
La lutte contre la fraude s’adapte au paiement fractionné
Avec le paiement fractionné, désormais disponible sur la plupart des sites de e-commerce, s’est développé un nouveau type de fraude. Quasiment tous les acheteurs peuvent obtenir en quelques secondes de payer en plusieurs fois avec leur carte bancaire sans fournir de justificatif. Le processus d’octroi, très rapide, repose le plus souvent sur la simple interrogation de listes noires (cartes volées, cartes piratées). Le niveau des impayés est donc plus élevé que sur les crédits à la consommation traditionnels, qui requièrent au contraire de justifier de sa solvabilité. C’est pourquoi BNP Paribas Personal Finance a décidé de renforcer les moyens de lutte contre la fraude mais sans alourdir le parcours client. « Grâce à l’exploitation des données fournies par les clients, nous sommes en mesure de reconnaître les identités et d’identifier les dossiers connectés entre eux par une ou plusieurs données communes, explique Mehdi Barchouchi, responsable innovation data & outils à la direction des risques France chez BNP Paribas Personal Finance. En revanche, il est plus difficile de repérer les dossiers qui ne sont connectés entre eux que de façon indirecte, chacun partageant une information avec un troisième dossier. Plus il existe de données communes, plus on peut en déduire un lien profond. Mais il est difficile de traiter ces informations liées aux connexions indirectes et de les injecter dans le ‘scoring’ en temps réel. »
Interconnexions
La banque a alors fait appel à Neo4j, qui a développé une technologie de base de données de graphes qui permet de représenter un réseau et d’identifier en un temps record les relations existant entre les objets. C’est cette technologie qui est utilisée par exemple dans les moteurs de recommandations sur les sites marchands qui affichent des messages comme « Les personnes ayant acheté cet article ont aussi consulté ces pages ». Ainsi, si deux dossiers partagent le même numéro de téléphone ou le même numéro de carte bancaire, ils sont immédiatement reliés. Ensuite, c’est aux experts métier de pondérer leur importance pour déterminer si ce lien est l’indicateur d’une fraude ou d’un rapport familial, par exemple s’il s’agit d’un enfant qui achète avec la carte bancaire d’un de ses parents. « C’est notamment ce qui permet de détecter des communautés au-delà de la cellule familiale normale, explique Nicolas Rouyer, consultant avant-vente senior chez Neo4j. Et plus le réseau est étendu, plus la probabilité de fraude est élevée. L’analyse de graphes permet d’identifier les marqueurs de risque, et l’intelligence artificielle apporte une capacité de détection plus sophistiquée. L’objectif, pour BNP Paribas Personal Finance, était de maximiser la fraude éliminée en coupant le minimum de production de paiement fractionné. » Autrement dit, de cibler précisément les fraudeurs et d’éviter de rejeter les demandes de bonne foi. Dès la première version installée, la solution a contribué à réduire la fraude de 30 % en rejetant seulement 2 % des demandes. Ensuite, les équipes doivent continuer à suivre la performance de l’outil et vérifier que les fraudeurs ne s’adaptent pas.
Un résultat positif obtenu grâce à un long travail en amont. Première étape : comprendre les données connectées entre elles et repérer les modes d’action des fraudeurs. Deuxième étape : comprendre ce qui est inhabituel grâce aux algorithmes des graphes, qui détectent les communautés et comment elles sont reliées entre elles, et grâce à divers coefficients qui contribuent à repérer les nœuds (personnes ou dossiers en l’occurrence) les plus importants dans un réseau. Troisième étape : prédire les comportements futurs, autrement dit trouver les dossiers frauduleux à partir des modèles de comportement des fraudeurs. Et ainsi bloquer l’octroi avant que la fraude ne soit avérée.
Les équipes data science et risque de BNP Paribas ayant pris en main la technologie Neo4j ont partagé leur expérience auprès d’autres filiales de Personal Finance qui pourraient être intéressées. Il est également envisageable de déployer le même outil sur d’autres produits de crédit, ce qui permettrait probablement de mutualiser une partie des développements mais nécessiterait aussi de refaire une part du travail puisque les données collectées ne sont pas toutes identiques et les modèles de fraudes non plus.

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