Marie Guillemot : « KPMG France sécurise les informations financières et extra-financières »

Marie Guillemot, présidente de KPMG France
Sylvie Guyony
Marie Guillemot, présidente de KPMG France
Marie Guillemot, présidente de KPMG France  -  Vincent Colin

Retrouvez ici l’intégralité de l’entretien

KPMG France clôt son exercice fin septembre.

Quel sera l’impact de la crise sanitaire ?

Notre chiffre d’affaires est sur une très bonne tendance en cette année que nous imaginions pourtant en demi-teinte. Je suis extrêmement fière de la mobilisation des équipes depuis le début de la crise. Nos quatre métiers – audit, conseil, juridique et fiscal, expertise – sont en croissance. Le juridique et fiscal poursuit une croissance très soutenue et entre dans une phase de maturité. Ce métier a représenté 7 % de notre chiffre d’affaires l’an dernier. En tant que cabinet pluridisciplinaire, nous comptons poursuivre cette dynamique en développant des synergies avec chacun des autres métiers, par exemple en revue fiscale avec la technicité qu’il peut apporter à l’audit, ou en expertise fiscale ou juridique pour toutes les entreprises. Il y a aussi un gisement à exploiter entre le financier et le fiscal dans les opérations de transactions.

Nous avons également des ambitions fortes dans l’expertise comptable et le conseil aux petites et moyennes entreprises, avec une accélération en matière d’offre digitale. Nous allons lancer dans les semaines qui viennent une nouvelle version de notre portail KPMG Pulse, notre plateforme de services aux entrepreneurs, et renforcer notre engagement de proximité avec nos clients en régions. Nous avons également d’autres projets de développement pour tous nos métiers dans notre feuille de route, avec l’ambition de devenir le premier cabinet engagé pour une création de valeur responsable.

Sentez-vous la reprise ?

Après 18 mois de hauts et de bas, les entrepreneurs, quelle que soit la taille de leur structure, sont optimistes parce que la consommation est là, parce que les investissements sont possibles et parce qu’il y a des relais aux mesures gouvernementales. Il faut flécher les fonds pour leur donner plus de capacité à relever le défi de la transformation. Je suis optimiste, et même positive, et je constate au contact quotidien des entreprises qu’elles veulent se réapproprier leur avenir. Par ailleurs, l’édition 2021 de notre étude « KPMG CEO Outlook », qui prend le pouls des dirigeants et sera publiée en France dans quelques semaines, montre que partout dans le monde, les dirigeants de sociétés sont prêts pour renouer avec la croissance externe. Les transactions ont repris à un rythme intense. Notre équipe, numéro un sur le marché français depuis trois ans, est à l’œuvre. Notre métier du conseil est aussi en charge de projets pluriannuels dans des groupes internationaux. Il accompagne la transformation digitale des fonctions finance comme du front-office clients, mais aussi, de plus en plus, la mise en place de critères environnementaux, sociaux et de bonne gouvernance (ESG). Les trois quarts des dirigeants dans le monde estiment que la croissance doit aussi donner du sens, pour les consommateurs, les collaborateurs… Les investisseurs sont prêts à mobiliser leurs fonds en leur associant des critères ESG, nous les accompagnons pour donner du sens à leurs investissements afin de contribuer à générer un impact positif.

On n’attend pas forcément les métiers du chiffre sur le terrain de l’ESG…

Un cabinet pluridisciplinaire, comme KPMG France, est un partenaire de confiance, qui sécurise les informations financières et extra-financières avec le même engagement. D’autre part, nous connaissons le secteur d’activité, les métiers, la stratégie et même les facteurs de résistance au changement de nos clients : nous pouvons plus rapidement que d’autres mettre en œuvre de grands chantiers de transformation, avec leurs implications technologiques et managériales. Le capital humain est essentiel à mes yeux. KPMG, un réseau de 220.000 collaborateurs dans le monde dont 10.000 en France, mène aussi sa propre révolution sociale et environnementale. Sur le plan social, le télétravail est l’opportunité de renforcer le management par la confiance. Notre programme « KPMG For Good » porte nos engagements et met en cohérence deux axes d’action : d’une part, nos initiatives de transformation interne et, d’autre part, nos offres de services à destination de nos clients.

Comment évolue votre portefeuille de clients ?

KPMG France compte près de 100.000 clients, de toutes tailles. Sur le segment des entreprises de taille intermédiaire (ETI), nous voulons accroître notre part de marché d’un peu plus de 20 % aujourd’hui à 30 % d’ici à 2025. Nous pouvons combiner nos compétences et nous appuyer sur la proximité de nos 220 bureaux en régions. S’agissant de ces implantations, nous allons les faire évoluer vers davantage d’espaces de rencontre et de collaboration avec nos clients. Dans l’audit, nous avons 9 sociétés du CAC 40 en portefeuille. Nous en avons gagné 4 en 24 mois, dont Axa et la Société Générale. En conseil, sur les 30 premiers clients de KPMG en France, la croissance excède les 30 %, et notre part de marché progresse au sein du SBF 120.

La réglementation oblige à des sorties de mandats. Est-ce que cela entraîne des mouvements d’équipes d’un grand cabinet à l’autre ?

Parmi nos clients CAC 40, certains devront effectivement sortir dans les deux prochaines années. Pour en gagner de nouveaux, nous anticipons deux ou trois ans à l’avance. Et surtout, nous sommes dans une démarche « client for life » : nous avons vocation à accompagner chaque client sur le temps long, que ce soit pour sécuriser ses performances ou lui apporter nos compétences dans sa transformation et son développement.

Est-ce que les scandales récents rendent KPMG moins attrayant pour les recrues ?

Nos collaborateurs font un travail remarquable dans le respect de l’éthique et de l’intégrité. Sur 120.000 candidatures reçues chaque année, nous recrutons 2.500 talents par an. La Covid a un peu réduit le turnover, il est habituel qu’après quelques années, certains évoluent en entreprise. Nous avons donc la responsabilité de bien sélectionner les profils, les personnalités et avons une attention très forte portée aux valeurs d’intégrité et d’éthique indispensables à nos métiers.

Une nouvelle réforme européenne de l’audit doit voir le jour d’ici à fin 2022. Que pensez-vous d’une éventuelle séparation des métiers de l’audit et du conseil ?

Dans cette réforme globale du reporting financier, je perçois en effet ce thème de la séparation des métiers. Je ne pense pas que ce soit un gage d’indépendance, ni d’ouverture du marché au-delà des Big Four. Les règles strictes en France constituent une autre réponse. Construire un réseau d’audit-conseil prend des décennies : cela ne se décrète pas. Et d’ailleurs, KPMG fêtera ses 100 ans l’année prochaine.

Quelle est la place de la France dans ce groupe ?

KPMG est davantage un réseau, avec une marque unique, qu’un groupe. Chaque entité nationale adhère aux mêmes valeurs et méthodologies : l’intégration est forte sur les clients internationaux, elle est opérationnelle mais pas juridique. La France a un spectre de clients plus large que d’autres pays avec une présence sans égale dans les territoires. Figurant parmi les cinq premiers pays, elle est active au sein du réseau. En tant que présidente de KPMG France, je représente la France au board Europe et monde.

Comment s’est décidée l’évolution de la gouvernance française ?

Le conseil de surveillance, constitué de douze personnes (10 élus par des associés et 2 représentants de la famille fondatrice), a souhaité « ouvrir le jeu » en sortant du système de cooptation. Les 550 associés de KPMG France ont été consultés. Des équipes ont présenté leur projet, et leur business plan. Nous étions trois candidates, pour un partnership qui comprend moins de 25 % de femmes (nous avons une marge de progrès !). J’ai été élue en septembre 2020. Nous avons, avec mes deux directeurs généraux Axel Rebaudières et Jérôme Kieffer, constitué le directoire, formé notre comité exécutif et pris nos fonctions fin avril 2021.

Propos recueillis par Sylvie Guyony

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