
Portefeuilles : rotation thématique et cyclique
Bien malin qui peut prévoir l’évolution de la pandémie cet automne. On en sait désormais davantage sur le coronavirus, mais nul n’est certain des effets saisonniers, ni d’une possible accélération de la contagion, dans l’hémisphère nord, à la sortie de l’été. Se préparer au pire n’empêche pas d’espérer le meilleur. Certes, le nombre de nouveaux cas a recommencé à grimper en Europe mais, au niveau global, la décrue se confirme. Plus nettement encore, le nombre global de décès Covid reculait d’un tiers sur les cinq derniers jours d’août, par rapport au pic enregistré deux semaines plus tôt – laissant poindre l’espoir d’un virus moins létal. De façon plus certaine, les hôpitaux ont amélioré leurs protocoles : les transferts en soins intensifs et la mortalité hospitalière baissent. Une meilleure connaissance des gestes barrières devrait permettre d’éviter une recrudescence de l’épidémie aussi forte qu’au printemps ; le principe de précaution est poussé à l’extrême dans certains pays comme la France (masques). Enfin, sans porter de jugement sur le bien-fondé du raccourcissement des étapes de développement de vaccins, il semble que ces derniers puissent être mis sur le marché dès le premier semestre (voire trimestre) 2021 – ce qui permettra aux gouvernements de relâcher la contrainte de distanciation sociale freinant le retour de l’activité vers son niveau d’avant-crise. Sur la question sanitaire donc, l’humilité est de mise mais le pire n’est jamais sûr.
Les actifs risqués continuent de bénéficier d’un fort soutien de la politique économique. Certes, les tiraillements politiques, outre-Atlantique, retardent l’adoption d’un nouveau plan budgétaire. La question du financement des services postaux, qui jouent un rôle majeur dans le vote par correspondance, très controversé, contrarie la convergence vers un accord bipartisan. C’est regrettable pour l’économie ; la Fed, en revanche, ne relâche pas ses efforts et constitue un point d’ancrage pour les investisseurs. Le président Powell a explicité, lors du symposium de Jackson Hole, le passage à un nouveau régime de politique monétaire. Le nouvel « objectif flexible d’inflation moyenne » est désormais plus symétrique : la Fed cherchera à compenser les périodes de sous-inflation persistante en favorisant une inflation modérément supérieure à l’objectif de 2 %. Par ailleurs, l’objectif d’emploi devient, lui, asymétrique ! Les décisions de politiques monétaires seront influencées non plus par les écarts (négatifs ou positifs) au plein emploi, mais par le seul sous-emploi. La Fed adoptera également une approche plus inclusive, en portant une attention particulière aux emplois à faibles revenus. Il en découle un régime monétaire encore plus accommodant, qui devrait se traduire dès la réunion du FOMC le 16 septembre par une « forward guidance » plus ferme et mieux définie : les taux zéro et l’assouplissement quantitatifs ont encore de beaux jours devant eux.
En revanche, deux enjeux politiques sérieux vont traverser l’automne. Un accord sur le Brexit doit être conclu d’ici à fin octobre. Il resterait alors deux mois pour le mettre en œuvre. C’est trop peu pour un accord ambitieux ; au mieux il sera minimaliste, au pire il ne sera pas. Ce dernier cas serait un facteur aggravant pour les économies britannique et, dans une moindre mesure, européenne. L’élection américaine de novembre crée deux risques. On ne peut exclure un résultat très serré et contesté, ouvrant la voie à des tergiversations et un immobilisme de plusieurs semaines, voire mois. L’autre risque, pour les marchés d’actions, consiste en une vague bleue qui verrait Biden l’emporter et les démocrates gagner la majorité au Sénat. Les hausses d’impôts sur les entreprises et les hauts revenus, ainsi que les resserrements réglementaires dans les domaines de la banque, le pétrole ou la technologie pèseraient sur les actions américaines, quoique certains secteurs cycliques bénéficieraient de la dépense budgétaire, notamment dans les infrastructures.
Ces risques politiques peuvent faire l’objet de corrections temporaires, mais dans un contexte de reprise économique continue et de banques centrales proactives, la prise de risque restera encouragée. Ce paradigme sera menacé le jour où l’inflation décollera mais, à horizon 12-18 mois, les capacités disponibles et le chômage plaident plutôt pour la désinflation. Les taux devraient donc rester bas, attisant la recherche de rendement – pas une bonne nouvelle pour le style Value, mais les valeurs cycliques devraient continuer à se reprendre par rapport aux défensives. Cette rotation cyclique peut aussi favoriser les devises et actions émergentes (en retard). La création monétaire conduit à une inflation du prix des actifs et des valorisations extrêmes qui accroissent le risque de correction, lors desquelles la liquidité se volatilise. Il faut donc renforcer les stratégies de couverture lors des périodes de fort appétit au risque qui voient les volatilités reculer. La recherche de rendement devrait continuer à favoriser les actifs réels, qui offrent par ailleurs une bonne protection dans un contexte d’incertitude sur l’inflation à moyen terme.
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