L’Italie entame une nouvelle période budgétaire à risques

Le gouvernement de Giorgia Meloni devrait voir la pression monter à l’approche du budget 2024.
Giorgetti Giancarlo, ministre italien de l'Economie photo gouvernement italien
Giancarlo Giorgetti, ministre de l’Economie et des Finances, a répété fin août la volonté de l’Italie d’inscrire son déficit dans une tendance baissière.  -  Photo Italian Gov.

Loin des promesses électorales formulées voici un an, la présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni, devrait se résigner à adopter un budget de rigueur d’ici à la fin du mois. Le 1er septembre, l’organisme de statistique italien Istat a publié un PIB en contraction de 0,4% au deuxième trimestre, une déception après la croissance de 0,6% enregistrée au premier trimestre. De quoi souligner la sensibilité de l’économie italienne à la hausse des taux de la Banque centrale européenne (BCE) après la résilience du début d’année. Outre une consommation privée en hausse de 0,7% en rythme trimestriel et une balance commerciale stable, la consommation publique a baissé de 1,6% après avoir augmenté de 1,7% au premier trimestre, de même que les investissements permettant la constitution de capital fixe (-1,8% après -0,8%).

«Les révisions de plusieurs autres chiffres ont fini par produire un récit différent de la performance de l’économie de l’Italie au cours des derniers trimestres, en particulier en ce qui concerne l’activité d’investissement (…). [Celle-ci] a été le moteur du PIB italien, aidée par des fonds européens massifs, mais si elle cesse de contribuer, la croissance de l’économie italienne risque de tomber comme un vélo à l’arrêt», interprète l’économiste Lorenzo Codogno (LC-Macro Advisors). Il pointe la fin du «superbonus», cette subvention incitative à la rénovation énergétique des habitations qui coûtera encore à l’Etat cette année, et un écart qui se creuse à nouveau avec la zone euro dans la constitution de capital fixe. Le déflateur du PIB est aussi décevant (3,8% plutôt que 4,6% attendu), ce qui signifie un écart avec l’inflation mesurée qui devient à nouveau important et négatif pour les comptes publics.

Plus de dépenses, moins de croissance

Après une révision du déficit à 8% du PIB en 2022 à cause de la nouvelle réglementation européenne sur les crédits d’impôt, l’Italie risque de dépasser l’objectif fixé à 4,5% du PIB en 2023 pour atterrir autour de 5%. L’objectif de déficit à 3,7% du PIB en 2024 serait aussi menacé, selon les sources gouvernementales citées par les agences de presse. Juillet a été le premier mois d’amélioration du solde budgétaire (+16 milliards d’euros pour -79 milliards cumulés depuis janvier), grâce à une forte diminution du bouclier énergétique et à l’allocation d’une «subvention» liée à la facilité européenne NextGen EU attendue depuis mars. Mais cela ne devrait pas suffire à inverser la tendance, liée notamment à la revalorisation des pensions face à l’inflation, alors que la suspension du Pacte de stabilité européen devrait prendre fin en décembre. L’écart entre les taux à 10 ans italiens (BTP) et allemands (Bund), qui s’est situé au-dessous de 170 pb une large partie de l’été, est donc remonté autour de 175 pb depuis fin août.

Faute de rentrées fiscales abondantes avec ce ralentissement de l’économie, la cheffe du gouvernement italien devrait arrêter un budget 2024 resserré. La coalition a ainsi parlé de raboter le «revenu de citoyenneté» destiné aux ménages à faible revenu, d’instaurer une taxe sur les superprofits des banques – cette annonce sans préavis au milieu de l’été aurait été plutôt mal perçue du côté de la BCE –, et de lancer de nouvelles privatisations. La promesse d’étendre aux salariés l’impôt forfaitaire (flat tax) de 15% accordé aux auto-entrepreneurs disposant de revenus annuels inférieurs à 85.000 euros a été repoussée, tout comme l’assouplissement de la loi Fornero de 2011 fixant l’âge de départ à la retraite à 67 ans. Le gouvernement devrait cependant reconduire la baisse de la charge fiscale pesant sur les revenus modestes, pour un coût d’environ 10 milliards d’euros, et instaurer des soutiens pour les familles nombreuses.

L’effet de ces décisions doit encore être évalué dans le Document d’économie et de finance (DEF) qui établira le 27 septembre les projections économiques du Trésor pour 2024. Le gouvernement, dont le ministre de l’Economie Giancarlo Giorgetti a réitéré fin août la volonté de diminuer la dette, pourrait prendre de nouvelles mesures pour limiter les écarts par rapport aux objectifs de déficit. «Le projet de loi de finances pour 2024 deviendra un test encore plus important pour vérifier le respect par le gouvernement actuel de la discipline budgétaire, estime Marco Protopapa, analyste chez JPMorgan. Le manque de ressources supplémentaires pour des mesures phares pourrait intensifier le bruit politique dans les prochaines semaines.»

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