
«Il n’y a aucun enjeu fiscal à la censure du registre public des trusts»

Il convient de rappeler avec force quela décision du Conseil constitutionnel du 21 octobrede censurer le registre public des trusts ne remet absolument pas en cause l’existence même du registre.
Les ONG réclamaient depuis des années une accessibilité au public de ces registres au nom de la transparence et de la garantie contre la fraude fiscale. En somme, elles ont souhaité un droit de regard pour les citoyens. Nous y étions d’ailleurs nous-mêmes favorables.
Cette censure ne présente toutefois aucun enjeu fiscal, c’est son caractère public qui a été refusé. Il faut éviter d’en dramatiser la portée. Le registre est créé et il est à la disposition des autorités fiscales. Il permettra par le biais des autorités fiscales internationales de pouvoir sanctionner les fraudeurs. Le mouvement visant à faire la transparence pour mieux lutter contre le blanchiment et la fraude fiscale est là. Il n’y a aucune raison qu’il soit remis en cause.
Consultez ici le détail de la décision du Conseil constitutionnel sur la QPC.
Ce processus s’inscrit d’ailleurs dans une démarche beaucoup plus large. L’échange automatique d’informations entre Etats prendra sa pleine mesure à partir de 2017. Il n’aura sa pleine efficacité que si les Etats se donnent les moyens d’identifier les bénéficiaires des différentes structures, trusts, sociétés commerciales, fiducies et puissent les communiquer aux Etats partenaires, un principe acté par le G20.
Encore faut-il que leur législation leur permette d’avoir accès à ces informations sur les bénéficiaires. Si l’on revient un peu en arrière, rappelons qu’en 2016 a été instauré en France le registre des trusts où ils sont répertoriés selon trois critères: ceux établis en France, ceux auxquels participent des résidents français et ceux qui possèdent des actifs en France. Les fiducies ont vu la création de leur registre quelques années auparavant et la loi Sapin II prévoit de déterminer les contours en matière de sociétés commerciales.
Cela étant dit, la censure du Conseil constitutionnel pose toutefois la question de l’accessibilité de ces registres. S’ils ne peuvent pas être accessibles à tous, nous estimons qu’ils doivent pouvoir l’être pour les magistrats dans le cadre de leurs enquêtes fiscales. Prenons l’exemple de l’affaire Balkany: je n’ai pas de doute sur le fait que le magistrat en charge de l’affaire aimerait obtenir des renseignements sur les véritables propriétaires des trusts et sociétés évoqués dans l’affaire.
Au-delà de la censure du Conseil constitutionnel, concentrons-nous davantage sur les prochains défis qui nous attendent. En priorité celui de rattraper les «free riders», ces Etats ou territoires qui ne jouent pas encore le jeu de l’échange automatique d’informations.
Le Panama a indiqué qu’il allait coopérer et en Europe, tous les pays membres ont désormais rendu les armes. Les derniers résistants – Autriche, Luxembourg, Suisse, Monaco, Andorre, Lichtenstein, Jersey… – pratiquent ou se sont engagés à pratiquer l’échange automatique d’informations.
Reste à convaincre ceux qui ne coopèrent pas, à l’image de Bahreïn ou des Iles Vierges britanniques. L’OCDE et le G20 se doivent de lister ces territoires et d’organiser des sanctions telles que le boycott. En bout de chaîne, ces territoires ne seront pas très nombreux mais ils possèdent un pouvoir de nuisance.
Daniel Lebègue, président de Transparency International France
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