
Les «swap-spreads» se réduisent sans revenir à la normale
Un an après l’écartement des «swap-spreads» sur les taux allemands lié aux annonces du 3 février de resserrement monétaire de la Banque centrale européenne (BCE), la situation s’est un peu améliorée, mais sans revenir à la «normale» (voir graphique). Cet indicateur, qui marque la différence entre les taux de rendement des emprunts d’Etat allemands et le taux payé sur la «jambe» à taux fixe d’un contrat de swap de même maturité, s’est anormalement écarté depuis le début du resserrement monétaire.
En portant sur les bons du Trésor, les programmes d’achats d’actifs (quantitative easing, QE) de la BCE avait logiquement entraîné cet écartement par la baisse des taux «cash» en 2020, de 27 à 47 points de base (pb) par exemple pour les swap-spreads sur les taux allemands à 2 ans. Mais l’arrêt du QE aurait dû enclencher un resserrement, qui n’a pas eu lieu à cause de la guerre en Ukraine et du manque plus général de titres souverains face à la demande, en direct ou en garantie (collateral) sur les mises en pension (repo). Au contraire, les marchés de swaps ont eu tendance à anticiper davantage les hausses de taux.
Pénurie de collatéral
Sur la maturité 2 ans, les swap-spreads se sont ainsi écartés de 33 à 110 pb entre janvier et octobre, avant de revenir à 65 pb depuis. Le mouvement est similaire sur d’autres maturités. «Une première réduction a été enclenchée en septembre après la décision de la BCE de suspendre temporairement le ‘plafond de 0%’ sur la rémunération des excès de trésorerie des Etats de la zone euro, rappelle Arnaud-Guilhem Lamy, responsable des stratégies Taux euro aggregate chez BNP Paribas AM. Ils ont de facto conservé ce cash à la BCE (560 milliards d’euros fin septembre, 350 milliards désormais) plutôt que de l’investir sur les marchés des bons du Trésor ou du repo, avec le même effet d’assèchement sur les titres souverains. Depuis mardi, la BCE a un peu réduit cette rémunération - à taux à court terme en euro €STR moins 20 pb - alors que les marchés craignaient bien davantage», ce qui eu pour effet de faire remonter les taux (notamment de 10 pb à 2 ans) et de réduire les swap-spreads (de 6 pb à 2 ans).
L’institution de Francfort a insisté sur la nécessité d’«une réduction progressive et ordonnée» des dépôts auprès de l’Eurosystème à cause de la pénurie persistante de collateral liée aux liquidités excédentaires, ce qui peut perturber le bon fonctionnement des marchés monétaires et l’intermédiation des banques. La veille, Bloomberg rapportait les craintes d’un retour à 0% de la rémunération des excès de trésorerie, craintes illustrées dans un nouvel écartement de 5 pb du «swap-spread» 2 ans en janvier - après une baisse de 50 pb.
Effets désormais positifs sur le crédit
Le crédit aux entreprises étant valorisé à partir des swaps de taux auxquels s’ajoute le spread de crédit en pb, l’écartement des taux swaps supérieur à celui des taux eux-mêmes a comme prévu eu un impact négatif sur le marché de crédit pendant les neuf premiers mois de 2022. «Après septembre, un indice comme le Barclays Euro Aggregate Corporate qui est valorisé par rapport au taux sans risque de référence a vu son rendement se resserrer sous deux effets : d’une part le resserrement du spread de crédit par rapport au swap, d’autre part le resserrement du ‘swap-spread’ de même maturité lui-même, poursuit Arnaud-Guilhem Lamy.
L’an dernier, l’écartement général a pu inciter des stratégies d’arbitrage de valeur relative, par exemple sur les obligations bancaires sécurisées qui en ont bénéficié. «Ces ‘covered bonds’ notées AAA étant souvent valorisées autour du swap (MS plus ou moins 10 pb), certains en ont acheté à la place des titres souverains tout en vendant les bons du Trésor de même maturité pour capter l’écart du ‘swap-spread’, ajoute Arnaud-Guilhem Lamy. On a même vu d’autres dettes bancaires seniors valorisées en négatif par rapport au swap du fait de ces effets de flux.»
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