Bruxelles recense les géants du numérique soumis aux nouvelles règles de concurrence

Plus que la liste, sans réelle surprise, des entreprises ciblées, avec les Gafam et TikTok, c’est la délimitation de leurs multiples services qui seront soumis aux règles les plus strictes du Digital Markets Act qui fait l’objet d’incertitudes.
A Bruxelles
Thierry Breton
Une première salve de six plateformes visées par les nouvelles règles européennes est dévoilée  -  Aurore Martignoni - EC service audiovisuel

Amazon, Apple, Alphabet (maison mère de Google), Meta (maison mère de Facebook), ByteDance (maison mère de TikTok) et Microsoft. Telle est la liste des six premiers géants du numérique qui vont tomber sous le coup des règles les plus strictes du Digital Markets Act (DMA), dévoilée mercredi 6 septembre par la Commission européenne.

Rangées dans la catégorie des «gatekeepers» (contrôleurs d’accès) - concept au cœur de la nouvelle loi - en vertu de leur domination écrasante, ces entreprises doivent se soumettre à une série de nouvelles obligations légales sous six mois, d’ici au 6 mars 2024. Ces nouvelles règles visent à instaurer davantage de concurrence dans la sphère numérique.

Au menu : la possibilité accordée aux détenteurs de smartphones d’utiliser d’autres boutiques d’applications que celles d’Apple et Google, ou encore d’effacer les applications pré-installées. En outre, le principe d’«intéropérabilité» inscrit dans le DMA devrait permettre d’envoyer un message depuis une messagerie en ligne telle que WhatsApp (détenu par Meta) vers une messagerie concurrente, comme Signal. Enfin, la législation devrait compliquer la collecte des données personnelles à des fins publicitaires, en requérant le consentement des internautes.

La liste publiée mercredi était, pour l’essentiel, attendue. Elle confirme ainsi que le néerlandais Booking.com est épargné. Mais pour combien de temps ? L’agence de voyage en ligne avait indiqué début juillet s’attendre à franchir dès l’année prochaine les seuils quantitatifs (de chiffre d’affaires et en nombre d’utilisateurs), la rendant susceptible d’être inscrite dans la liste.

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Samsung passe également entre les gouttes. Son navigateur web mobile pour smartphones et tablettes, «Samsung Internet Browser», dépasse pourtant bien lesdits seuils, mais l’entreprise coréenne a fait valoir des arguments d’ordre qualitatif afin d’échapper au statut de gatekeeper, lesquels ont été jugés «convaincants» par la Commission. Google et Microsoft ont aussi fait usage de ce droit concernant, respectivement, Gmail, Outlook.com, avec la même issue positive.

Ainsi, plus que l’identité des entreprises qualifiées de gatekeepers, c’est la délimitation, parmi leurs nombreux services, de ceux qui seront soumis, ou non, au DMA qui fait l’objet d’incertitudes. Microsoft devra attendre la fin d’une enquête menée par la Commission pendant cinq mois maximum pour savoir si Bing, son moteur de recherche concurrent de l’ogre Google Search (qui sera, lui, bien ciblé) son navigateur Edge et son service Microsoft Advertising pourront bénéficier d’une pareille dérogation. Idem de la messagerie IMessage d’Apple.

Le défi de la mise en œuvre

A plus long terme, le défi de l’UE est d’assurer la mise en œuvre de ce cadre réglementaire inédit à travers la planète. La nouveauté réside dans la création de règles claires - bien que sujettes à interprétations - à respecter d’entrée de jeu, quand la politique de concurrence européenne réagissait jusque-là aux abus à contretemps. Sur le papier, les sanctions en cas de non-respect des obligations sont dissuasives : des amendes pouvant atteindre jusqu’à 10% du chiffre d’affaires mondial, entre autres. Dans les faits, tout sera affaire de rapport de forces. Une vieille habitude avec les géants d’internet.

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