les adolescents. Le marché mondial des pouches a été évalué par Global Markets Insights à 6,6 milliards de dollars (5,6 milliards d’euros) pour l’année 2023, et pourrait atteindre 27,4 milliards de dollars (23,4 mds d’euros) en 2032. Apparus récemment, les sachets de nicotine sans tabac renferment, dans un tissu perméable, des fibres de polymères imprégnées de nicotine et d’arômes et se glissent entre la lèvre et la gencive. L’interdiction prise par le gouvernement vise l’ensemble des «produits à usage oral contenant de la nicotine, à l’exception des médicaments et dispositif médicaux». Elle ne s’applique pas aux tabacs à chiquer. «Eldorado financier» Il s’agit notamment des «sachets portions» ou «sachets poreux», «pâte, billes, liquides, gomme à mâcher, pastilles, bandelettes ou toute combinaison de ces formes», énumère le texte. L’Alliance contre le tabac, une fédération d’associations anti-tabac, a salué une «victoire». «Il s’agit d’une mesure cruciale pour protéger les jeunes et contrer les stratégies pernicieuses d’une industrie qui prospère sur le marché de l’addiction, au détriment de la santé publique», a-t-elle estimé dans un communiqué. «Face à la baisse de la consommation de cigarettes dans les pays développés, les sachets de nicotine et les nouveaux produits nicotiniques (tabac chauffé et cigarettes électroniques) constituent le nouvel eldorado financier des cigarettiers», souligne l’organisation pour qui, «loin d’être des outils de sevrage, les sachets de nicotine et leurs dérivés (billes, perles) n’ont pour objectif que d’étendre le marché de l’addiction à la nicotine». Les fabricants British American Tobacco France et Philip Morris France ont dénoncé l’interdiction. Le premier a critiqué une «approche dogmatique, sans débat ni concertation» de la France, qui «prend le risque (...) de priver les fumeurs adultes d’alternatives encadrées» au tabac. Pour le second, «la France s’entête dans une stratégie d’interdiction inefficace». La confédération des buralistes y voit une «victoire annoncée pour les trafics». En novembre 2023, l’Anses avait appelé à une vigilance particulière» sur ces sachets en soulignant que ces produits, comme les billes aromatiques, entraînaient de plus en plus d’intoxications. «Les enfants et adolescents sont les principales victimes», avait constaté l’Agence nationale de sécurité sanitaire. Comme les snus (tabac sous forme de sachet à usage oral interdit à la vente en Europe), les sachets de nicotine «peuvent provoquer des syndromes nicotiniques aigus parfois sévères: vomissements prolongés avec risque de déshydratation, convulsions, troubles de la conscience, hypotension ayant nécessité un remplissage vasculaire», selon l'étude qui précise que la majorité des personnes intoxiquées ont entre 12 et 17 ans. Les billes aromatiques présentent aussi un risque d’accident domestique, en particulier pour les enfants de moins de trois ans qui les ingèrent. Le nombre d’appels au centres anti-poisons concernant ces produits était passé de trois en 2020 à 86 en 2022, selon l’Anses. Boris CAMBRELENG © Agence France-Presse -
Protection de l’enfance : le gouvernement réforme les pouponnières pour limiter la durée de placement des bébés
Paris - Eviter que des bébés restent trop longtemps placés dans des pouponnières de l’ASE sur-occupées: le gouvernement a publié samedi un décret réformant l’accueil des tout-petits en protection de l’enfance, jugé alarmant. Les pouponnières de l’Aide sociale à l’enfance accueillent des bébés de la naissance à trois ans, placés le plus souvent par la justice car ils sont à risque de danger dans leur famille: maltraitances, toxicomanie ou troubles psychiatriques des parents, violences conjugales par exemple. Le décret refonde le cadre réglementaire datant de 1974, jugé «obsolète». «Notre objectif est d’aider des enfants qui ont été particulièrement secoués par les difficultés dans leur toute jeune vie à avoir les conditions de développement les plus adaptées possible», a expliqué la ministre des Familles Catherine Vautrin, vendredi en visitant la pouponnière de Brétigny-sur-Orge (Essonne). Un rapport de la députée socialiste Isabelle Santiago a dénoncé en avril des conditions alarmantes dans certaines pouponnières, sur-occupées, avec un encadrement insuffisant. Le texte limite la durée de placement en pouponnière à quatre mois, renouvelable une seule fois après une évaluation de «l'évolution de la situation de l’enfant». «L’objectif est d’essayer le plus possible que l’enfant ne passe pas plus de trois, quatre mois dans la pouponnière, (...) pour être le plus possible orienté vers une famille», a indiqué Mme Vautrin. En quelques années, la durée moyenne de placement est passée de cinq à huit mois, selon le ministère. Certains enfants y restent jusqu'à leurs trois ans, voire plus. La capacité d’accueil sera «plafonnée à 30 enfants», avec une organisation en «petites unités de vie», plus «chaleureuse et sécurisante», selon le ministère. Le texte renforce les normes d’encadrement, avec une auxiliaire de puériculture pour cinq enfants le jour et quinze enfants la nuit. Les équipes devront s’attacher à répondre aux besoins d'éveil et de développement des enfants, mais aussi d’attachement et de sécurité. Les pouponnières auront aussi un rôle de soutien aux parents, en vue du retour du bébé dans sa famille, avec une «équipe dédiée à l’accompagnement à la parentalité», indique le ministère. Un budget de 35 millions d’euros est alloué pour mettre en oeuvre ces nouvelles normes, a précisé Mme Vautrin. La députée Isabelle Santiago a salué samedi une «avancée majeure pour la prise en charge des bébés les plus vulnérables», tout en demandant à «refonder» plus largement la protection de l’enfance. La Cnape, une des principales fédérations d’associations du secteur, a salué «une ambition qui va dans le bon sens, avec quelques moyens encore à confirmer dans le budget». Réduire la durée de placement en pouponnière nécessite de renforcer l’accès à des familles d’accueil dont beaucoup approchent de l'âge de la retraite, souligne-t-elle. Mme Vautrin a annoncé en juin qu’elle déposerait à l’automne un projet de loi sur la Protection de l’enfance, pour notamment élargir le vivier des assistants familiaux, en leur permettant de cumuler cette activité avec un autre emploi. «Nous sommes en train de le finaliser, ce qui veut dire que si d’aventure demain d’autres que moi ont la responsabilité de ce sujet, ils trouveront un projet de texte de loi», a précisé vendredi Mme Vautrin, alors que le gouvernement pourrait tomber lundi avec le vote de confiance demandé par le Premier ministre François Bayrou. © Agence France-Presse